Origine et histoire
Le manoir de Rouessé, situé à Laval (Mayenne) dans l'ancien territoire de Grenoux annexé à Laval en 1863, se trouve aujourd'hui au cœur du quartier pavillonnaire du Bourny, aménagé dans les années 1970. Transformé en chambres d'hôtes, il est attesté dès le Moyen Âge sous diverses graphies dans les cartulaires. Des haches en bronze, découvertes en 1883 dans la carrière, sont déposées au Musée des Sciences de Laval. Le château à motte de Rouessé est attribué à Geoffroy de Rouessé, vassal de la famille de Saint‑Berthevin, et fut construit vers 1100. À l'origine en bois, l'édifice a été reconstruit en pierre en 1622. Un aveu de 1442 décrit la motte, des murailles, un hébergement, des douves, un vivier, une chênaie, des vignes, des plesses, des faux et des vergers, et cite des fiefs dépendants tels qu'Aligné, la Grigonnière et la Lorière. Le manoir prend sa forme seigneuriale au XVe siècle, après la guerre de Cent Ans, sous l'impulsion de René de Meaulne, lieutenant royal. La famille de Meaulne a marqué l'histoire du domaine : René de Meaulne fut lieutenant pour le roi et gouverneur de Laval, Claude est désigné premier marquis de Lancheneil, et Urbain, deuxième marquis, entreprit au XVIIe siècle des travaux de rénovation. Urbain obtint une importante rente après la bataille de La Rochelle et fit exécuter des aménagements inspirés du style Louis XIII, mêlant fenêtres à bossage, frontons triangulaires et corniches à modillons. D'autres membres de la famille Meaulne — Claude, Julien‑René et René — sont mentionnés dans les archives comme seigneurs de Rouessé aux XVIIe et XVIIIe siècles. Sous la Révolution, les biens du manoir furent saisis et estimés, la famille étant alors considérée comme émigrée et proche des contre‑révolutionnaires. Le manoir conserve un style Louis XIII inspiré de la Renaissance, avec toiture pentue, larges fenêtres et jambages et meneaux en pierre; il a fait l'objet d'agrandissements aux XVIIe et XVIIIe siècles. L'édifice est inscrit au titre des monuments historiques par arrêté du 10 février 1987 et classé par arrêté du 23 octobre 1989. Le sous‑sol du Bourny, riche en calcaire et en marbre rose pâle, a été exploité depuis le XVIIe siècle par les propriétaires du manoir pour alimenter un four à chaux domestique destiné à la construction et à l'entretien du domaine. Au début du XIXe siècle la zone comptait au moins quatre petites carrières; un four à chaux est attesté dès 1622 et la carrière de marbre rose pâle n'a été supprimée qu'au milieu du XIXe siècle. Pierre‑Jacques Gerbault, qui demanda l'autorisation d'ouvrir plusieurs carrières et de construire des fours à chaux entre 1837 et 1852, fonda officiellement l'Usine du Bourny en 1858; la construction de quatre fours s'acheva en 1874 et, avec l'arrivée de la machine à vapeur, la famille perfectionna ses installations pour une cuisson permanente à 1 000 °C. Pierre‑Jacques Gerbault (1827‑1878), futur maire de Saint‑Berthevin, et sa famille devinrent propriétaires du domaine après l'achat effectué en 1858 par Pierre Gerbault à Charles de Preaulx pour 175 650 francs. Alain Gerbault, né en 1893 dans cette famille et célèbre navigateur, s'installa quelques années au manoir, propriété familiale. En résumé, le manoir de Rouessé illustre la continuité d'un domaine seigneurial, l'exploitation locale des carrières et les adaptations architecturales du XVIIe au XIXe siècle, tout en étant aujourd'hui réaffecté à l'accueil touristique.
