Gisement préhistorique de Laussel à Marquay en Dordogne

Patrimoine classé Sites archéologique Gisement préhistorique

Gisement préhistorique de Laussel à Marquay

  • D48
  • 24620 Marquay
Crédit photo : photo 120, œuvre dont l'auteur est mort depuis env - Sous licence Creative Commons
Propriété d'une société privée

Période

Préhistoire

Patrimoine classé

Le gisement préhistorique (cad. AV 20) : inscription par arrêté du 27 février 2007

Origine et histoire du gisement préhistorique

L'abri de Laussel, dit Grand abri de Laussel, est un abri sous roche situé sur la commune de Marquay, en Dordogne, dans le Périgord noir. Les fouilles du site ont commencé en 1894 et l'abri a livré notamment cinq blocs de pierre ornés, parmi lesquels la célèbre Vénus de Laussel dite « vénus à la corne », ainsi que le « chasseur », la « vénus à la tête quadrillée », la « vénus de la carte à jouer », la « vénus de Berlin » et le « priape de Laussel ». L'abri se trouve sur la rive droite de la Grande Beune, à environ 2,5 km à vol d'oiseau à l'ouest du bourg de Marquay, à 500 m en amont du château de Laussel ; il est situé à quelques mètres au‑dessus du fond de vallée (95 m d'altitude) et à 20 m sous la route D48. La vallée de la Vézère est à environ 7 km en aval et la vallée de la Dordogne à environ 11 km au sud‑sud‑ouest. Le site est proche d'autres gisements préhistoriques célèbres, comme la grotte de Commarque à 500 m au sud‑est, l'abri de Cap Blanc à quelque 800–900 m à l'ouest et la grotte de la Grèze à 1 300–1 400 m, et s'inscrit dans la forte concentration de sites autour des Eyzies et de la vallée de la Vézère.

La falaise est constituée de calcaire du Coniacien C4 et s'ouvre vers le sud, bénéficiant d'un bon ensoleillement, tandis que sa base reste humide en raison d'une nappe phréatique proche. La répétition quotidienne des gels et dégels a favorisé une microgélivation et contribué à l'érosion et à la formation rapide de l'auvent de Laussel, plus rapide que celle des parois ombrées voisines. Des périodes de gel intense ont provoqué des macrogélivations et des effondrements massifs, visibles dans les couches stratigraphiques plus récentes ; certains éboulis se sont probablement produits pendant la glaciation de Würm. Des épisodes récents de froid intense, notamment l'hiver 1984‑1985, ont entraîné des détachements de blocs sur plusieurs sites, et des plaques ainsi détachées ont parfois servi de supports gravés, comme cela a été observé à Laussel.

Le surplomb principal du Grand abri mesure aujourd'hui environ 115 mètres de long et sa largeur varie entre 15 et 25 mètres. Un Petit abri, plus petit et situé côté amont, a été occupé à peu près simultanément mais n'a pas livré de blocs ornés. L'abri du Four, aussi appelé abri du Moulin, se trouve sur la rive droite de la Beune à l'emplacement de l'ancien moulin de la Faurie ; Capitan et Breuil décrivent une partie de la paroi ayant été déblayée et réutilisée comme grange.

Le site a été reconnu pour la première fois en 1894 par Émile Rivière. Jean‑Gaston Lalanne a loué le gisement et dirigé des fouilles de 1908 à 1914 avec une équipe conduite par Raymond Peyrille ; Lalanne a ensuite classé le mobilier avec l'aide d'Henri Breuil puis de Jean Bouyssonie, qui a achevé l'inventaire après la mort de Lalanne et l'a publié en 1946, recensant 10 522 pièces pour le Paléolithique moyen (Moustérien) et 16 288 pièces pour le Paléolithique supérieur, hors série solutréenne. Jean Bouyssonie a remis, peu avant sa mort, des tableaux manuscrits plus détaillés à Alain Roussot, documents précieux alors que les collections avaient été dispersées après la guerre. Louis Capitan a aussi mené de petites fouilles dans l'abri du Moulin en août‑septembre 1903.

L'industrie lithique du Grand abri couvre des occupations allant du Moustérien au Solutréen, et l'abri du Four inclut du Magdalénien supérieur. Le Petit abri a livré un galet volcanique probablement utilisé comme pilon et daté entre 70 000 et 40 000 ans AP, attribué au Moustérien, tandis que le Grand abri a fourni des vestiges gravettiens, notamment des pierres utilisées comme mortiers ou pilons et des perçoirs.

L'abri a livré plusieurs pièces d'art mobilier et des bas‑reliefs célèbres, en particulier la Vénus de Laussel, la Vénus de Berlin, la femme à tête quadrillée, la Vénus double tête‑bêche dite « en miroir », ainsi que la figure dite « le chasseur ». La statuette gravettienne dite « priape de Laussel », en calcaire, est datée de 22 000 ans AP. Les blocs ornés ont fait l'objet de débats de datation : certains auteurs, comme Henri Breuil, les placent au Gravettien, d'autres, comme Denis Peyrony et Annette Laming‑Emperaire, les rattachent à l'Aurignacien, tandis que d'autres travaux répartissent les figures et techniques entre Aurignacien, Gravettien et début du Solutréen selon les modèles et les procédés.

Des traces d'ocre rouge et des dalles fortement colorées ont été signalées dans certains niveaux, ainsi que des cupules et des empreintes qui évoquent la présence possible d'art pariétal et d'occupations aurignaciennes et gravettiennes comparables à d'autres gisements périgourdins. Les blocs et le mobilier extraits ont été donnés par la famille Lalanne au musée d'Aquitaine à Bordeaux en 1961 ; environ un tiers de la collection avait été acquis en 1938 par le colonel Vésignié et donné au musée de l'Homme en 1950, tandis que d'autres séries ont été cédées à divers chercheurs et institutions. Le gisement préhistorique de Laussel est inscrit au titre des monuments historiques depuis le 27 février 2007.

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