Origine et histoire de la Maison natale de Jeanne d'Arc
La Maison de Jeanne d'Arc, maison médiévale du XVe siècle située à Domrémy-la-Pucelle dans les Vosges, est traditionnellement reconnue comme le lieu de naissance et d'enfance de Jeanne d'Arc, née vers 1412 au sein de la famille d'Arc. Classée monument historique depuis 1840 et labellisée Maison des Illustres, elle est décrite par Jeanne elle‑même lors de son procès. À l'origine, cette habitation faisait partie du domaine de 20 hectares de Jacques d'Arc et d'Isabelle Rommée ; elle est adossée au coteau du village, voisine de l'église Saint‑Rémy et située au bord de la Meuse, frontière entre le duché de Bar et le duché de Lorraine. Le père de Jeanne devint aussi fermier du domaine de l'ancien château de l'Isle, aujourd'hui disparu, et la maison reflète, par ses choix architecturaux et son isolement, le rang de ses premiers propriétaires, malgré l'absence d'éléments précis sur la circulation intérieure ou la destination exacte de certaines pièces. La bâtisse actuelle, d'environ 100 m², comporte un rez‑de‑chaussée rénové de quatre pièces ouvert au public, un étage et un grenier ; elle présente un plafond à la française, des dalles de pierre, une cheminée, une fenêtre à croisée à meneau et un toit en appentis couvert de tuiles canal.
C'est dans le jardin, entre la maison et l'église, que Jeanne rapporte avoir entendu, vers l'âge de treize ans, des voix qu'elle identifiait comme divines ; lors de son procès du 22 février 1431 elle raconta que la première voix lui était parvenue vers midi, en été, sur le côté droit du jardin, vers l'église. Elle affirma également y avoir vu et entendu les saintes Catherine d'Alexandrie et Marguerite d'Antioche ainsi que l'archange saint Michel, qui lui auraient demandé d'être pieuse, de ramener la paix au royaume de France en chassant ses envahisseurs et de conduire le dauphin Charles sur le trône, jusqu'au sacre à Reims. La commune de Domrémy, traversée par la Meuse, occupe en effet un point stratégique dans la marche de Lorraine, dans le contexte du conflit entre l'Angleterre alliée à la Bourgogne et le royaume de France.
Après le départ de la famille d'Arc, la maison resta leur propriété jusqu'au XVIe siècle puis fut acquise en 1586 par Louise de Stainville, comtesse de Salm ; elle est ensuite passée à Germain Toussaint en 1611, puis, après des périodes de propriétaires et locataires inconnus pendant la guerre de Trente Ans, elle entra en 1700 dans le patrimoine de la famille Gérardin par le douaire de Nicole Floquet. À partir de 1767, des travaux sur le ruisseau des Trois Fontaines provoquèrent des infiltrations qui rendirent la maison inhabitable, la transformant en remise et dépendance agricole tandis qu'un corps de ferme moderne était construit en avant. La maison attira très tôt des visiteurs illustres, tels le philosophe Michel de Montaigne qui la mentionne en 1580 et l'historien Dom Calmet, et elle fut rachetée en 1818 par le Conseil général des Vosges pour 2 500 francs ; restaurée par l'ingénieur Jean‑Baptiste Jollois et dégagée de constructions avoisinantes, elle fut classée parmi les premiers monuments historiques en 1840, statut obtenu en partie en raison de son origine.
Sur la façade principale, une niche au‑dessus de la porte abrite depuis 1839 une statue de Jeanne agenouillée en armure, copie en fonte d'une œuvre conservée au centre d'interprétation johannique « Visages de Jeanne ». Cette statue est une variante d'une œuvre commémorative connue par gravure et on a proposé diverses hypothèses quant à son origine, y compris une commande des comtes de Salm ou une provenance d'une chapelle paroissiale ; l'existence d'une statue identique érigée en 1611 à Toul rapproche aussi l'œuvre de l'ensemble oratoire du Bois‑Chenu. Mutilée au niveau des bras et des jambes, elle constitue la plus ancienne statue de Jeanne d'Arc aujourd'hui conservée.
La maison a inspiré de nombreuses reproductions et œuvres : elle apparaît sur une toile conservée dans l'église de Ménil‑en‑Xaintois, a donné lieu à un poème de Pierre‑Antoine Lebrun en 1815, figure dans des tableaux de Jules Bastien‑Lepage (1879) et d'Henry Ossawa Tanner (1918), a été reproduite dans le Parc Miniature Alsace Lorraine et a servi de motif pour un timbre émis en 1996. Des éléments muséographiques et des objets historiques présentés dans la maison témoignent de son rôle de lieu de mémoire johannique.
