Origine et histoire de l'Hôtel des Roches Noires
L'ancien Hôtel des Roches Noires, construit en 1866 sur les plages de Trouville‑sur‑Mer avec son annexe dite Les Roches Normandes, est un bâtiment de style Second Empire. Dès son ouverture, il fut remarqué pour sa masse imposante, ses deux ailes parallèles, sa carcasse de briques enchâssée dans la pierre, ses colonnes de stuc, ses bas‑reliefs prononcés, son perron, ses balcons et ses nombreuses fenêtres donnant sur la mer (guide Létang, 1866). Considéré à l'époque comme l'un des plus pittoresques et originaux des grands palaces, il était également perçu comme moderne et confortable. Conçu par l'architecte Alphonse‑Nicolas Crépinet, l'hôtel comptait à l'origine 75 chambres ; leur nombre passa à 300 en 1913 et l'établissement fut éclairé à l'électricité dès 1904. Surnommé « le roi de la côte normande », il fut le deuxième grand palace élevé sur ce littoral et attira une clientèle internationale, notamment Russes et Américains. De la Belle Époque aux années folles, il devint un lieu de villégiature prisé de la haute société occidentale. Parmi ses habitués figurent Marcel Proust, qui le fréquenta de 1880 à 1915, et Claude Monet, qui en fit un tableau en 1870. Marguerite Duras en fit le décor de trois de ses films et acquit en 1963 l'appartement no 105, qu'elle occupa chaque été jusqu'à sa mort en 1996. L'actrice Emmanuelle Riva posséda pendant trente ans un appartement au dernier étage. L'hôtel fut mis en vente aux enchères le 3 août 1903. En 1924, l'architecte Robert Mallet‑Stevens transforma partiellement l'établissement, repensant notamment le grand hall d'entrée, la véranda et le garage et faisant de l'ensemble une vitrine de l'art déco français. Le grand hall, aux lignes sobres et aux larges baies donnant sur la mer, a conservé son enduit d'origine et reste l'unique intérieur créé par Mallet‑Stevens resté intact. Le bar américain conçu au rez‑de‑jardin a disparu après 1945. Réquisitionné en 1939 comme hôpital complémentaire par les forces armées françaises, l'hôtel fut ensuite occupé par l'armée allemande pendant la Seconde Guerre mondiale. Il cessa son activité en 1949 et fut distribué en appartements en 1950, puis mis en vente comme appartements privés. L'édifice a été inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques le 11 août 2000 et son hall d'entrée a été classé au titre des monuments historiques le 29 mai 2001. Charles Gir est l'auteur des trois frises ornementales du hall. D'autres créations artistiques et culturelles se réfèrent au lieu : Françoise Cadol s'en est inspirée pour une comédie musicale jouée au festival d'Avignon, et Gustave Flaubert a vécu sur cette plage en 1836 une passion relatée dans ses écrits. L'ensemble demeure un symbole de la station balnéaire de Trouville‑sur‑Mer.