Origine et histoire de la fontaine des Trois Grâces
La Fontaine des Trois Grâces, conçue par l’architecte Jacques Donnat et sculptée par Étienne Dantoine, fut initialement destinée à la place de la Canourgue. Commandée par le Conseil de ville en 1770, la réalisation mobilisa des marbres choisis par Dantoine lors d’un voyage à Carrare et une partie de la taille fut exécutée par des marbriers italiens avant d’être achevée dans son atelier rue des Étuves. Le groupe en marbre comprend, au centre d’un entassement de rochers, des putti répartis en trois groupes de deux — certains jouant avec une tortue — et, sur une petite plateforme circulaire, le socle torsadé qui supporte les Trois Grâces. Les Grâces sont figurées debout, dos à dos, se tenant par la main ; l’une de leurs mains est levée, l’autre abaissée, et elles tiennent des guirlandes de roses. La vasque qui les entoure proviendrait d’un remploi des marbres du soubassement de la statue de Louis XIV au Peyrou, dont le socle fut réutilisé après la destruction de la statue pendant la Révolution. Après des différends entre l’artiste et la municipalité sur le poids et la qualité du marbre, et un procès qui reconnut la valeur de l’œuvre, la municipalité fut contrainte de régler le solde dû à Dantoine. Le groupe quitta la place de la Canourgue pour la place de la Comédie le 19 floréal an V (8 mai 1793) et y fut installé sur un piédestal de marbre provenant du monument au roi de la promenade du Peyrou. Au fil des réaménagements de la place, la fontaine subit plusieurs déplacements et transformations : la vasque fut réparée en 1842 par le marbrier Hortoles ; en 1893 le perron du théâtre entraîna un déplacement de quelques mètres et le sculpteur Auguste Baussan conçut un grand piédestal rocheux en forme d’œuf pour servir d’écrin aux Trois Grâces. D’autres opérations de voirie en 1976 provoquèrent un nouveau déplacement. En 1989, la sculpture, gravement altérée par la pollution atmosphérique, fut retirée et remplacée par un moulage en résine ; le groupe original en marbre fut transféré dans le hall d’accueil de l’Opéra Comédie. La fontaine fut entièrement rénovée en janvier 2003 : elle présente désormais deux bassins superposés, des margelles de pierre avec rampe métal, des ruissellements et des jets croisés, et un éclairage nocturne bleu qui souligne la margelle, les putti et le caniveau extérieur. La vasque d’origine, datée de 1797, a été déposée au domaine de Vissec, près de l’abbaye de Valmagne. Le musée Fabre conserve une réduction en plâtre, Groupe d’enfants (1773), réplique d’un élément de la fontaine, et une photochrome de la fin du XIXe siècle montre le groupe en marbre sur le piédestal modifié de 1893, conservée à la Bibliothèque du Congrès à Washington. Emblématique de Montpellier, l’ensemble représente les Trois Grâces — Aglaé, Euphrosyne et Thalie — filles de Zeus, symbolisant la séduction, la beauté, la nature, la créativité humaine et la fécondité. L’intégralité du monument est classée au titre des monuments historiques depuis le 5 décembre 1963.