Origine et histoire du Fort Vercingétorix
Le fort du Cognelot, également appelé localement fort de Chalindrey et brièvement fort Vercingétorix, appartient à la ceinture fortifiée de Langres établie après la guerre de 1870. Construit selon les principes de l'ingénieur Séré de Rivières — fortification polygonale, rationalisation des éléments architecturaux et construction quasi‑souterraine — il demeure toutefois atypique parmi ses contemporains. Les saponnières rencontrées dans d'autres forts Séré y sont remplacées par des coffres d'escarpe et de contrescarpe, et l'ouvrage relève d'une catégorie mixte, conçu pour se défendre isolément tout en étant interdépendant des autres édifices du dispositif. Le fort se situe au sommet de la montagne du Cognelot, à 470 mètres d'altitude, au sud‑est de la commune de Chalindrey, et a été construit entre 1874 et 1877. Par décret du 21 janvier 1887 le ministre Boulanger le rebaptisa « Vercingétorix », nom gravé au fronton ; le décret fut abrogé le 13 octobre 1887 et l'ouvrage reprit officiellement son nom antérieur tout en conservant cette inscription, qui renvoie au chef gaulois Vercingétorix. Le fort fut désarmé en 1915 pour envoyer ses pièces d'artillerie sur le front et, en 1944, une casemate à tir indirect fut détruite par les troupes américaines lors d'essais d'explosifs. Depuis 1995 il appartient à la communauté de communes du pays de Chalindrey, et une association de sauvegarde créée en janvier 2002 en assure l'entretien et les visites.
Implanté à 7,7 km de Langres, le Cognelot formait le môle sud‑est de la place forte, entre les ouvrages de la Croix d'Arles et de Montlandon, avec la batterie annexe du Pailly à 700 mètres au sud‑ouest. Il domine le nœud ferroviaire et la gare de Culmont‑Chalindrey situés à 2,7 km à l'est. S'étendant sur 29 hectares, l'ouvrage a la forme d'un hexagone très irrégulier, presque rectangulaire, avec une enveloppe bastionnée qui occupe le sommet et un réduit isolé au centre. Conçu comme un fort d'arrêt, il peut se défendre sur tous les côtés, contrairement aux forts de ceinture plus ouverts sur le front de gorge. Les fossés sont protégés non par des caponnières mais par deux coffres de contrescarpe et un coffre d'escarpe, et l'enveloppe comprend trois casemates à tir direct ainsi que des hangars destinés au stockage des pièces en temps de paix.
Le réduit présente une configuration particulière : isolé dans l'enveloppe, il comporte une brisure créant un angle rentrant pourvu d'un coffre double d'escarpe et d'un coffre double de contrescarpe avancé dans le fossé, disposition peu commune dans le système Séré de Rivières. Ces coffres sont devancés par leur propre fossé traversé par une gaine d'accès crénelée faisant office de caponnière, de sorte que les feux couvrent des fronts qui ne se croisent pas selon le schéma classique. L'entrée du réduit s'ouvre dans une petite courtine ; le porche débouche sur un tunnel flanqué de logettes, dont l'une contient un puits, puis sur une première cour en puits de lumière bordée de sept chambrées chauffées chacune par un âtre. Deux magasins à poudre, alignant quatre créneaux à lampe, devaient contenir respectivement 100 tonnes et 80,6 tonnes de poudre, le second étant plus court de 2,25 mètres. Un second tunnel donne accès à une deuxième cour plus petite et orientée selon la brisure du périmètre, tandis qu'une galerie de circulation arrière permettait de joindre tous les locaux du réduit sans traverser ces cours.
L'enveloppe abritait plusieurs traverses‑abris, dont certaines coiffées d'observatoires bétonnés, un corps de garde, des hangars d'artillerie et des baraquements. Parmi les aménagements défensifs figurent des goulottes pour grenades donnant dans chaque créneau de pied et des renforcements intérieurs soignés avec enduit cimenté et faux joints de maçonnerie. Le massif central est organisé en crête d'infanterie accessible par deux escaliers en colimaçon, et son élément le plus remarquable est un poste de communications optiques casematé à trois directions : deux grands créneaux communiquaient respectivement avec le fort de Chailluz à Besançon et le réduit du Mont Afrique à Dijon, et le troisième, plus petit, était possiblement orienté vers le fort de Plesnoy ; certains éléments de l'héliostat y sont encore en place. À l'extérieur du poste optique se trouvait une table d'orientation dont la circulaire en bronze avait été retirée par les villageois avant d'être conservée jusqu'à la création de l'association de sauvegarde. Le projet initial prévoyait la livraison de deux casemates cuirassées en fonte dure modèle 1878 et d'une troisième dans l'enveloppe, ce qui ne fut pas réalisé.