Origine et histoire de l'Hôtel Particulier
L'hôtel Le Peletier de Saint-Fargeau est un hôtel particulier du 3e arrondissement de Paris, situé au n°29 de la rue Madame-de-Sévigné ; il abrite aujourd'hui une partie des collections du musée Carnavalet. La parcelle appartenait au Moyen Âge à la Coûture Sainte-Catherine ; en 1545 Michel de Champrond y fit édifier le premier hôtel, qui passa ensuite entre plusieurs mains avant d'être vendu en 1626 à Geofroy Lhuillier, sieur d'Orgeval. Le 19 juillet 1686, les héritiers d'Orgeval vendirent la maison à Michel Le Peletier de Souzy, qui fit démolir l'ancien bâtiment pour en construire un nouveau, probablement en réemployant partiellement les fondations, et acquit des parcelles contiguës pour agrandir le jardin et les bâtiments de service. L'architecte Pierre Bullet conçut le nouvel hôtel : un corps de logis entre cour et jardin, prolongé par deux ailes en retour sur cour ; la façade sur cour compte quatre travées de disposition irrégulière, la façade sur jardin vingt travées dont un avant-corps central de deux travées surmonté d'un fronton triangulaire orné d'un relief représentant le Temps. Sur la cour d'honneur, le corps de logis et les ailes comportent deux étages carrés ; les baies du rez-de-chaussée des ailes sont tantôt « à la Lescot » sous arcades en plein cintre, tantôt en plein cintre, celles du premier étage sont rectangulaires et celles du deuxième en segment d'arc ; sur le jardin les baies sont rectangulaires au rez-de-chaussée et au premier étage, et cintrées au second. À droite du corps de logis sur jardin, Bullet érigea une orangerie en rez-de-chaussée de treize travées, couverte d'un comble brisé, dont les baies à la Lescot et le fronton central décoré d'un relief figurant la Vérité répondent au décor du corps de logis. Le jardin comprenait des parterres de broderie, un bassin et, en fond de parcelle, un treillage en façon d'arc de triomphe que Martin Lister décrit lors de son voyage en 1698. Le portail sur la rue Madame-de-Sévigné, orné de bossages et d'une guirlande de feuilles de chêne, est surmonté d'un fronton triangulaire portant un cartouche au chiffre de Michel Le Peletier ; l'imposte en bois sculpté de la porte porte également un médaillon au chiffre du propriétaire. À l'intérieur, subsistent deux témoignages du premier occupant : l'escalier d'honneur dans l'aile gauche de la cour d'honneur, dont la rampe en fonte est sans doute la plus ancienne de Paris, et au premier étage un petit cabinet dit « cabinet doré » dont les glaces et les lambris blanc et or datent de la fin du règne de Louis XIV. Après la mort de Souzy en 1725, l'hôtel passa à son fils Michel Robert Le Peletier des Forts (1675-1740), puis à son petit-fils Michel Étienne Le Peletier de Saint-Fargeau (1736-1778) et enfin à Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau (1760-1793) ; l'engagement révolutionnaire et l'assassinat de ce dernier contribuèrent à la conservation du patrimoine familial pendant la Terreur, et sa fille Suzanne Louise Le Peletier de Saint-Fargeau ne vendit l'hôtel qu'en 1811. La ville de Paris acquit l'hôtel en 1895 ; la Bibliothèque historique de la ville de Paris y fut installée en 1896-1897 après des travaux menés par l'architecte Ulysse Gravigny et y demeura jusqu'à son transfert à l'hôtel de Lamoignon en 1968. L'édifice resta ensuite vide jusqu'à une restauration et une restructuration confiées à Bernard Fonquernie pour la restauration et à Boris Stuparu pour l'aménagement technique et la création des volumes intérieurs, puis il accueillit en 1989 l'extension du musée Carnavalet : les collections révolutionnaires, du XIXe et du XXe siècle occupèrent le corps de logis et les ailes, tandis que l'orangerie reçut les collections archéologiques néolithiques, notamment les pirogues de Bercy, ainsi que les services de conservation. À l'issue des travaux du musée entre 2016 et 2021, l'hôtel Le Peletier présente ces collections dans un nouveau parcours, y compris des collections du XXIe siècle, et continue d'abriter les services de conservation. Plusieurs pièces célèbres du musée sont installées dans cet hôtel : la salle de bal de l'hôtel de Wendel décorée par José Maria Sert (1924-1925), le petit salon du Café de Paris décoré par Henri Sauvage (1899), la bijouterie Fouquet due à Alfons Mucha (1900), ainsi que la chambre de Marcel Proust et le portrait de Juliette Récamier par François Gérard (1805), considéré depuis le XIXe siècle comme l'une des principales œuvres du musée. Le rez-de-chaussée abrite les salles pédagogiques et le Centre d'études et de ressources, tandis que l'orangerie sert à l'accueil d'événements culturels, scientifiques et collaboratifs. L'orangerie est inscrite au titre des monuments historiques par arrêté du 17 mars 1925 et les façades et toitures de l'hôtel sont classées par arrêté du 28 décembre 1984.