Origine et histoire de la Grotte Cosquer
La grotte Cosquer est une cavité ornée paléolithique située dans la calanque de la Triperie, à Marseille, au pied de la pointe de la Voile, près du cap Morgiou. Les datations au radiocarbone situent ses fréquentations entre 33 000 et 18 500 ans avant le présent, et les figurations pariétales recensées dépassent 517 motifs correspondant à deux phases principales d’occupation. La première phase, attribuée au Gravettien et datée d’environ 27 000 ans, comprend notamment 65 mains négatives (44 noires et 21 rouges) réalisées par pochoir, ainsi que des tracés digitaux. La seconde phase, datée d’environ 19 000 ans et rattachée au Solutréen ou à l’Épigravettien, livre des signes, des peintures et des gravures figuratives : 177 animaux ont été recensés — principalement des chevaux (63), puis des bouquetins (28), des cervidés (17), des bisons (10) et des aurochs (7) — ainsi que 16 animaux marins (dont 9 phoques et 3 grands pingouins) et 216 signes dont huit représentations sexuées. Une gravure a été interprétée comme un thème de « l’homme blessé » ; les motivations des auteurs restent inconnues et l’exploitation de la calcite des concrétions par les hommes préhistoriques n’a pas de sens encore déterminé.
La grotte Cosquer est unique par son accès principal : l’entrée pénétrable par l’homme est un siphon sous‑marin situé à 37 mètres sous le niveau de la mer. Lors des dernières glaciations, le niveau de la Méditerranée se situait 110 à 120 mètres plus bas et la côte à plus de huit kilomètres, ce qui a permis l’accès par une galerie remontante devenue aujourd’hui inondée. La cavité a été repérée par Henri Cosquer, plongeur professionnel, qui a signalé l’existence de l’entrée noyée en 1991, bien que la présence de la cavité ait été évoquée dans des publications antérieures. Les explorations successives menées en 1985, 1990 et 1991 ont permis la découverte et la photographie des peintures ; un accident mortel survenu le 1er septembre 1991 a ensuite conduit à la déclaration officielle de la grotte.
Une expertise conduite en septembre 1991 par des spécialistes du paléolithique a confirmé l’intérêt archéologique du site malgré des réserves exprimées par certains chercheurs. Des opérations de recherches programmées ont été menées entre 2001 et 2005 puis entre 2010 et 2015 sous la direction de Luc Vanrell, en coopération avec des services régionaux et des équipes de recherche. Un litige opposant Henri Cosquer au ministère de la Culture a porté sur les modalités d’indemnisation de l’inventeur prévues par la loi sur l’archéologie préventive de 2001.
Protégée au titre des monuments historiques depuis le 2 septembre 1992, la grotte Cosquer fait partie d’un ensemble comprenant aussi la grotte de la Triperie, la grotte du Figuier et la grotte du Renard. L’entrée sous‑marine a été obstruée par des blocs de béton puis, en 2015, remplacée par une grille en acier inoxydable afin de préserver la cavité et d’éviter de nouveaux accidents ; un arrêté préfectoral de 2013 interdit les plongées et le mouillage dans un rayon de 500 mètres autour de la pointe de la Voile.
Géologiquement, la grotte a été creusée dans les calcaires urgoniens et s’inscrit dans le karst littoral des Calanques, probablement comme une ancienne exsurgence façonnée par un cours d’eau souterrain quand le niveau marin était beaucoup plus bas. Aujourd’hui, la cavité n’est accessible que par une galerie étroite de 175 mètres menant à l’entrée à −37 mètres ; elle comprend plusieurs secteurs nommés — Salle Nord, Grande Salle, « Plage », Arche, Chaos, Salle du Félin, Petit Puits noyé, Salle Basse, Grand Puits noyé et galerie d’accès — et présente des parties émergées formant une cloche d’air en léger surgonflement d’environ 1,2 m de colonne d’eau par rapport à la pression atmosphérique extérieure. Le niveau d’eau interne varie au cours de l’année et plusieurs peintures se situent désormais sous le niveau actuel de la mer.
Un relevé tridimensionnel multicouche de très haute précision a permis de réaliser une réplique partielle fidèle de certains panneaux ornés. Ce fac‑similé, installé à l’entrée du Vieux‑Port de Marseille sur l’esplanade J4 dans la Villa Méditerranée à côté du Mucem, est ouvert au public depuis juin 2022 et géré par la structure responsable de la réplique de la grotte Chauvet. L’exposition contribue à la connaissance et à la préservation de la mémoire de la grotte, et a accueilli 809 196 visiteurs la première année, au‑delà des prévisions.