Origine et histoire de la Grotte de Roucadou
La grotte de Roucadour, dite aussi Roucadou, est une grotte ornée préhistorique située sur la commune de Thémines, dans le Lot. Propriété de l'État, elle est inscrite au titre des monuments historiques le 28 août 1964 et n'est pas ouverte au public. La commune de Thémines se trouve sur le causse de Gramat, à environ 40 km au nord‑est de Cahors et 20 km au nord‑ouest de Figeac ; la grotte est située à près de 2 km au sud‑ouest du bourg, près de la route RD 40 vers Flaujac‑Gare et Espédaillac. Édouard‑Alfred Martel a décrit la cavité comme une ancienne « goule » ayant absorbé un courant superficiel à la fin du Tertiaire et au début du Quaternaire. La galerie principale est vaste, mesurant 15 à 20 m de largeur pour jusqu'à 15 m de hauteur, et s'étend sur environ 280 m ; elle comprend plusieurs salles dont la « salle des peintures ». Une petite galerie adjacente, découverte après le dégagement d'une chatière, mesure environ trente mètres de long et 5 à 7 m de large. Un effondrement survenu à la fin du Paléolithique supérieur a obstrué la salle où se trouvent les peintures. La grotte est précédée d'une doline.
Connue depuis la fin du XIXe siècle, la grotte a été explorée par Martel en 1890 puis lors d'une campagne en 1925 avec André Niederlender. La doline a été fouillée entre 1951 et 1957, avec publication des résultats en 1967. En 1962, les spéléologues Pierre Taurisson et Jean‑Paul Coussy ont découvert dans la galerie secondaire des peintures et des gravures pariétales. Le groupe spéléologique de Saint‑Céré a mis au jour une grande quantité de céramiques dans la cavité principale, résultats publiés en 1964. L'abbé André Glory fut chargé de l'étude de la grotte, mais il disparut en 1966 dans un accident de voiture avec son collaborateur l'abbé Jean‑Louis Villeveygoux. L'État a acquis la grotte en 1992 ; Michel Lorblanchet, directeur honoraire de recherche au CNRS, a été chargé d'une étude exhaustive et a constitué en 2002 une équipe internationale pluridisciplinaire. Lorblanchet a découvert une sépulture au nord de la grotte. Jean Gascó a étudié la continuité des occupations du site sur près de dix mille ans, soulignant une évolution d'une halte de chasse vers un habitat permanent au Mésolithique puis au Néolithique.
Selon André Glory, les peintures de la « salle des peintures » témoignent d'occupations au Paléolithique supérieur, notamment aux phases Aurignacien II‑III et peut‑être Gravettien, c'est‑à‑dire antérieures à l'effondrement. L'absence de recherches profondes empêche toutefois de préciser si la grotte a alors été utilisée comme lieu rituel ou comme habitat. Après l'effondrement, d'autres groupes se sont installés : des foyers ont été retrouvés dans la « salle de la Grande colonne », occupée jusqu'à l'époque gallo‑romaine. Un point d'eau bien protégé dans la doline a peut‑être favorisé son occupation. Le matériel issu de la doline est proche du Bronze final Ib et IIa, et une épée de type Erbenheim y a été découverte.
Le mobilier archéologique comprend notamment de la céramique et une sépulture. Les décors pariétaux sont nombreux : 495 figures sont connues à ce jour, dont 139 représentations animales — notamment 43 chevaux, 22 félins, 16 mégacéros, 11 bisons, 9 mammouths et quelques autres espèces comme un oiseau et un ours — et 213 signes géométriques, parmi lesquels 44 cercles échancrés caractéristiques de Roucadour et une série de mains négatives rouges et noires. La grotte a donné son nom au « Roucadourien », un faciès de transition entre le Mésolithique et le Néolithique, notamment dans la couche C qui a été datée au radiocarbone à 3 980 +307/−296 avant correction, corrigée à environ 4 200 av. J.‑C. pour tenir compte de l’effet Suess ; cette datation reste à confirmer. La couche inférieure est typique du Néolithique ancien continental du Sud‑Ouest, mais la notion de Roucadourien est discutée et seuls quelques sites du rebord méridional du Massif central témoignent de contacts entre chasseurs‑cueilleurs mésolithiques et agriculteurs néolithiques.