Origine et histoire
La ferme Dizonanche se situe sur le secteur du Goudoulet, à l'est du bourg de Sainte-Eulalie, dans la commune de Sagnes-et-Gouloulet, en Ardèche, et se trouve en bordure est de l'ancien territoire du Ligeret à plus de 1 200 mètres d'altitude. Propriété et limite régulièrement citée entre les domaines, elle appartenait aux chartreux de la chartreuse de Bonnefoy et bordait les terres de l'abbaye d'Aiguebelle. La chartreuse de Bonnefoy avait été fondée par le don de Guillaume de Fay, seigneur de Mézenc, et le toponyme Dizonanche apparaît dès 1179 dans le cartulaire de Bonnefoy, notamment dans des définitions de limites négociées avec Aiguebelle. Ce lieu servait de repère et de point de passage pour notaires et émissaires lors d'arbitrages et de règlements de litiges territoriaux. La Dizonanche est également liée au suc des Coux, qui fournissait pierres et meules, et les lauzes de couverture provenaient du Mont Gerbier et de la Lauzière, cette dernière relevant aussi des chartreux. Jusqu'au XVe siècle, les échanges et l'exploitation des terres se poursuivirent entre Bonnefoy et Aiguebelle, mais au début du XVe la peste et les épidémies semblent avoir conduit Aiguebelle à céder la gestion de ses terres du Goudoulet aux exploitants. La grange du Dizonanche est citée par le notaire Guillaume du Pont en 1451, et des témoins portant le nom de Viale, originaires de Dizonanches, apparaissent dans des actes au tournant des XVe et XVIe siècles ; la famille Viale paraît avoir détenu la ferme par la suite. Les guerres de religion entraînèrent des incendies et la prise de la chartreuse par les protestants, puis sa reconquête et d'importants dommages ; la chartreuse fut partiellement reconstruite mais demeura fragilisée économiquement et matériellement. Au XVIIe siècle, les chartreux entreprirent des travaux sur leurs propriétés, mais un nouvel incendie en 1653 aggravera la situation; la chartreuse ne retrouva pas sa prospérité et subsista dans des conditions précaires. En janvier 1628 Jean Méjan s'installe «en gendre à Disonenches» et la famille Méjan est mentionnée comme occupant la ferme jusqu'au XVIIIe siècle; une date portée «1642» sculptée sur le manteau de la cheminée principale indique des travaux importants et la bretèche au‑dessus de la porte principale est probablement héritée de cette période. Après la Révolution, la ferme passa aux mains de métayers; elle figure sur le plan de Cassini au XVIIIe siècle et resta la propriété d'une famille paysanne jusqu'en 1990. La ferme n'a toutefois pas fait l'objet de recherches spécifiques sur son bâti dans les fonds de la chartreuse de Bonnefoy. En 2007, un épisode récent signale la prédation de 27 brebis du troupeau de la ferme par un retour du loup dans la montagne ardéchoise. Architecturale ment, la Dizonanche constitue un ensemble typique d'établissement monastique, avec plusieurs bâtiments et un logis séparé des constructions utilitaires. Le logis, sur trois niveaux et organisé en deux travées, présente l'entrée sur la façade sud de la première travée et trois petites fenêtres côté nord; le rez‑de‑chaussée abrite une grande pièce de vie dotée de la cheminée datée de 1642 et d'un sol en grandes dalles de basalte, et un escalier à droite de la cheminée, depuis une cave, dessert les étages. Un petit bâtiment de réserve est accolé au logis. La grange, ou fenière, reposait sur l'étable et offrait au sol un plan d'environ 30 × 10 m; elle était initialement couverte de lauzes, le sol de l'étable était en terre battue et un four à pain, aujourd'hui disparu, se trouvait dans sa partie nord. Les lauzes qui recouvraient les bâtiments proviennent du Mont Gerbier.