Origine et histoire du Fort Saint-Jean
Le fort Saint‑Jean est une construction militaire située à l'extrémité sud‑ouest du quartier du Panier, à l'entrée nord du Vieux‑Port de Marseille, érigée en calcaire rose de La Couronne sur un éperon prolongeant la butte Saint‑Laurent. Il doit son nom à la commanderie des Hospitaliers de Saint‑Jean de Jérusalem, établie sur ce promontoire vers la fin du XIIe siècle. Des vestiges de la première occupation grecque au VIe siècle av. J.-C. ont été découverts sur le site. Au XVe siècle une tour carrée fut construite par le roi René pour garder la passe du port ; cette tour forme aujourd'hui la tour dite du roi René. Une tour ronde, la tour du fanal, a été élevée au milieu du XVIIe siècle pour servir de vigie à l'entrée du port. La construction du fort tel qu'on le connaît résulte des décisions prises après le siège de Marseille et la répression de la révolte municipale : la citadelle Saint‑Nicolas et le fort Saint‑Jean furent prévus pour assurer le contrôle royal sur la ville et ses accès maritimes. La première campagne de travaux, menée par Louis Nicolas de Clerville, comprit l'expropriation des Hospitaliers, la démolition de nombreuses habitations, l'édification d'une enceinte bastionnée autour de la commanderie et de la tour du roi René, ainsi que la construction de casernes et de bâtiments intérieurs. À partir de 1679 Vauban renforça le dispositif en creusant un large fossé inondable et en réalisant une batterie basse à barbette. Les fouilles de 1908 et les carottages de 1991 ont mis en évidence des niveaux archéologiques de l'âge du Fer et des périodes hellénistique et antique. Au Moyen Âge la colline accueillait le château Babon et la commanderie des Hospitaliers, qui possédait une église et un palais du commandeur, lieu de réception de personnages de haut rang. Le système défensif médiéval comprenait la tour Maubert, ou tour de la chaîne, qui participait avec des chaînes tendues entre les rives à la fermeture de la passe du port ; ce dispositif resta en usage jusqu'au XIXe siècle. La tour du roi René, reconstruite après le pillage de 1423, et la tour du fanal constituent les éléments les plus visibles de l'ancienne commanderie intégrée ensuite dans l'enceinte du fort. Pendant la Révolution le fort servit de prison pour Philippe Égalité et des membres de sa famille et fut aussi le théâtre de violences, dont le massacre de Jacobins le 5 juin 1795. Les révolutionnaires endommagèrent une partie de l'enceinte en 1790 ; des réparations et des reprises furent effectuées au XIXe siècle, souvent avec des matériaux différents de la pierre d'origine. Le comblement et l'aménagement du canal reliant le Vieux‑Port à la Joliette, la création du bassin de la Joliette et la réalisation de ponts tournants transformèrent l'assiette et l'accès du fort au XIXe et au début du XXe siècle. Le pont transbordeur, inauguré en 1905, reliait les rives du Vieux‑Port jusqu'à sa destruction en 1944. Lors de l'occupation allemande pendant la Seconde Guerre mondiale, des munitions furent entreposées dans le fort et leur explosion à la Libération détruisit plusieurs bâtiments anciens. Après la guerre l'armée procéda à des nivellements sans reconstruire l'ensemble des édifices ; le fort fut cédé au ministère des Affaires culturelles et classé monument historique en 1964. De 1967 à 1971 de nouveaux bâtiments furent édifiés dans la partie basse pour accueillir le service des antiquités sous‑marines, puis le DRASSM ; ces locaux ont été intégrés au MuCEM en 2013. Des restaurations et fouilles ont été conduites entre 1975 et 2000, portant notamment sur les tours, la chapelle Saint‑Jean et la galerie des officiers, ainsi que sur l'aménagement d'un mémorial des camps de la mort dans un ancien bunker allemand. Relié au bâtiment contemporain du MuCEM par une passerelle, le fort abrite aujourd'hui des espaces d'exposition, des ateliers, des salles dédiées à l'histoire du site et des jardins plantés d'espèces méditerranéennes. La tour du roi René est consacrée à l'histoire du lieu, la chapelle accueille des expositions, le bâtiment Georges‑Henri Rivière sert pour des expositions temporaires et le bâtiment ancien du DRASSM accueille l'Institut Méditerranéen des Métiers du Patrimoine, tandis que des parcours muséographiques et extérieurs offrent des vues sur le port et ses installations.