Origine et histoire de la Grotte de Saint-Marcel
La grotte de Saint-Marcel, cavité touristique située à l’entrée des gorges de l’Ardèche sur la commune de Bidon, est classée depuis 1934 pour ses formations et ses gisements préhistoriques ; elle appartient cependant à la commune voisine de Saint-Marcel-d'Ardèche suite à une donation de terrains en 1228 par Dame Vierne de Baladun. Découverte en 1838 par un chasseur d’Aiguèze qui suivait des traces de gibier, la grotte a rapidement suscité l’intérêt scientifique et touristique. Édouard-Alfred Martel lui consacre un chapitre dans Les Abîmes, publié en 1894, et Robert de Joly y mène des campagnes de fouilles dans les années 1930 et 1940. Des équipes spéléologiques belges et françaises ont poursuivi les explorations dans les années 1960, puis des plongeurs ont installé leurs travaux à partir des années 1980.
La cavité a connu des occupations humaines intermittentes entre 90 000 ans et 1 000 ans avant notre ère ; les niveaux moustériens ont notamment livré de nombreux outils lithiques. Selon les fouilles de René Gilles en 1971, aucun indice d’occupation n’a été mis en évidence pendant tout le Paléolithique supérieur. Des phases d’occupation du Néolithique ancien ont ensuite été documentées : des espaces ont servi de bergerie et d’entrepôt de céréales et des monuments mégalithiques (dolmen et menhir) sont présents à proximité. Après l’âge du Bronze, l’entrée de la cavité a été obstruée et l’occupation humaine semble avoir cessé.
Dès la découverte, la grotte fait l’objet de visites organisées ; au xixe siècle celles-ci sont encadrées par un arrêté municipal qui limite le nombre de visiteurs et impose des règles strictes pour prévenir les pillages. L’exploitation touristique reprend par intermittence au tournant du xxe siècle, interrompue par la Première et la Seconde Guerre mondiale, puis reprise en 1920. En 1934, le Syndicat d’Initiative de Saint-Marcel et de la Basse-Ardèche prend en charge l’exploitation à partir de 1935. Sous la proposition de Robert de Joly, l’armée perce ensuite un bouchon par explosion, ouvrant de nouvelles galeries avant d’abandonner le projet militaire.
Pour améliorer l’accès, la construction d’un ponton sur l’Ardèche et d’une route touristique vers les grottes est réalisée en 1962. Dans les années 1980, la municipalité conduit des travaux importants — mise en place d’un spectacle lumineux, fermeture du porche naturel, percement d’un tunnel d’accès de 122 mètres et sécurisation des zones à intérêt archéologique — et la grotte est rouverte au public le 27 mai 1989. Depuis 2012, le nom officiel est « grotte de Saint-Marcel ». Aujourd’hui elle accueille plus de 60 000 visiteurs entre avril et novembre et jouit d’une renommée internationale.
La cavité s’ouvre dans les calcaires du Crétacé et s’est formée per ascensum lors de la crise de salinité messinienne, à la fin du Miocène. Le développement du réseau connu a progressé au fil des décennies : 56 160 mètres en 2004, plus de 57 km en 2015 dont environ 18 km de galeries noyées et un dénivelé d’environ 325 mètres (-150 m / +175 m). Des jonctions successives, notamment avec l’aven de Noël via le Réseau V, et les travaux de clubs et associations comme l’ARSPAN et le club AVENS ont permis d’étendre le réseau ; les explorations menées jusqu’en 2020 portent le développement au‑delà de 64 km et ont conduit, en juin 2020, à la découverte d’une nouvelle salle dite « salle du Déconfinement ». De nombreuses galeries et cavités reliées par des séries de puits constituent l’ensemble du réseau.
La grotte abrite plusieurs gisements préhistoriques qui ont livré plusieurs milliers d’outils moustériens et contient, dans la cavité dite de la Tête du Lion (fermée au public), une peinture rupestre découverte en 1963 représentant un bovidé à l’ocre rouge, accompagnée de ponctuations et de deux têtes de cervidés ; cette peinture, vieille d’environ 20 000 ans, a été la première datée grâce aux charbons de bois issus des torches employées par l’artiste.
La partie aménagée pour le public représente un parcours d’environ 600 mètres et comporte 416 marches (832 au total). Les aménagements réalisés tiennent compte des contraintes environnementales liées à la réserve naturelle nationale des gorges de l’Ardèche. Classée au titre des monuments historiques et du patrimoine naturel en 1934, la grotte a également été inscrite en 1934 parmi les sites et monuments naturels de caractère historique, scientifique, légendaire ou pittoresque, et elle est placée depuis le 15 janvier 1943 en zone protégée au titre de site naturel inscrit. Enfin, quelques vignerons locaux ont engagé des expériences de vieillissement du vin en cave naturelle dans la grotte, proposant des dégustations comparatives aux visiteurs.
