Origine et histoire de La Petite Bibliothèque
La Bibliothèque pour enfants a été construite en 1965 par l'Atelier de Montrouge (Jean Renaudie, Pierre Riboulet, Gérard Thurnauer et Jean‑Louis Véret) pour l'association La Joie par les Livres ; elle se situe au cœur d'une cité HLM de 1952 à Clamart. Sa structure repose sur l'imbrication de cylindres de béton de tailles différentes et son mobilier intérieur, dû à Alvar Aalto, a été choisi pour son adaptation à l'usage enfantin. Pensée dès l'origine pour un jeune public, cette réalisation a eu une grande influence dans le monde des bibliothèques et est protégée au titre des monuments historiques. Grâce au mécénat d'Anne Gruner Schlumberger, la bibliothèque a ouvert en 1965 ; son fonds initial a été constitué par trois bibliothécaires spécialisées — Lise Encrevé, Christine Chatain et Geneviève Patte, qui a dirigé l'association jusqu'en mars 2001. Dès la fin des années 1960, des enfants ont été engagés comme aides bibliothécaires et l'établissement s'est rapidement distingué par une pédagogie axée sur la responsabilisation et l'ouverture sur le monde ; un reportage de Martine Franck paru en une de Life et la visite de l'impératrice du Japon ont contribué à sa renommée internationale. À partir de 1972 l'État a pris en charge son fonctionnement, l'association a évolué vers des structures nationales de la littérature pour l'enfance et, en 1997, la bibliothèque a été rattachée à la Direction du livre et de la lecture. En février 2006 la bibliothèque a dû fermer provisoirement pour des raisons conservatoires ; l'occupation du bâtiment par un collectif d'habitants et d'usagers a permis sa réouverture quelques semaines plus tard. Elle est ensuite devenue une structure associative expérimentale, gérée par l'association La Petite Bibliothèque Ronde, présidée successivement par Geneviève Patte puis Olivier Ponsoye, tandis que certains organismes de la littérature jeunesse ont rejoint la Bibliothèque nationale de France. La fondatrice souhaitait ouvrir la bibliothèque aux facettes du monde et mener une mission internationale : dès son ouverture l'établissement a développé des échanges professionnels, a accueilli en 1967 une exposition internationale d'illustration et, à partir de 1976, a attribué deux bourses annuelles à des bibliothécaires internationaux pour favoriser la circulation des albums présentés dans leur langue d'origine. Ces initiatives, ainsi que l'expérimentation de nouvelles approches et la collaboration avec divers professionnels, ont fait de la bibliothèque un point de référence pour la littérature jeunesse. Pionnière du numérique, elle a introduit des ordinateurs Macintosh dès les années 1980, recruté un médiateur multimédia en 2002 et orienté sa stratégie vers le numérique à la fin des années 2000, en développant une présence en ligne, un prix du livre numérique jeunesse et un portail de ressources classées par âge et par thème. La création numérique y est pratiquée depuis longtemps, par des heures du conte numériques, des ateliers de peinture et d'animation ou des enregistrements sonores réalisés par les enfants. En 2016 la bibliothèque a de nouveau été menacée de fermeture en raison de travaux ; l'installation d'une palissade, les tensions avec les autorités locales et la mobilisation d'un collectif de soutien ont déclenché des rassemblements, une tribune publique et des tentatives de médiation au niveau ministériel et préfectoral. Sur le plan architectural, l'ouvrage de l'Atelier de Montrouge est la première bibliothèque française entièrement conçue pour les enfants, privilégiant des espaces modestes et des salles rondes de plain‑pied nichées au milieu des immeubles ; la symbolique du cercle vise à évoquer chaleur familiale et protection. Le mobilier d'Alvar Aalto, désormais protégé en tant que patrimoine du XXe siècle, participe de cette conception ; l'organisation intérieure comprend une salle intime pour les tout‑petits, avec plafond plus bas et fenêtres adaptées, et une salle pour les plus grands qui s'ouvre sur un jardin servant d'espace de lecture à ciel ouvert. Aujourd'hui renommée La Petite Bibliothèque Ronde, l'établissement mise sur le multimédia et la participation des enfants pour répondre aux défis posés par la culture d'écran ; les fonds documentaires et l'équipement informatique ont été cédés à la ville de Clamart, qui les met à disposition de l'association, et le projet reçoit le soutien du Service du Livre et de la Lecture, de la ville et de mécènes. L'association développe des médiations et des partenariats à plusieurs échelles, accueille des publics variés, intervient hors les murs et inscrit ses actions dans des axes d'éducation artistique et culturelle, en privilégiant l'éveil des tout‑petits, l'éducation artistique des 3‑12 ans et la lutte contre les inégalités d'accès au livre. L'équipe partage son expérience lors de journées d'étude et de colloques et publie chaque année La rOnde, qui donne la parole à des professionnels sur des thématiques liées à la littérature jeunesse. Un documentaire de cinquante‑quatre minutes, La bibliothèque est à nous, réalisé par Kaspar Vogler et tourné en 2015, interroge l'indépendance du lieu ; il a reçu le prix du Meilleur Documentaire au SiciliAmbiente Documentary Film Festival en 2016 et a été coproduit par la Petite Bibliothèque Ronde et plusieurs partenaires culturels.