Origine et histoire
L'Habitation Bisdary est une ancienne plantation coloniale située à Gourbeyre, sur Basse-Terre en Guadeloupe. Le site occupe une terrasse allongée au sommet d'un morne dont les versants escarpés sont consolidés par des murs de soutènement. Cinq bâtiments subsistent aujourd'hui sur cette terrasse, ainsi que des vestiges en contrebas, dont une bonifierie alimentée par un canal captant l'eau de la ravine. Développée par les Jésuites au XVIIIe siècle, l'exploitation est devenue une usine sucrière au début du XIXe siècle. La propriété dépendait auparavant du domaine de Charles Houël, qui la possédait de 1648 à 1664, puis elle fut acquise par la Compagnie des Jésuites en 1704. Étendue sur 250 hectares, elle comptait 80 esclaves en 1717 et 312 en 1763. Les Jésuites y construisirent deux manufactures alimentées par le canal des frères de la Charité. Au milieu du XVIIIe siècle, lors d'une attaque anglaise, des bâtiments furent incendiés et les religieux s'endettèrent pour les réparations. En 1763, peu avant leur expulsion de l'île, les Jésuites vendirent l'exploitation au négociant Thomas Lepreux pour 550 000 livres; la vente fit l'objet d'un long litige entre créanciers, colonie et héritiers Lepreux. Pendant la Révolution, la propriété fut séquestrée par le Ministère de la Marine en 1793 et les héritiers Lepreux en reprirent finalement possession en 1823. Les cyclones de 1816 et 1825 endommagèrent fortement bâtiments et cultures; en 1829 Jean-Baptiste Navailles acquit la propriété et la fit restaurer, permettant un retour en production vers 1840, avant un déclin à partir de 1850. La maison principale, vraisemblablement située à l'extrémité ouest de la terrasse, est un rez-de-chaussée avec comble habitable entouré d'une galerie, auquel s'ajoute une aile annexe des années 1970 et d'autres corps de logis en maçonnerie attribués au XIXe siècle. Au nord du morne se trouvaient les bâtiments industriels et le village des esclaves. Parmi les éléments conservés figurent la maison du maître et son annexe, la maison du régisseur, une case, la bonifierie et un four; une pierre sculptée portant les armoiries des Jésuites, datée de 1753 ou 1755, est conservée dans une parcelle privée. Depuis 2007, le chemin d'accès, les terrasses, les murs de soutènement et les vestiges de l'aqueduc sont protégés au titre des monuments historiques. En 2018, l'habitation Bisdary a été retenue parmi les projets emblématiques pour un financement par le premier Loto du patrimoine. Le cimetière dit "des Jésuites", situé sur un sentier entre la rivière Sens et le Houëlmont, rassemble une dizaine de tombes en pierre autour d'une croix; les tombeaux ont été vandalisés et les plaques funéraires enlevées, rendant les sépultures anonymes. Malgré son nom, il abrite les sépultures des familles Navailles et/ou Bonin, propriétaires de la plantation à partir de 1874, et appartient aujourd'hui au Conservatoire du littoral.