Origine et histoire du Manoir de Kervegan
Le manoir de Kervégan, également appelé Ker Guegant ou Kervégant, se situe au lieu-dit Kerlaouénan dans l'ancienne commune de Servel, rattachée à Lannion depuis 1961 (Côtes-d'Armor). Sa première construction est très probablement datée de la fin du XIVe siècle ou du début du XVe siècle et est historiquement liée à la seigneurie de Kervégan. Le corps de bâtiment actuel correspond à une phase de construction datée entre 1635 et 1645, puis a reçu une importante restauration en 1815 qui lui a donné son aspect contemporain ; une porte de la cour intérieure porte encore l'inscription « FF PAR VINCENTE LOGOU 1815 ». Le domaine s'appuie sur la maison manale de Kervégan — attestée en 1778 sous le nom « la maison noble de Kervigant » — et sur une chapelle primitive connue sous le vocable Saint-Nicodème située à environ 150 mètres au sud‑ouest du manoir, probablement fondée à la fin du XIVe ou au XVe siècle par la famille des Tertres. Le manoir disposait de droits seigneuriaux liés au domaine, tels que le moulin (droit de maout) et le pigeonnier (droit de colombier), qui figuraient encore sur le plan cadastral impérial de 1826, certaines parcelles conservant le toponyme breton « Parc ar houldry ». Un inventaire du XVIIIe siècle signale la présence d'un grand vitrail au pignon avec écusson, des sculptures d'écussons (notamment de la famille du Boisgelin) sur un banc, quelques reliques et une pierre gravée portant un écusson du seigneur du Tertre ; la porte actuelle porte un écusson attribué aux seigneurs de Kergariou. Le manoir est doté d'un puits toujours existant et comportait probablement un four à pain au pignon sud‑ouest, aujourd'hui disparu mais attesté par des attaches en pierre subsistantes. Au XXe siècle, le bâtiment a été fortement dégradé : il a subi pillages et mutilations de son décor architectural, parmi lesquels des éléments exportés, notamment une cheminée retrouvée dans une villa côtière (Trébeurden ou Trégastel) ornée du collier de l'ordre du Saint‑Esprit et de consoles à volutes caractéristiques de la première moitié du XVIIe siècle. Du côté nord‑est, dans les anciennes dépendances encore en place, subsistent deux pierres de granit sculptées difficilement lisibles, l'une portant un linteau à inscription et l'autre un blasonnement des anciens seigneurs. Plusieurs éléments du patrimoine bâti ont disparu : porte cochère et piétonne, four à pain, diverses sculptures sur granit, pigeonnier et moulin, tels qu'ils figuraient sur le cadastre de 1826. La porte du manoir est inscrite au titre des monuments historiques par arrêté du 17 septembre 1964. Le manoir a également été retenu en 2021 parmi les dix lauréats de l'opération Vieilles Maisons Françaises consacrée aux châteaux et demeures historiques. La seigneurie de Kervégan, qui n'exerçait pas de droit de justice, a été successivement tenue par trois grandes familles : les des Tertres — attestés à Kervégant dès 1426 et auteurs de la chapelle Saint‑Nicodème —, puis, par alliance au début du XVIIe siècle, par les du Boisgelin, et enfin par la famille de Kergariou au XVIIIe siècle ; les registres paroissiaux et plusieurs actes anciens conservent la mémoire de ces lignées et des transferts de propriété.
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