Origine et histoire de la Fontaine des Quatre-Saisons
La fontaine des Quatre-Saisons est une fontaine monumentale à bassins située dans le 7e arrondissement de Paris, aux 57 et 59 de la rue de Grenelle. Édifiée sur un terrain donné par le couvent des Récollettes, sa construction fit l’objet d’un marché public le 3 juin 1739 passé avec Jacques Mégrelin sur la base du devis de Jean‑Baptiste‑Augustin Beausire. Le chantier, mené par la Ville de Paris sous la responsabilité de Michel‑Étienne Turgot, visait à fournir de l’eau au quartier tout en constituant un monument commémoratif en l’honneur de Louis XV. Le coût total fut important, supérieur à 139 000 livres, et la maîtrise d’œuvre ainsi que l’ensemble du décor sculpté furent confiés à Edme Bouchardon. Les travaux furent achevés en 1745. Le projet, très imposant pour une rue étroite, suscita des réactions, dont la raillerie de Voltaire dans une lettre au comte de Caylus en 1739, mais Turgot se déclara satisfait et accorda à Bouchardon une pension annuelle de 1 500 livres. La fontaine a été classée parmi les monuments historiques dès 1862, classement confirmé en 1928. Elle était alimentée par les eaux de Rungis puis, à partir de 1787, par la pompe à feu du Gros‑Caillou, mais son faible débit lui valut le surnom de « la Trompeuse » et elle fut désertée à la fin du XIXe siècle. Restaurée par la Ville de Paris, elle a été remise en eau en 1978 et, après d’importants travaux de ravalement, inaugurée le 12 novembre 2024.
À partir de 1750, sous l’impulsion des philosophes, les architectes revinrent à une conception de l’architecture publique qui devait d’abord annoncer clairement sa destination, ensuite posséder un caractère propre capable de susciter des émotions en rapport avec sa fonction, et enfin participer à l’édification morale et civique des habitants.
La fontaine, appelée tardivement des Quatre‑Saisons en raison des quatre bas‑reliefs et des quatre statues qui figurent les saisons, se distingue à Paris par son ampleur, son décor et son architecture. Elle adopte l’allure d’une façade de palais de style classique d’environ dix mètres de hauteur et s’étend sur près de vingt mètres le long de la rue de Grenelle, avec deux portails encadrant un ressaut central pourvu de colonnes ioniques et d’un fronton. Un imposant groupe sculpté surmonté d’une inscription latine en l’honneur de Louis XV domine la composition. Le caractère de monument peu évident au premier regard s’explique par le fait que seuls quatre mascarons de bronze, placés sur le soubassement à cinquante centimètres du sol et crachant l’eau, signalent sa fonction hydraulique. L’ensemble ressemble davantage à la façade d’un hôtel particulier ou d’une église; les portails sont fermés et donnent accès à un jardin attenant au musée Maillol pour celui de droite et à un immeuble moderne pour celui de gauche, tandis que l’étroitesse de la rue prive le passant d’un recul suffisant pour en apprécier pleinement la façade.
Le décor sculpté comporte, au centre, une allégorie féminine de la ville de Paris assise, flanquée de deux figures allégoriques représentant la Marne et la Seine, et surmontée de la plaque de dédicace encadrée de colonnes. Près du sol, les quatre mascarons matérialisent le rôle de point d’eau pour le quartier; ce même modèle de mascaron se retrouve à la fontaine de Mars, rue Saint‑Dominique, postérieure d’environ cinquante ans. De part et d’autre du ressaut central, les armoiries de la Ville de Paris sont entourées de bas‑reliefs montrant des putti aux travaux des champs suivant les saisons, chaque bas‑relief étant surmonté d’une niche abritant une statue en ronde‑bosse représentant une saison sur un mode mythologique. La disposition se répète symétriquement et évoque, de gauche à droite, le printemps, l’été, l’automne et l’hiver. L’encadrement des armoiries reprend discrètement les traits de la tête‑monstre des mascarons, liant ainsi les motifs décoratifs de l’ensemble.
--paris-3eme.jpg)
