Origine et histoire de l'Immeuble
L'hôtel d'Hesselin était un hôtel particulier du XVIIe siècle situé sur l'île Saint‑Louis à Paris, détruit en juin 1934. Il se trouvait au n°24 quai de Béthune, dans le 4e arrondissement. L'édifice fut élevé entre 1640 et 1644 par Louis Le Vau pour Louis Hesselin, maître de la Chambre aux Deniers et ordonnateur des plaisirs de la Cour ; les panneaux du portail ont été sculptés de deux têtes de bélier par Étienne Le Hongre. En 1669, l'hôtel passa à François Molé, puis fut revendu en 1719 à Monerat puis en 1787 à d'Ambrun de Moûtalets; il appartint ensuite à Le Brochant, puis à Jean Michel Le Chanteur par héritage, et la fille de celui‑ci, épouse d'Alexandre Parent du Châtelet, fit élever un immeuble de deux étages et eut parmi ses locataires un nonce du pape et Loquet, maire de l'arrondissement.
En 1932, l'industrielle Helena Rubinstein racheta l'hôtel à José Maria Sert et le fit démolir en 1934, malgré son classement aux monuments historiques datant de 1927. Elle chargea l'architecte‑décorateur Louis Süe de concevoir le nouvel immeuble dans lequel elle emménagea en triplex en 1937 ; Louis Marcoussis, Max Ingrand, Paule Marrot et Richard Georges Desvallières figurent parmi les collaborateurs. Le mobilier mêlait meubles anciens et pièces contemporaines signées, notamment, Louis Marcoussis ou Jean‑Michel Frank, et des tapis Myrbor réalisés d'après des dessins de Jean Lurçat et de Pablo Picasso. Helena Rubinstein recevait le Tout‑Paris sur la terrasse de 300 m2 de l'édifice ; pendant la Seconde Guerre mondiale des Allemands occupèrent l'appartement et laissèrent des meubles criblés de balles que Rubinstein conserva comme témoignage. Elle loua plus tard son appartement à Georges et Claude Pompidou; Georges Pompidou y mourut en 1974 et Claude Pompidou en juillet 2007. Le comédien Louis de Funès y possédait un appartement et l'homme de lettres Claude Mauriac y demeura jusqu'à sa mort.
Quelques éléments de l'hôtel primitif ont été conservés : le balcon en fer forgé du premier étage, inscrit au titre des monuments historiques le 22 décembre 1927, ainsi que certaines peintures de la cage d'escalier, la fontaine de la cour et un décor à arcature. L'ensemble originel se composait d'une juxtaposition de pavillons le long de la rue Poulletier, depuis le quai; le pavillon principal, donnant sur la Seine, était prolongé à gauche par une aile formant la façade associée à l'hôtel de Sainctot (n°26), créant un ensemble voulu par Le Vau. À droite, dans la cour, s'étendait le logis puis le jardin, la cour étant ornée d'une fontaine. Le rez‑de‑chaussée se répartissait en deux parties de part et d'autre de la remise et de la cour : du côté du fleuve se situaient les appartements d'hiver autour d'un grand escalier, et du côté du jardin les appartements d'été, composés de trois pièces juxtaposées, qui abritaient notamment le cabinet de curiosités et la bibliothèque de Louis Hesselin. Le premier étage accueillait un double appartement d'apparat organisé autour du grand escalier et destiné à permettre la circulation entre les deux appartements, où Hesselin exposait ses tableaux, meubles, sculptures et pièces d'orfèvrerie; Le Vau y aménagea sa première chambre « à l'italienne » et à alcôve, tandis que le deuxième étage comprenait les appartements privés. La décoration intérieure fit appel aux sculpteurs Gilles Guérin, Gérard van Opstal et Jacques Sarrazin, ainsi qu'au peintre Michel Dorigny.