Origine et histoire de l'Hôtel des archives départementales
L'hôtel des archives départementales de la Gironde a été envisagé dès 1857; le Conseil général charge Pierre‑Auguste Labbé du projet en 1858. Labbé construisit le bâtiment de 1861 à 1865, s'inspirant des hôtels particuliers français des XVIIe et XVIIIe siècles et de la bibliothèque Sainte‑Geneviève de Labrouste. L'un des premiers édifices d'archives en France, il prenait modèle sur les archives de la Cour des Comptes de Paris et figura parmi les premiers bâtiments réservés à cet usage à employer le fer dans sa construction. Conçu pour accueillir dépôts, vaste salle de lecture, bibliothèque historique et hall d'apparat, il se distingue par l'optimisation rationnelle des espaces et par des mesures de protection contre l'incendie. De style néo‑classique, l'édifice en pierre présente deux niveaux en façade et trois en élévation, avec un corps central abritant les services et le logement du conservateur et deux ailes en retour dédiées aux dépôts, séparées par une cour fermée par un portail. Sa charpente métallique se compose de fines poutrelles articulées; chaque aile repose sur la maçonnerie des quatre murs porteurs renforcés par des contreforts intérieurs, ce qui permet de supprimer les piliers et d'optimiser l'espace de stockage. De puissantes voûtes d'arêtes soutiennent la salle de lecture et le niveau supérieur de stockage, tandis que quatre tourelles intérieures renferment des escaliers à vis en pierre. L'aménagement intérieur a été complété ultérieurement par l'adjonction d'ascenseurs, d'escaliers modernes et de rayonnages métalliques sur plusieurs niveaux; le garde‑corps de fer du niveau supérieur est le seul élément d'origine remployé. Le bâtiment est isolé pour limiter les risques d'incendie : emplacement entouré de trois rues et d'un passage arrière fermé, dépôts circonscrits dans les ailes et séparés du corps central par des portes en fonte, planchers sans bois et couverture en charpente métallique. Labbé avait proposé des rayonnages en fer, proposition non réalisée qui laissa place au bois à l'origine. Cet ensemble demeure aujourd'hui le seul bâtiment d'archives départementales du XIXe siècle encore en service. Propriété du Conseil départemental de la Gironde et situé à Bordeaux, l'édifice est inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques depuis 1998.
À la fin du XVIIIe siècle, le fonds d'archives départementales, constitué principalement des documents de la préfecture et de l'administration départementale, s'enrichit et cesse d'être réuni en un lieu unique. Après plusieurs déménagements, il se fixe en 1819 sur la place du marché des Chartrons, un local insuffisant, vétuste et exposé aux risques liés à la présence d'un dépôt d'alcool à proximité. Des travaux furent proposés en 1841, puis le conseil général, à la suite d'une proposition du ministère de l'instruction publique, envisagea la construction d'un nouveau bâtiment en 1857; le projet fut déclaré d'utilité publique par décret impérial le 22 décembre 1860.
Architecte départemental, Pierre‑Auguste Labbé, déjà connu pour la chapelle du Grand séminaire et l'hôtel des Sourdes‑Muettes, vit ses plans validés en 1860 après une enquête menée du 6 au 26 août; la première pierre fut posée le 11 mai 1862 au 13‑25 rue d'Aviau, sur l'emplacement de l'ancien manège communal. Le terrain, exproprié à M. Minvielle et M. Machemin, mesurait 49 mètres de long sur 59 mètres de large; l'emplacement semble avoir été retenu pour des raisons économiques, alors qu'une meilleure visibilité aurait été possible à l'angle de la rue d'Aviau et du cours de Verdun.
Labbé conçut une façade symétrique de 17 mètres de haut, expressive de la dignité des lieux : assise en pierre de taille au premier niveau avec fausses ouvertures en plein cintre, porte d'entrée en arc plein cintre, pilastres corinthiens unissant le deuxième et le troisième niveau, fenêtres à frontons au second et plus simples au troisième, reprenant le vocabulaire classique du XVIIIe siècle présent dans la rue d'Aviau. Le hall d'entrée, orné de colonnes doriques, donne sur un grand escalier de pierre menant à la salle de lecture, et le plan en U du bâtiment articule un corps central et deux ailes autour d'une cour carrée close par une grille donnant sur la rue. Les ailes, destinées aux magasins, présentent au rez‑de‑chaussée une grande salle voûtée en pierre et, au premier étage, une salle éclairée par de larges fenêtres correspondant à la hauteur du premier et du second étage du corps central; un balcon facilite les recherches entre ces niveaux. Les inquiétudes concernant l'humidité locale conduisirent la commission à proposer un plancher au rez‑de‑chaussée plutôt qu'un pavage, mais l'architecte répondit en ouvrant de larges fenêtres pour assurer la ventilation des salles. Le corps central abrite au rez‑de‑chaussée un vaste vestibule avec logement du concierge, une bibliothèque et une salle de dépôt pour les nouveaux documents; l'escalier d'apparat conduit à la grande salle de lecture, au cabinet de l'archiviste et à deux salles de dépouillement et de classement, tandis que le second étage est occupé par le logement de l'archiviste.
À l'ouverture en 1866, les magasins pouvaient contenir l'ensemble des collections et permettre un agrandissement; l'accroissement des documents entraîna cependant une saturation des espaces dès la fin de la Seconde Guerre mondiale. En 1952, l'aménagement intérieur fut adapté par l'achat de rayonnages métalliques plus modernes et la création de nouveaux locaux, dont une pièce destinée à un atelier de microfilmage. L'hôtel des archives départementales a fermé au public en 2010 lors de l'ouverture en 2011 du nouveau bâtiment des Archives départementales de la Gironde, cours Balguerie‑Stuttenberg; il reste toutefois visitable lors des Journées du patrimoine.