Origine et histoire
L’habitation Mont‑Carmel est une ancienne plantation coloniale située à Saint‑Claude, sur l’île de Basse‑Terre, en Guadeloupe. Fondée au XVIIe siècle par les moines de l’ordre du Carmel peu après leur installation en 1651, elle figure parmi les plus anciennes exploitations de l’archipel. Le gouverneur Charles Houël leur remit 100 arpents de terre et six esclaves, et les religieux y établirent une sucrerie équipée d’un moulin hydraulique ainsi que des logements pour la main‑d’œuvre servile. En 1671, l’effectif y comprenait quatre Blancs et vingt‑huit esclaves. La maison de maître, construite en moellons avec des encadrements en pierre de taille, porte la date de 1726. Les bâtiments de la sucrerie sont aujourd’hui en ruine, tandis que l’aqueduc daté de 1765 est en bon état. En 1772, les Carmes quittent l’habitation et louent les 48 hectares ainsi que 57 esclaves au négociant Louis Botrel; la congrégation se réinstalle au Dos d’Âne et rachète les esclaves de cette propriété. Le domaine loué était en mauvais état ; les Carmes prêtèrent dix esclaves à Botrel pour les réparations, et celui‑ci acheta auprès de négriers quarante‑sept autres esclaves, majoritairement des femmes ibos mais aussi des Bambara et des Arada, ce qui permit une forte augmentation de la production sucrière après les travaux. En 1783, les religieux vendent l’habitation à François Vaultier de Moyencourt pour 281 737 livres. La Révolution française entraîne l’affranchissement des esclaves par la Convention montagnarde en 1794, puis le rétablissement progressif de l’esclavage sous Napoléon en 1802 conduit à une reconstitution de la main‑d’œuvre qui atteint de nouveau 57 esclaves en 1822. En 1806, Éloi Vaultier de Moyencourt vend sa moitié à Charles Dain, qui devient copropriétaire avec Rouvre de Moyencourt ; en 1809 Dain devient propriétaire unique et développe l’exploitation, faisant passer le nombre d’esclaves de 17 en 1806 à 20 en 1809 puis 57 en 1822. Quelques cases sont reconstruites, mais la plupart des travailleurs vivent dans des appentis précaires. Charles Dain transmet ensuite la propriété à ses fils ; la famille Dain la conserve en partie jusqu’au XIXe siècle, et Charles Dain (III) se distingue par son engagement politique contre l’esclavage, aboli définitivement en 1848. Incapable de racheter les parts de ses héritiers, Charles vend l’exploitation en 1849 à ses enfants ; des difficultés financières conduisent à des saisies et à de multiples ventes aux enchères entre 1873 et 1887, puis à des transmissions familiales jusqu’au début du XXe siècle. En 1920, la propriété revient à la famille Dain par l’achat d’Armand Dain, qui transforme la distillerie en caféière et fait construire une bonifierie détruite par le cyclone de 1964; en 1952 son fils Antonio remplace ensuite les caféiers par des bananiers. La maison de maître, l’allée plantée et les vestiges de l’aqueduc ont été inscrits aux monuments historiques en 1987.