Origine et histoire de l'Hôtel Particulier
L'hôtel de Chanaleilles est un hôtel particulier situé dans le 7e arrondissement de Paris, au n°2 de la rue de Chanaleilles, à l'angle de la rue Vaneau. Au XVIIIe siècle, son entrée se trouvait au n°186 de la rue de Babylone et ses jardins s'étendaient jusqu'au boulevard des Invalides. Cette ancienne folie, construite vers 1770 par un marquis de Barbançon (probablement Auguste Jean‑Louis Antoine du Prat de Barbençon, 1714‑1777), aurait accueilli les amours du duc du Maine. Le bâtiment, de plain‑pied et allongé, a été modifié dans les dernières années du règne de Louis XVI, puis ses aménagements intérieurs ont été profondément remaniés par la suite. Vendu comme bien national pendant la Révolution, il fut ensuite mis en loterie et gagné par une vieille demoiselle de province. La propriété passa entre plusieurs mains ; Paul Barras en fit partie, et Gabriel Julien Ouvrard en fit l'acquisition en 1799 pour l'offrir à Mme Tallien, qui y recevait jusqu'à 80 personnes. En 1840, l'hôtel devint la propriété du marquis de Chanaleilles, nom qu'il conserva par la suite, et Sosthène de Chanaleilles y vivait avec ses parents lors de son baptême en 1844. L'armateur Stavros Niarchos acquit l'hôtel en 1956, le fit restaurer et fit édifier une aile moderne sur les jardins dans les années 1960.
Conçu initialement pour les réceptions, l'hôtel se pénétrait en façade ; l'accès s'effectue aujourd'hui par le côté, par une petite pièce en demi‑rotonde servant de vestibule. Le sol de cette pièce a été décoré par Emilio Terry d'une rosace en marqueterie de marbres polychromes, et le cabinet des antiques, décoré par le même auteur, présente des colonnes d'ébène aux chapiteaux de bronze, un soubassement en acajou et une corniche assortie. L'aile gauche, ajoutée ultérieurement, fut détruite puis reconstruite légèrement plus haute pour permettre la pose des boiseries de Stavros Niarchos. L'ensemble repose sur un soubassement qui fut muré lors de l'exhaussement du quartier après les inondations de 1907, et comprenait à l'origine un salon blanc aux lambris d'époque Directoire, une grande chambre ornée de bas‑reliefs et un péristyle à colonnades devenu la grande galerie jaune.
Le salon blanc conserve une cheminée de marbre blanc et des lambris restaurés en 1956 ; ses fenêtres ouvrent sur un parterre qui a remplacé l'ancienne cour anglaise. La grande chambre présente un lit d'ébène surmonté d'un vaste ciel de lit en forme de tente, des bas‑reliefs et des rideaux en satin blanc et cramoisi, tandis que la grande galerie, refermée par six portes‑fenêtres donnant sur le jardin, est revêtue d'un parquet en marqueterie d'acajou, palissandre, sycomore et amarante. L'enfilade des salons s'organise autour du bureau, d'un boudoir blanc, d'un grand salon rouge doté de colonnes corinthiennes et d'un plafond doré, et se termine par un salon d'exposition où furent présentées les pièces de la collection Puiforcat, donnée en totalité au musée du Louvre avec l'usufruit de quelques pièces. L'aile droite comprenait deux salles à manger — dont une pour les enfants — et des lambris et parquets en marqueterie désormais classés aux monuments historiques, tandis que l'aile gauche abritait un boudoir aux boiseries blanches provenant d'un cabinet du Palais Paar de Vienne et le grand salon dit des laques, où se trouve une importante boiserie Régence en laque de Chine haute de 4,85 m. À l'étage étaient aménagées les chambres des enfants.
La cour d'entrée et le jardin à la française ont été recréés à leur niveau d'origine, le jardin se trouvant en contrebas de la rue d'environ un mètre quatre‑vingt, et leurs murs sont ornés de treillis peints en vert. Le sous‑sol, rendu à la lumière par la suppression de la cour anglaise, abrite les services et une salle de bains circulaire aménagée après 1799 pour Mme Tallien, l'une des plus anciennes de Paris, avec une baignoire‑piscine en marbre noir placée dans une alcôve à fond de miroir, une plinthe en stuc décorée de carpes dorées, un plafond peint en écailles et un sol orné d'une large rosace de marbre clair. Les façades et les toitures, à l'exception de l'aile moderne sur les jardins, ainsi que les boiseries anciennes et les stucs de la galerie, les parquets en bois des îles et le jardin ont été inscrits à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques par arrêté du 17 août 1945.