Période
1ère moitié XXe siècle
Patrimoine classé
Les éléments suivants de la maison d' Ange-Volant : les deux portails d’entrée architecturés, les chemins d’accès à la maison, les façades et toitures du corps du bâtiment principal de la maison dite L’Ange volant situé entre cour et jardin, le petit jardin côté est avec ses pavements et escaliers, la partie est de la cour nord comprenant son pavement longeant la façade et le grand portail qui sépare la cour en deux, la terrasse située devant la façade sud et ses escaliers desservant le jardin, la partie centrale du jardin comprenant ses deux chemins pavés jusqu’au bassin, à l’exclusion de celui-ci, et à l’intérieur de la maison : toute la distribution, ainsi que certaines pièces en totalité que sont au rez-de-chaussée le vestibule, la chambre d’amis, le salon et sa mezzanine (avec ses miroirs gravés), le coin du feu (avec ses bibliothèques intégrées), la salle-à-manger , ainsi que la chambre sud-est du premier étage et son vestibule-dressing (avec ses placards intégrés), le tout situé 61 rue Henri-Regnault, sur la parcelle n° 589, figurant au cadastre section AE, tel que délimité en rouge sur les plans annexés à l’arrêté : inscription par arrêté du 24 novembre 2021
Origine et histoire
L'Ange volant est une résidence privée à Garches conçue par l'architecte italien Gio Ponti pour la famille Bouilhet et réalisée entre 1927 et 1928. La commande résulte de la rencontre, lors de l'Exposition internationale des Arts décoratifs et industriels modernes de 1925, entre Ponti et Tony Bouilhet, directeur de la maison Christofle, qui marque le début d'une collaboration et d'une amitié durables. Ponti conçoit la villa avec Emilio Lancia et fait appel à Tomaso Buzzi pour l'ameublement et le décor. Il s'agit de la première commande de Ponti en dehors d'Italie et de sa seule réalisation en France, où il expérimente sa théorie de la « maison à l'italienne » formulée dans la revue Domus.
L'édifice se compose de deux niveaux enduits de blanc : un corps principal et, en retrait, un corps secondaire qui abrite un portique, une terrasse, les services, le garage et quelques chambres organisées pour préserver l'intimité des parents et des enfants. L'entrée est surmontée d'un tondo logé dans un fronton brisé où figure un ange en métal doré brandissant une maquette de l'Ange volant, réalisé par les ateliers Christofle et devenu l'emblème de la maison. La façade côté jardin, centrée par une vaste baie vitrée encadrée de colonnes, reprend de façon moderne les leçons classiques des villas palladiennes par sa symétrie de portes, fenêtres, frontons, niches et oculi. Elle s'ouvre sur une terrasse qui domine un jardin géométrique à l'italienne : une longue pelouse en pente se termine par un plan d'eau, ponctué de deux allées symétriques légèrement obliques qui conduisent le regard vers le bassin.
L'intérieur privilégie des tonalités claires et lumineuses contrastant avec des sols en marbre sombre, des parquets et un linoléum rouge vif. On pénètre par un vestibule semi-circulaire aux parois recouvertes d'un stuc vert-de-gris brillant et au plafond blanc mouluré ; deux niches accueillent de hauts vases Renaissance de Richard-Ginori offerts par le couple Ponti. À l'origine, un aquarium séparait l'entrée du salon pour créer un horizon visuel. Ponti met en place une division tripartite nette entre les espaces de jour, de nuit et de services, organisés autour d'un vaste hall-séjour à double hauteur, véritable pièce maîtresse de la maison. Un escalier d'apparat avec garde-corps en laiton réalisé par Christofle mène à une mezzanine qui multiplie les perspectives intérieures et extérieures.
Le plafond du hall est traité en dais théâtral en trompe-l'œil bleu et jaune ; de larges cartouches, surmontés des petits drapeaux français et italiens, portent les profils juxtaposés des futurs propriétaires, Tony et Carla Bouilhet. Le hall prolonge d'un côté un salon-bibliothèque à double hauteur au plafond peint et de l'autre une salle à manger. Ponti a également dessiné plusieurs pièces de mobilier en racine de noyer ainsi que des appliques et luminaires fabriqués par Christofle.
L'Ange volant illustre les principes que Ponti développera par la suite — vues traversantes, pièce centrale à double hauteur, théâtralité des perspectives — et servira de modèle pour des constructions ultérieures. La maison a ensuite été complétée par un second corps de bâtiments et a connu divers aménagements, dont l'installation d'une sculpture de Mircea Milcovitch dans une niche évidée. Avec la villa Planchart, elle figure parmi les rares réalisations de Ponti à avoir conservé leur intégrité, et les héritières de la famille Bouilhet ont engagé, dans les années 2010, des travaux de restauration.