Origine et histoire de la gare
La gare de Strasbourg-Ville, appelée couramment gare de Strasbourg ou gare centrale, est située près du centre-ville de Strasbourg, dans la collectivité européenne d'Alsace en région Grand Est. Inaugurée en 1883 par l'administration allemande, elle remplace l'ancienne gare du Marais-Vert et constitue le nœud d'une importante « étoile ferroviaire » à cinq branches, dont une transfrontalière. Exploité par la SNCF, l'établissement assure des dessertes régionales, nationales et internationales et constitue le principal pôle d'échanges de l'agglomération strasbourgeoise ; hors Île-de-France, il se classe au troisième rang national pour le trafic voyageur. Un réaménagement majeur, lié à la mise en service du TGV Est, a été réalisé en 2007 et se traduit notamment par la pose d'une grande verrière protégeant la façade historique.
Établie à 143 mètres d'altitude au point kilométrique 502,000, la gare est l'aboutissement de la ligne de Noisy-le-Sec à Strasbourg-Ville et l'origine de plusieurs lignes vers Saint-Louis, Saint-Dié, Lauterbourg et Strasbourg-Port-du-Rhin ; elle sert aussi au chaînage des kilomètres de la ligne de Réding à Metz-Ville. L'infrastructure compte neuf voies de passage et cinq voies en impasse, plus des voies de service ; la vitesse limite dans la zone des quais est de 30 km/h et l'ensemble des voies est électrifié en 25 kV – 50 Hz. La circulation est pilotée de façon centralisée par un poste d'aiguillage informatique unique, Strasbourg-Ville poste 1, qui commande de nombreux itinéraires et gère un millier de mouvements quotidiens.
La desserte ferroviaire de Strasbourg débute en 1841 avec un débarcadère provisoire à Koenigshoffen, suivi en 1846 par la gare du Marais-Vert le long du quai Kléber, qui deviendra ensuite une halle de marché et conservera des fonctions marchandises. Le projet d'une nouvelle gare de passage est lancé en 1871 dans le cadre de la Neustadt ; conçu par l'architecte Johann Eduard Jacobsthal et inspiré de la gare de Hanovre, le bâtiment voyageurs est mis en service en 1883, même si des travaux se poursuivent jusqu'à la fin du siècle. Conçue comme gare voyageurs, gare aux marchandises, triage et dépôt, l'installation s'étendait à l'origine sur quelque 37 hectares et s'ouvrait sur une vaste place en hémicycle d'environ 33 000 m², entourée d'axes urbains et d'hôtels.
Le bâtiment principal, en grès des Vosges, présente des façades de style néo-Renaissance ; le hall central avait été orné en 1885 de deux grandes fresques réalisées par Hermann Knackfuss ainsi que de deux statues d'Otto Geyer représentant l'agriculture et l'industrie, ces dernières demeurant dans le hall tandis que les fresques disparaîtront par la suite. Côté voies, une halle métallique protégeait les quais et des salons impériaux dessinés par Hermann Eggert, très richement aménagés, s'ouvrent sur un quai latéral ; ces salons, peu utilisés par la famille impériale, seront réaménagés en salons d'honneur puis transformés en bureaux et salles de réunion. L'accès aux quais se faisait à l'origine par plusieurs souterrains, et la gare disposait d'installations électriques avancées pour son époque, dont deux centrales électriques, l'une de celles-ci étant réaffectée en restaurant d'entreprise.
Au tournant du XXe siècle, des extensions et nouveaux quais sont ajoutés pour répondre à l'augmentation du trafic, tandis que les installations de triage et de marchandises seront progressivement transférées vers des sites périphériques tels que Hausbergen et Cronenbourg. La gare a connu des événements marquants au XXe siècle : elle est bombardée par un dirigeable en 1915, réintégrée au réseau français après la Première Guerre mondiale, gérée par la Deutsche Reichsbahn pendant la Seconde Guerre mondiale, puis modernisée au sortir du conflit avec la mise en service de nouveaux postes et, plus tard, l'électrification des voies de gare en 1956. Divers aménagements et changements d'usage — ciné, commerces, restauration — se succéderont tout au long du siècle.
La protection patrimoniale a été engagée à la fin du XXe siècle, l'ensemble formé par le bâtiment principal et la halle métallique faisant l'objet d'une inscription au titre des monuments historiques en 1984. L'arrivée du tramway en 1994 et la création d'une station souterraine ont profondément modifié la place de la Gare et l'organisation des circulations piétonnes et commerciales. À l'approche du TGV Est, d'importants travaux préparatoires ont été menés : un nouveau poste d'aiguillage informatique a été mis en service en novembre 2006, les quais ont été allongés et rendus accessibles aux personnes à mobilité réduite, et des voies de garage pour rames régionales ont été recréées.
Le réaménagement mené à partir de 2006 par l'architecte Jean-Marie Duthilleul a notamment abouti à l'installation, le 5 novembre 2007, d'une verrière de 18 arcs métalliques et 900 panneaux de verre couvrant environ 8 000 m², ainsi qu'à la création d'un troisième hall, de nouveaux accès au tramway et à la rénovation des espaces commerciaux et des salons anciens ; ce chantier, qui visait à renforcer la centralité de la gare et à préparer l'augmentation du trafic, a reçu un Brunel Award en 2008. Les aménagements ont connu des ajustements opérationnels, comme des renforts de ventilation dans les niveaux souterrains et des interventions pour limiter les infiltrations, certaines intempéries ayant aussi provoqué des inondations ponctuelles sous la verrière.
Depuis la réforme ferroviaire et l'évolution des structures de la SNCF, la gare reste un pôle très fréquenté ; elle supporte une importante activité quotidienne avec plusieurs centaines de trains et des renouvellements d'appareils de voie réalisés entre 2014 et 2017. Sa fréquentation annuelle a été estimée à 15 millions de voyageurs vers 2008, à 16,1 millions en 2011 et à environ 24,6 millions en 2024. Des projets d'extension commerciale et de redéploiement urbain autour de la gare sont en cours : une augmentation de la surface commerciale, des terrasses sous la verrière et l'ouverture d'un restaurant haut de gamme dans les anciens salons de l'Empereur font partie des opérations engagées entre 2022 et 2026, tandis que des perspectives d'ouverture à 360° et de réaffectation des emprises à l'ouest restent à l'étude pour accompagner l'évolution du quartier et des mobilités.