Origine et histoire de la Grotte de la Mairie
La grotte de la Mairie, ou grotte de Teyjat, est un important site archéologique du nord de la Dordogne, occupé à la fin du Paléolithique supérieur et situé dans la commune de Teyjat, en Nouvelle‑Aquitaine. Elle abrite plus de quarante gravures pariétales magdaléniennes réalisées environ 11 500 ans avant le présent et bénéficie d'une protection au titre des monuments historiques. La cavité s'ouvre sur la bordure nord‑est du bourg, sous l'école, à proximité de l'église et de la mairie, d'où son appellation. L'encaissant est un calcaire jurassique fortement recristallisé en rosettes du fait d'une tectonique cassante. La grotte comprend deux niveaux : un niveau supérieur de 75 mètres et un réseau inférieur connu sur 40 mètres, où circule un petit cours d'eau souterrain, reliés entre eux par un puits. Les gravures se trouvent au niveau supérieur, sur les quinze premiers mètres après l'entrée, principalement sur le côté gauche. Les parois calcaires, peu propices à la gravure, ont conduit les artistes à inciser des motifs sur deux coulées de calcite ambrée ou sur une coulée stalagmitique. Au total, on compte 48 gravures réparties en deux ensembles distincts représentant des aurochs, des bisons, des bovidés, des chevaux, des cervidés, des rennes et des ours. Ces figures, de petite taille et finement incisées au silex, affichent un grand réalisme et de nombreux détails anatomiques. Selon André Leroi‑Gourhan, elles appartiennent au style IV récent du Magdalénien final, et la « frise des bovidés » est particulièrement célèbre pour son achèvement et son réalisme. Les 48 représentations se répartissent en cinq cervidés indifférenciés, onze cerfs, treize rennes, dix chevaux, trois aurochs, quatre bisons et deux ours. Par rapport aux autres grottes de Dordogne, les cervidés sont surreprésentés à Teyjat, alors que Lascaux et les Combarelles mettent en avant les chevaux, Font‑de‑Gaume les bisons et Rouffignac et Bernifal les mammouths. La composition faunique associe une composante froide — rennes, bisons et chevaux — et une composante tempérée — cerfs —, ce qui reflète le réchauffement climatique de la fin du Magdalénien et le départ vers le nord des grands herbivores de prairies froides. Le site fait l'objet d'observations et de fouilles depuis la fin du XIXe siècle ; il est visité à partir de 1880 et, en 1889, Perrier du Carne met au jour des gravures sur os (notamment la représentation d'un cheval sur un sacrum de renne) ainsi que des harpons à barbelures et ce qu'il identifie comme l'empreinte d'un arc. Les gravures pariétales sont reconnues en 1903 par Denis Peyrony, puis étudiées par Louis Capitan, Henri Breuil et Denis Peyrony. En 1904, l'instituteur Pierre Bourrinet entreprend des fouilles méthodiques sous la direction de Peyrony ; ses observations distinguent deux couches archéologiques séparées par un niveau d'éboulis stérile. La couche inférieure est attribuée au Magdalénien V et se caractérise notamment par des harpons à un seul rang de barbelures, tandis que la couche supérieure correspond au Magdalénien VI et contient des harpons à deux rangs de barbelures, des burins à bec‑de‑perroquet et des pointes de Teyjat pédonculées en silex. Selon la datation des vestiges, la couche inférieure est attribuée au Magdalénien V, datée d'environ 10 000 ans av. J.‑C., et contient des fragments de la paroi ornée directement reliés aux gravures. Le 4 avril 1910, la grotte est classée au titre des monuments historiques. Le décor pariétal a été réétudié par Claude Barrière dans les années 1960, puis fait l'objet de nouvelles analyses dans le cadre d'un programme dirigé par Patrick Paillet. Divers objets mobiliers contemporains au décor ont été découverts sur le sol de la cavité ; ils présentent des affinités avec les trouvailles de l'Angoumois et comprennent des outils et des armes, tels que des harpons et des pointes de projectile, dont les pointes de Teyjat. Un radius d'aigle incisé représente une harde de dix‑huit rennes. À proximité, l'abri Mège, situé derrière l'église de Teyjat et lui aussi occupé au Magdalénien, a livré une cheville osseuse ornée et un bâton percé décoré d'un cheval entouré de trois petits personnages qualifiés par Salomon Reinach de « diablotins » ou « ratapas ». La grotte est actuellement fermée au public pour des raisons de conservation. Une salle d'exposition contiguë, ouverte à la visite, propose une approche environnementale et culturelle de la vie des chasseurs‑cueilleurs de la fin des temps glaciaires et diffuse une vidéo détaillant cet ensemble majeur d'art pariétal paléolithique. Des fac‑similés d'objets essentiels y sont présentés, tels que la baguette semi‑ronde aux phoques de l'abri Mège, le bâton percé aux « ratapas » et le cubitus d'aigle gravé d'un troupeau de rennes stylisés.