Origine et histoire du Manoir d'Épeisse
Le manoir d'Épeisse, ou maison-forte de Cogny, est implanté à flanc de coteau, à l'ouest du bourg de Cogny (Rhône), séparé du centre par un vignoble sur la route du manoir au clos Rambion. Il faisait autrefois partie d'un clos plus vaste, consacré jusqu'à récemment à la viticulture. La terre d'Epeisses est mentionnée pour la première fois en 1286 et la maison-forte est le berceau d'un lignage seigneurial éponyme attesté dès le XIIe siècle, relevant de la châtellenie beaujolaise de Montmelas. Aux XIIIe et XVe siècles, la seigneurie passe successivement aux familles de Chameyré puis aux Namy ; ce dernier lignage s'éteint dans la seconde moitié du XVIIe siècle. En 1693, Jeanne de la Forêt, veuve de l'échevin François Tournier qui possédait la Lucardière depuis 1651, acquiert la maison-forte et ses dépendances ; l'acte de vente décrit le domaine comme comprenant des vignes, une maison avec cave et cellier, une étable, un cuvier abritant deux cuves et un pressoir, une cour et un jardin. Jeanne-Françoise Tournier, qui avait épousé en 1688 Pierre de Phélines, laisse les armes de ce dernier sur le manteau d'une cheminée ; la propriété est encore agrandie en 1702. À la fin du XVIIe siècle, le centre domanial se déplace vers la Lucardière, reconstruite à cette époque, et la maison-forte d'Epeisses devient une dépendance agricole où logent des vignerons. Par héritage, le domaine revient en 1728 à Nicolas Deschamps ; mis en vente en 1758, il se compose alors de plusieurs chambres pour ménages de vignerons, d'une cave, d'un cellier, d'un fruitier, d'une tour, d'une tourelle, d'un pigeonnier, d'écuries, d'une grange à foin et d'un grenier à céréales. L'achat est réalisé par François Morel, conseiller à la cour des monnaies de Lyon. Pendant la Révolution, son fils François Morel de Rambion est arrêté puis relâché deux mois plus tard, et le 11 août 1793 le conseil municipal de Cogny brûle solennellement les archives de la seigneurie : six terriers du XVe siècle, six autres plus récents et « cinq livres pesant de vieux papiers ». Seul subsiste aux archives départementales un terrier du XVIe siècle qui ne se trouvait pas à Epeisses. Louis-Joseph-Irénée Morel de Voleine (1856-1936), historien et propriétaire de la maison-forte, publie en 1903 une histoire du fief dans le Bulletin de la Société des Sciences et Arts du Beaujolais. Le monument a été inscrit partiellement au titre des monuments historiques le 13 juin 1989, protégeant alors les façades et toitures des ailes Nord et Est, son escalier à vis et ses deux cheminées. Cette protection a été étendue à la totalité de l'édifice et au portail d'entrée par arrêté du 17 décembre 2021, qui considère l'ensemble des bâtiments et des espaces, d'usage d'habitation ou agricole, comme formant un ensemble cohérent et indissociable parmi les maisons-fortes.