Origine et histoire de la Malouinière de la Chipaudière
La malouinière de la Chipaudière, aussi appelée château de la Chipaudière, se situe à Paramé, aujourd’hui intégré à Saint‑Malo, et figure parmi les plus vastes demeures de plaisance édifiées par les armateurs malouins. Le domaine est connu au XVe siècle comme appartenant à la famille Pépin. Le château actuel a été édifié entre 1710 et 1720 sous la direction de François‑Auguste Magon de la Lande en mémoire de son frère Nicolas Magon de la Chipaudière (1670‑1698) ; François‑Auguste, armateur et corsaire puis directeur de la Compagnie des Indes orientales, a supervisé les travaux. La chapelle du domaine a été bénite en 1735. La propriété passa ensuite à Nicolas Auguste Magon de la Lande, puis à Erasme Auguste Magon de la Lande, exécuté le 19 juillet 1794 ; sa veuve conserva la Chipaudière jusqu’à sa mort en 1832, puis elle revint à leur fille Charlotte Julienne et à son époux Félix Besnier. Le domaine appartint ensuite au fils de ces derniers, Félix Marie Charles Besnier, puis à son épouse Louis Marie Fournier de Bellevue ; leur fille Louise Besnier le céda le 20 juillet 1902 au général de brigade Henri Georges Marie Magon de la Giclais, dont les descendants sont les propriétaires actuels. La malouinière — logis, communs, chapelle et jardin — est classée monument historique depuis le 2 février 1982 et se visite malgré son statut de domaine privé.
Le logis, installé dans un parc de quatre hectares, présente les dimensions d’un château. Il est composé d’un bâtiment principal flanqué de deux ailes et rythmé par une façade de sept travées ; au centre se détache un avant‑corps à trois pans couronné d’un fronton triangulaire portant les armes des Magon surmontées d’une couronne de marquis. Côté jardin, un avant‑corps polygonal abrite le grand salon ovale, disposition que l’on retrouve dans d’autres malouinières liées à la famille Magon. La chapelle, coiffée d’un petit campanile, renferme un autel en bois sculpté. Les communs, datés du XVIIe siècle et situés côté nord, présentent une alternance de gerbières à frontons arrondis et triangulaires.
Plusieurs décors intérieurs sont protégés : la salle à manger est ornée de marbre de Carrare et de boiseries en chêne de Norvège, le bureau conserve des toiles de Jouy, la chambre du rez‑de‑chaussée est tendue de cuir de Cordoue, et les lambris des autres chambres sont en chêne de Hollande. Le jardin à la française, attribué à Le Nôtre, s’organise en trois terrasses successives ouvrant sur une perspective aboutissant à un miroir d’eau prolongé par un grand canal et deux allées bordées de tilleuls centenaires. Le parc et le logis sont isolés de la vie rurale par de hauts murs et encadrés d’annexes telles que colombier et chapelle ; l’enclos, le portail d’entrée et la rabine marquent l’importance du lieu dans le paysage.
La chapelle Saint‑Roch et Saint‑Hubert du manoir de Vaulsalmon, citée en 1621 et détruite au milieu du XVIIIe siècle, avait vu sa fondation de messes instaurée le 16 novembre 1672 par Alain Martin et son épouse Olive Salmon ; cette fondation de 120 livres fut transférée à la chapelle de la Chipaudière. On y observait en 1776 les armoiries de Maçon, seigneur de La Lande, et la chapelle fut unie à la seigneurie de La Chipaudière selon les sources.