Période
Paléolithique
Patrimoine classé
La grotte en totalité (cad. D 405, 406, 506 à 508, 510, 512 à 515, 519, 534, 539 à 542, 786, 812 ; D partie de chemin rural, lieudit Genestal, domaine public, non cadastré ; D partie de la voie communale n° 211, lieudit Pecpugné ouest, domaine public, non cadastré ; D partie de la voie communale n° 212, lieudit Pecpugné est, domaine public, non cadastré ; E 278, 298 à 300, 318, 319, 899, 900, 975) : classement par arrêté du 3 juillet 2002
Origine et histoire de la Grotte de Cussac
La grotte ornée souterraine de Cussac se situe sur la commune du Buisson-de-Cadouin, en Dordogne, dans le Périgord, et se développe dans un massif karstique sur environ 1,6 kilomètre le long d’un affluent méridional de la Dordogne. Son entrée, sur une terrasse de travertin, correspond à l’exsurgence d’un réseau de rivières souterraines dont la galerie ornée constitue le segment fossile. La cavité présente une galerie linéaire divisée par une entrée médiane en deux branches : l’Aval, d’environ 600 mètres, rassemble l’essentiel des panneaux ornés et les principaux lieux à restes humains, tandis que l’Amont, proche de 1 kilomètre, comporte plusieurs figures majeures et des aménagements archéologiques ponctuels. Des investigations anciennes ont affecté la zone vestibulaire, puis la grotte a été redécouverte lors d’une prospection spéléologique en 2000 et désobstruée pour permettre l’accès aux galeries ornées. Face aux enjeux de conservation, l’État a rapidement engagé des mesures de protection juridique et physique, acquérant les parcelles concernées, instaurant des fermetures, un zonage archéologique et des actions de préservation environnementale et d’aménagement du conduit d’entrée. L’exploration scientifique organisée a débuté dans le cadre d’un projet collectif et pluridisciplinaire, mais l’accès reste limité en raison d’épisodes de gaz carbonique ; la grotte est placée sous protection scientifique et ne sera probablement pas ouverte au public. Deux reconstitutions du panneau de la découverte et de la bauge contenant un squelette ont été réalisées et sont exposées au Buisson-de-Cadouin.
La cavité abrite plus de cent cinquante gravures paléolithiques attribuées au Gravettien et un ensemble de restes humains que l’on interprète comme des sépultures apparemment associées aux figures pariétales. L’art pariétal est majoritairement gravé : près de 93 % des entités graphiques recensées le sont par incision ou raclage. Le premier inventaire répertorie environ 135 entités graphiques comprenant principalement des animaux, des signes, des indéterminés et une douzaine d’anthropomorphes. Le bestiaire se compose surtout de bisons, mammouths, chevaux et aurochs, avec des proportions plus faibles d’oies, bouquetins, rhinocéros et quelques espèces isolées comme l’ours ou le félin ; on observe aussi des animaux composites et des représentations indéterminées ou monstrueuses. Les gravures sont souvent de grandes dimensions — le plus grand bison atteint près de quatre mètres — et sont réalisées à l’aide d’outils lithiques, osseux ou en bois, tandis que des traits digitaux sont visibles sur l’argile des sols. L’emploi de pigments est rare, limité à quelques ponctuations rouges, et des tracés carbonés ont été interprétés comme des traces de mouchage de torches. Outre les figures animalières classiques, on note des entrelacs, des tracés digitaux, des silhouettes féminines de profil et des représentations sexuelles dominées par des vulves souvent associées à des mammouths ; ces œuvres présentent des thèmes et un style proches de ceux du Gravettien connus dans le Quercy, notamment à Pech‑Merle, et leur âge est estimé à environ 25 000 ans.
La grotte de Cussac figure parmi les rares sites paléolithiques européens où l’on trouve une association d’œuvres pariétales et de sépultures : au moins cinq individus, quatre adultes et un adolescent, ont été déposés dans des dépressions et des bauges à ours. Ces restes, d’abord qualifiés de dépôts mortuaires, font l’objet d’analyses suggérant un rituel funéraire structuré et une inhumation en deux temps. Plusieurs ossements ont été prélevés pour datation par le carbone 14, l’un d’eux fournissant un âge proche de 25 000 ans, ce qui rend probable la contemporanéité des œuvres et des sépultures, d’autant que l’entrée de la cavité semble avoir été rapidement obstruée après le passage des artistes préhistoriques.