Origine et histoire de l'Îlot de la Reine Blanche
L’îlot de la Reine Blanche est un ensemble triangulaire de bâtiments situé dans le 13e arrondissement de Paris, inséré entre les rues des Gobelins, Berbier‑du‑Mets et Gustave‑Geffroy, à proximité de la manufacture des Gobelins. Le site est lié à l’histoire des ateliers de teinture qui se développaient le long de la Bièvre ; le sol de la parcelle recèle de nombreux vestiges de ces anciens ateliers. À l’origine se trouvait un manoir construit en 1290 par Marguerite de Provence, veuve de saint Louis, où elle se retira jusqu’à sa mort en 1295 ; sa fille Blanche de France y résida ensuite et le lieu prit au XIVe siècle le nom d’« hostel de la Reyne Blanche ». On suppose que c’est peut‑être dans cet hôtel que se déroula, le 28 janvier 1393, l’épisode dit du Bal des ardents, au cours duquel le roi faillit périr brûlé ; en 1404 le roi ordonna la destruction de la bâtisse.
À la fin du Moyen Âge le bourg Saint‑Marcel, hors des murailles de Paris, accueillait déjà des résidences mais s’est progressivement transformé en quartier d’activités industrielles attirées par la Bièvre ; plusieurs familles de teinturiers, dont les Gobelin et les Canaye, s’y installèrent. La famille Gobelin s’implante dès le XVe siècle et développe au XVIe siècle des ateliers de teinture, notamment l’écarlate sous François Ier ; Philibert Gobelin fit aménager une terrasse sur la Bièvre en 1486 et, en 1525, la rue des Gobelins appartient en grande partie à la famille.
Les bâtiments actuels comprennent des constructions des XVe, XVIe et XVIIe siècles : la maison dite de la Reine Blanche et l’immeuble du 19 rue des Gobelins datent de la fin du XVe siècle, un grand corps de logis à tourelles et caves est élevé entre 1500 et 1535, et un immeuble en retour correspond à une campagne du XVIIe siècle. Deux escaliers à vis, dont le moyeu central unique est un long morceau de bois soutenant la toiture selon des techniques flamandes, sont encore en place. Un ancien mur d’enceinte du XIIIe siècle est visible à l’intérieur du 12, rue Berbier‑du‑Mets. Le pavillon à tour, détruit pendant la Commune de Paris, a été reconstruit à l’identique.
Au fil des siècles l’ensemble a connu diverses affectations : habitation transformée au XVIIe siècle avec création d’une cour d’honneur et d’un passage cocher, brasserie, club jacobin en 1790, puis installations industrielles comme une tuilerie et une tannerie ; au milieu du XVIIIe siècle Antoine Moinerie rétablit une teinturerie sur le site. La percée de la rue Gustave‑Geffroy a eu lieu en 1906 et, en 1912, le lit de la Bièvre a été canalisé et couvert pour constituer la rue Berbier‑du‑Mets.
Les bâtiments historiques ont été classés monuments historiques en 1980 puis complétés par des inscriptions en 1989 et 1995. Entre 1999 et 2002, les constructions parasitaires du XIXe siècle ont été démolies, l’îlot a été rénové et les édifices restaurés, puis ouverts à la visite. On y distingue notamment une cour intérieure, un pavillon nord avec tour et porche d’entrée, une galerie sud munie d’un puits, un passage cocher surplombé d’un encorbellement côté rue, la façade sur rue du corps de logis principal et les détails architecturaux de l’escalier à vis avec son moyeu central.