Origine et histoire de l'Hôtel des Menus Plaisirs
L’hôtel des Menus-Plaisirs, situé 22 avenue de Paris à Versailles (Yvelines), est célèbre pour avoir accueilli les assemblées des notables de 1787 et 1788, puis les États généraux de 1789. L’ensemble, à l’exception de ses façades, est inscrit au titre des monuments historiques depuis le 21 mai 1927 ; les façades sont classées depuis le 16 septembre 1929.
Élevé par Louis XV vers 1745, l’hôtel abritait les ateliers et le matériel des réjouissances royales appelées « Menus-Plaisirs » : accessoires sportifs, notamment pour le jeu de paume, décors de théâtre, instruments de musique, ainsi que des ateliers de maquettes, de costumes, de peinture et de sculpture. En 1759, un cabinet de physique y fut installé par l’abbé Nollet pour l’instruction des enfants de France, dont le futur Louis XVI. L’ensemble s’organisait autour de deux cours à niveaux différents : la cour basse donnant sur le n°22 avenue de Paris et la cour haute donnant sur le n°19 rue des États Généraux.
Une salle provisoire installée dans la cour haute accueillit les assemblées des notables de 1787 et 1788. Pierre-Adrien Pâris, architecte du roi, la transforma ensuite en une vaste salle « démontable » et richement décorée pour recevoir les 1 200 députés convoqués aux États généraux ; la séance inaugurale s’ouvrit le 5 mai 1789 en présence du roi. La salle occupait alors toute la surface de la cour haute ; le roi était placé sous un baldaquin devant l’escalier couvert qui relie aujourd’hui les deux cours. Les trois ordres siégeaient séparément dans des gradins en fer à cheval, tandis que de hautes tribunes accueillaient le public.
Conçue d’abord avec une acoustique défectueuse, la salle fut réaménagée dans les mois suivants pour améliorer l’écoute des orateurs et la conduite des débats. Les bâtiments hébergeaient également bureaux et salles de réunion destinés aux travaux de l’assemblée. Le 23 juin 1789, lors d’un discours aux États généraux, Louis XVI fit lire le texte comminatoire suivant : « Article 3 : Le Roi casse et annule, comme anticonstitutionnelles, contraires aux lettres de convocation et opposées à l'intérêt de l’État, les restrictions des pouvoirs qui, en gênant la liberté des députés aux États généraux, les empêcherait d'adopter les formes de délibérations prises séparément par ordre ou en commun par le vœu distinct des trois ordres. » C’est dans cette salle que furent votées la nuit du 4 août 1789 l’abolition des privilèges et, le 26 août 1789, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
L’année suivante, les lieux servirent aux assemblées électorales pour la désignation des nouvelles administrations ; l’assemblée départementale de Seine-et-Oise y tint quelques séances. L’hôtel vit notamment l’élection de Maximilien Robespierre comme président du tribunal du district, et les juges du tribunal criminel s’y installèrent en 1792 en attendant la transformation de l’ancien bailliage. Par la suite, il servit de magasin de vivres pour l’armée, bien que des accessoires de théâtre y demeurassent, attirant l’attention de directeurs de salles parisiens. Transformé en caserne pour des volontaires de gendarmerie puis en centre de distribution de pain, il fut vendu à un sieur Dubusc en 1800 ; la vente fut annulée un an plus tard, mais l’acheteur avait déjà démoli une grande partie des locaux historiques, dont la célèbre salle des États généraux.
L’hôtel devint ensuite une caserne de cavalerie puis resta largement abandonné pendant plus d’un siècle, jusqu’à l’installation des services techniques de la ville en 1942. L’État entreprit des travaux de restauration à l’occasion du bicentenaire de la Révolution en 1989. Depuis 1996, une partie de l’hôtel abrite le Centre de musique baroque de Versailles. Dans la cour haute, qui sert aujourd’hui de récréation aux élèves du centre, subsistent les traces de la salle des États généraux : les pavés du sol indiquent le tracé de la salle, avec la tribune royale au fond, les tribunes de la noblesse et du clergé sur les côtés et la grande tribune du tiers-État en face. La composition du site se lit encore à travers sa façade sur l’avenue de Paris, la cour basse et la cour haute marquée par l’emplacement de la salle historique.