Origine et histoire de l'Hôtel Particulier
L'hôtel de Donon est un hôtel particulier situé aux nos 8 rue Elzévir et 9 rue Payenne, dans le 3e arrondissement de Paris, en Île-de-France ; il est desservi par la station de métro Saint-Paul. Construit à partir de 1575 pour Médéric de Donon, seigneur de Châtres-en-Brie et de Loribeau, conseiller du roi et contrôleur général de ses bâtiments, il occupe des terrains au nord de l'enceinte de Philippe-Auguste, inclus dans l'enceinte de Charles V depuis le XIVe siècle. Les parcelles étaient issues du lotissement entrepris dès 1545 par les religieux de Sainte-Catherine-des-Écoliers, le chemin devenu successivement rue de Diane, rue des Trois Pavillons puis rue Elzévir. L'architecte reste inconnu ; Médéric de Donon a pu en être partiellement l'auteur et l'édifice présente des affinités avec la maison que fit bâtir Philibert Delorme dans le Marais ; Jean Bullant, proche de Donon et collaborateur de Delorme, est également cité comme possible maître d'œuvre. Médéric de Donon, proche partisan du roi Henri III, fut emprisonné en 1588 par la Ligue et libéré en juillet 1593 ; il mourut dans l'hôtel en 1594. Transmis à son fils Jean, puis à un neveu qui s'en sépara en 1636, l'hôtel fut acheté en 1640 par le financier Jean-Louis Le Mairat ; ses descendants en furent propriétaires jusqu'en 1798, date à laquelle il passa à la famille Hénault de Tourneville à la suite du mariage de Françoise Le Mairat avec Étienne Hénault de Tourneville en 1776, puis, par alliance, à la famille Bourgeois. À partir de 1839, l'hôtel fut transformé en immeuble de rapport et à usage commercial, avec des remaniements importants : galeries vitrées en saillie au rez-de-chaussée côté cour, encorbellements aux angles du premier étage et, dans les années 1930, l'installation d'un vaste garage couvrant le jardin. Acquis par la ville de Paris en 1974 auprès des descendants Bourgeois, l'édifice, alors en mauvais état, fut choisi à partir de 1981 pour accueillir les collections du couple Cognacq-Jay, jusque-là conservées au 25 boulevard des Capucines ; la restauration visant à retrouver l'état originel commença en 1988, les collections y furent installées en 1990 et le musée ouvrit au public la même année. L'hôtel est protégé au titre des monuments historiques : inscrit par arrêté du 6 août 1975 puis classé par arrêté du 28 décembre 1984. Architectoniquement, le dessin général, avec de hautes toitures, rappelle les réalisations de la fin du XVIe siècle dans le Marais et évoque, par son unité et son goût, la vie raffinée du Siècle des Lumières ; le grand comble, lieu d'expositions, évoque la coque renversée d'un navire. Le plan est régulier : les bâtiments entourent une cour rectangulaire, le corps de logis principal s'établissant entre cour et jardin et relié au bâtiment sur rue par deux ailes, la branche sud ayant probablement abrité remises et écuries et la branche nord une galerie. Deux petits pavillons latéraux s'avancent côté cour et côté jardin. La structure caractéristique des hôtels du Marais de l'époque comprend deux niveaux de caves, dont un demi-sous-sol pour les cuisines et la salle du commun, surmontés de deux étages de même hauteur, le rez-de-chaussée haut pour les appartements de réception et l'étage carré coiffé d'un haut comble. L'élégance tient au rythme des ouvertures — demi-croisée, croisée, croisée, demi-croisée — et à des effets de composition : côté cour, deux lucarnes réunies sous un même fronton créent un effet pyramidal, tandis que côté jardin seules les croisées pleines sont surmontées de lucarnes. L'ornementation reste sobre : consoles non sculptées, simples moulures aux lucarnes et aux rampants de frontons. Les pavillons paraissent relever d'un ajout ou d'une surélévation, et les transformations des XVIIe et XVIIIe siècles rendent incertaine la localisation de l'entrée principale d'origine ; une porte au rez-de-chaussée du pavillon nord a probablement donné accès à l'escalier desservant l'appartement, les communs et le jardin. L'escalier actuel, de type "à vue" avec rampe en fer forgé, date de la fin du XVIIe siècle selon ses caractéristiques et des comparaisons avec d'autres escaliers du Marais ; sa modification entraîna des transformations symétriques des pavillons et la probable surélévation des ailes, attestée par des traces d'ancienne couverture sur l'aile nord retrouvées lors de la restauration. Les fenêtres des galeries latérales sont dépourvues de meneaux, contrairement à celles du grand corps de logis, et la façade sur rue, avec son portail surmonté d'un fronton orné d'une coquille, relève d'une campagne de travaux plus tardive, vraisemblablement de la fin du XVIIe siècle ; vers 1710, un accès direct au jardin depuis l'appartement de réception aurait été aménagé par l'ouverture d'une porte-fenêtre donnant sur un perron, comme l'indique le plan de Paris de Jaillot (1774). Quelques décors intérieurs subsistent : des plafonds à poutres et solives peintes en imitation de marqueterie, ornés de rosaces de feuillages, se conservent dans la chambre basse (salle IV) et dans le pavillon nord donnant sur le jardin (salle II), tandis que des boiseries blanches et or datent de transformations du début du XVIIe siècle et ornent ce même pavillon ainsi que la grande salle du rez-de-chaussée (salle III).