Origine et histoire du Fort
Le fort dit d'Uxegney, brièvement rebaptisé fort Roussel en 1887, appartient à la place forte d'Épinal et se situe au nord-est d'Uxegney (Vosges). Construit de 1882 à 1884, il a été renforcé entre 1894 et 1896 par des bétonnages, la pose de coffres de contrescarpe et le renforcement de la caponnière de gorge. Un ultime programme de modernisation, mené de 1910 à 1914, lui a donné sa physionomie définitive avec l’installation d’une tourelle à éclipse Galopin pour canon de 155 mm, d’une tourelle à éclipse pour deux canons de 75 mm, de casemates de Bourges dans chaque flanc, de casemates et de galeries, ainsi que de tourelles à éclipses pour mitrailleuses et de guérites-observatoires. La tourelle Galopin, mécanique de 250 tonnes datée de 1907, est le dernier exemplaire subsistant dans cet état. Conçu selon le système Séré de Rivières, le fort est un ouvrage de deuxième génération, d’un plan pentagonal et prévu pour une garnison de 287 hommes. Il occupe une hauteur de 379 mètres et contrôlait l’axe Épinal–Mirecourt, la voie ferrée Épinal–Nancy, le canal de l’Est et le sud de la trouée de Charmes. À l’origine, l’armement comprenait environ dix pièces de campagne disposées à l’air libre sur les faces avant, dont des canons de type Bange ou Lahitolle. L’ouvrage conserve de nombreuses spécificités architecturales : un casernement de gorge en retrait de l’escarpe, une double citerne de 140 m3 dans la contrescarpe du saillant V, un dispositif de contremine accessible par trois galeries depuis une salle bétonnée sous le coffre double, et des dalles en saillie propres à la chefferie d’Épinal. Les fossés secs étaient défendus par des caponnières et coffres de contrescarpe, et le glacis était doublé d’un réseau de fils barbelés ; deux redoutes et cinq batteries complétaient les abords immédiats. En 1887 le ministre Georges Boulanger donna au fort le nom de Roussel en hommage au général Nicolas François Roussel d'Hurbal, mais ce décret fut abrogé la même année et le nom original rétabli ; Roussel (1763–1849) fut un officier de cavalerie admis comme général de brigade dans les troupes françaises. Après l’apparition de l’obus-torpille, des renforcements partiels furent exécutés à la fin du XIXe siècle, puis des travaux plus étendus conduisirent aux aménagements en béton et aux cuirassements de la période 1910–1914. Entre les deux guerres le fort fut entretenu et employé comme dépôt ; il échappa en 1944 aux dépouillements dont souffrirent d’autres ouvrages de la place d’Épinal. Utilisé comme remise à matériel et dépôt de munitions jusque vers 1960, il fut ensuite abandonné avant d’être repris par des bénévoles. Depuis octobre 1989 l’ARFUPE restaure et entretient le fort et le fort voisin de Bois-l’Abbé ; la restauration vise à restituer l’état opérationnel de 1914 et a permis de rendre fonctionnels la plupart des cuirassements, les casemates de Bourges, les cuisines, le pont-levis et la centrale électrique. Les tourelles de mitrailleuses sont en cours de restauration mais restent utilisables, du mobilier et des équipements ont été récupérés et remis en place, et la jonction par voie de 60 avec Bois-l’Abbé a été réalisée en 2009. Le fort, inscrit avec ses réseaux défensifs et la batterie M35 à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques le 29 avril 2002, est ouvert aux visites de mai à septembre. Le site a également servi de lieu de tournage en 2016 pour le film Nos patriotes.