Origine et histoire du Ferrier antique
Ferrier antique de Tannerre-en-Puisaye
Le ferrier antique de Tannerre-en-Puisaye est l'un des deux plus grands ferriers de France. Situé immédiatement au nord du bourg, dans et autour du bois de la Garenne, il s'étend sur environ 30 hectares modelés par des trous d'extraction et des tas de scories, dont certaines buttes atteignent 15 mètres. Les deux tiers du site se trouvent dans le bois et les parcelles boisées voisines, le tiers restant sur des terres cultivées et en zone habitée ; 15,2 hectares appartiennent à la commune et sont classés monument historique depuis 1982. L'activité minière et sidérurgique y remonte à l'Antiquité, depuis la période gauloise des Sénons jusqu'au Bas-Empire romain, puis décline au Haut Moyen Âge avant de disparaître. Le minerai était d'abord ramassé à ciel ouvert, puis extrait en fosses jusqu'à environ deux mètres et, plus tard, en puits et galeries étayées ; plusieurs de ces fosses sont encore visibles et partiellement comblées. Trois puits gallo-romains ont été mis au jour, larges d'environ 1,20 m et alimentant un débit de 2 m3/h, avec des profondeurs relevées entre 6 et 9 m ; ils sont comblés aujourd'hui. Les minerais employés étaient principalement l'hématite rouge et la limonite, la marcassite étant rarement utilisée. Le fer était produit sur place dans des bas-fourneaux d'argile par réduction directe, puis purifié en forge ; l'occupation romaine a considérablement intensifié la production et l'outillage des ateliers. Le paysage du ferrier, qui faisait partie d'un bois plus étendu — la présence d'eau, de charbon et des conditions de ventilation favorisaient l'exploitation — témoigne de cette longue histoire industrielle. À la fin du Moyen Âge la production s'est ralentie ; la motte de Champlay, érigée sur une partie du site et non rebâtie après sa destruction, illustre ce déclin. L'exploitation industrielle des scories pour l'empierrement des routes et le ballast ferroviaire s'est développée à partir du XIXe siècle et s'est systématisée de 1900 à 1982, année du classement du site. Les déchets riches en fer et en manganèse étaient envoyés vers des hauts-fourneaux, tandis que la silice contenue dans les scories servait de fondant pour faciliter la fusion en forge. Un réseau ferroviaire interne, des ateliers et des logements d'ouvriers ont fonctionné sur le site au début du XXe siècle ; l'activité a été interrompue pendant la Première Guerre mondiale, reprise ensuite et mécanisée après la Seconde Guerre mondiale. Classé monument historique en 1982, le ferrier a cessé toute exploitation industrielle et est devenu un terrain d'étude pour archéologues et historiens. Après une longue période d'abandon, l'association du ferrier, créée en 2008, a entrepris un important chantier de nettoyage, de débroussaillage et de réhabilitation des sentiers, et a inauguré ses aménagements en 2009. Les équipements réalisés comprennent des portiques d'entrée, des panneaux d'information, des aires de repos et des postes reconstitués illustrant les étapes d'extraction et de traitement du minerai. L'association a fabriqué des outils et reconstitué un bas-fourneau antique avec son soufflet, une forge médiévale et un grand soufflet de type XIXe siècle ; le bas-fourneau est périodiquement reconstruit pour des démonstrations. Une partie du chemin de fer historique a été remise en place en voies de 500 et 600 mm, avec rails, aiguillages et un wagonnet d'époque, et un poste d'extraction des scories doté d'un crible reconstruit à l'identique a été installé. Ces aménagements ont permis d'exposer un site représentatif de l'exploitation au XIXe et au début du XXe siècle et ont contribué à des découvertes archéologiques, comme des fragments de tuyère et de poterie. Le ferrier accueille des visites guidées, des démonstrations de réduction en bas-fourneau lors d'événements nationaux et la fête du ferrier, et propose un parcours permanent d'orientation balisé dans le bois ; les cartes d'orientation sont disponibles au restaurant local « Le Coup d'Frein ». L'association a également publié un livret sur l'histoire du site, disponible depuis fin 2013. Le ferrier de Tannerre constitue ainsi un témoignage majeur de l'exploitation du fer en Puisaye, du développement antique à l'industrialisation moderne.