Origine et histoire de la Grotte de la Vache
La grotte de la Vache est une petite grotte ornée d'Alliat, en Ariège, site archéologique du Paléolithique supérieur ayant livré des vestiges et de l'art mobilier du Magdalénien. Son nom dérive probablement de l'usage traditionnel des grottes alentour comme abri pour le bétail, autrefois appelées "Caougnos de los baccos", et de la forme du rocher en face de l'entrée qui évoque une vache. Elle se situe sur la pente abrupte du massif calcaire du Génat, en rive gauche du Vicdessos, à environ 450 m au nord d'Alliat et à 578 m d'altitude. On y accède par un chemin pédestre qui passe devant la grotte des Fées et le spoulga d'Alliat ; la grotte ornée de Niaux se trouve à environ 500 m en face.
La cavité, orientée nord-sud sur plus de 250 m, possède deux entrées proches ouvrant vers l'est et le sud-est qui se rejoignent dans la première salle dite Garrigou. De là, le côté sud s'ouvre sur la salle Monique et une galerie d'une cinquantaine de mètres aboutit à la salle Triangulaire ; la grotte comporte au total trois salles principales.
La grotte a été parmi les premières fouillées en Ariège : Félix Garrigou l'explora en 1866 et mit au jour une couche archéologique riche en matériel magdalénien avant d'interrompre ses travaux à cause d'une couche stalagmitique. Félix Regnault reprit les recherches et découvrit de nombreux os brisés, intentionnellement pour la plupart, ainsi que des objets lithiques et organiques ; Jean-Baptiste Noulet rassembla ensuite une collection remise au musée d'histoire naturelle de Toulouse. Romain Robert fouilla le site à partir de 1940, d'abord au porche puis, sur conseil d'Henri Breuil en 1941, dans la salle principale où il retrouva la couche archéologique intacte qu'il explora jusqu'en 1950. Il découvrit la salle Monique en 1952 et la fouilla jusqu'en 1964, recueillant de nombreux objets ; René Gailli, rencontré en 1953, devint conservateur de la grotte jusqu'à son décès en 2017. Certaines sources indiquent que les fouilles ont pu se prolonger jusqu'en 1967 ; le deuxième gisement évoqué en 1952 correspond vraisemblablement à la salle Monique.
Le site a livré une collecte abondante d'objets magdaléniens, notamment de très nombreux harpons, pointes de sagaies et plus de deux cents pièces d'art mobilier en os, bois de renne et bois de cerf, gravées ou sculptées. Ces œuvres représentent des animaux et parfois des humains, incluant des espèces rarement figurées à l'époque comme panthères, ours, loups, antilopes saïgas et divers oiseaux ; des poissons, notamment des saumons, figurent également sur le mobilier. Parmi les pièces remarquables, Romain Robert a mis au jour un bois de cerf très ouvragé, surnommé le "Poignard", provenant de la couche 2 de la salle Monique et daté à 12 540 ± 105 BP ; de nombreux objets sont partiellement recouverts de calcite.
Certains objets osseux gravés présentent des colorations alternant rouge d'hématite et noir d'oxyde de manganèse ; ces pigments sont systématiquement associés à de la biotite utilisée comme charge pour améliorer l'adhésion et prévenir les fissures. La composition des peintures semble uniforme dans la grotte, ce qui suggère l'intervention d'un même groupe pour les œuvres peintes et gravées. Au total, la grotte a fourni 225 objets décorés, dont 16 pièces colorées et 57 décors réalistes, ainsi que 371 outils sur galets incluant 39 meules et 44 broyeurs pour pigments, majoritairement issus des couches supérieures. Arlette Leroi-Gourhan a réalisé une analyse palynologique en 1967 et le matériel a fait l'objet d'une monographie collective publiée en 2004.
Les restes fauniques, principalement liés à l'alimentation, comprennent 29 taxons de mammifères et 21 de volatiles, constituant une référence du Tardiglaciaire würmien dans les Pyrénées. Les espèces montagnardes dominent, notamment le bouquetin des Pyrénées et l'isard parmi les mammifères, et le lagopède ou les grands rapaces parmi les oiseaux ; coexistent des espèces arctiques comme le renne ou le renard polaire et quelques espèces tempérées. Les os d'oiseaux, généralement d'individus adultes, portent de multiples stries et perforations liées au débitage et à la consommation, ainsi que des marques de brûlures aux extrémités évoquant une cuisson sur pierres chauffées. Le cerf est très peu représenté dans les restes consommés mais figure pour 11,54 % dans le bestiaire des objets décorés.
La "frise des lions", découverte entre 1940 et 1967, est gravée sur deux fragments d'un os de bovidé qui ne furent raccordés qu'en 1988 ; la fracture semble intentionnelle et les fragments montrent des traces de passage au feu. Les deux morceaux réunis portent au total trois lions disposés en série ; la juxtaposition des positions crée une impression de mouvement comparable à une succession d'images, technique qualifiée de "préhistoire du cinéma".
La grotte a été ouverte au public en 1979 en raison de l'importance de ses vestiges et a accueilli environ un millier de visiteurs en 2016. Propriété privée jusqu'en décembre 2016 et gérée jusque-là par René Gailli, elle a été transférée vers mai 2017 sous l'égide du conseil départemental et de la marque "Sites Touristiques Ariégeois" puis rouverte au public en juin 2017.