Période
XIIe siècle, XVIe siècle
Patrimoine classé
Le site historique, les bâtiments et le sol des parcelles de la corroirie, annexe économique de la chartreuse du Liget, au lieu-dit "La Corroierie", sont inscrits en totalité, tels que délimités en bleu sur le plan annexé à l'arrêté. Cet ensemble figure au cadastre, section ZR, parcelle n° 6, lot 1, 12, 13, 14 : inscription par arrêté du 4 mars 2015
Origine et histoire du Monastère de La Corroirie
La Corroierie est la maison basse et le fief fortifié dépendant de la chartreuse du Liget, implantée sur la commune de Chemillé‑sur‑Indrois et adossée au coteau bordant la vallée du ruisseau d'Aubigny. Probablement fondée à la fin du XIIe siècle, elle appartient aux plus anciens types d'installations chartreuses conservées et doit son nom à la corroirie, lieu d'approvisionnement et de gestion des affaires matérielles des religieux. La construction primitive semble avoir compris une vaste salle divisée en deux nefs par une file de colonnes et une chapelle de style angevin, cette dernière ayant été surmontée d'un étage qui a pu servir au séchage des peaux destinées au parchemin. Dès le Moyen Âge, la Corroierie assure la gestion d'un domaine important pour la chartreuse, lequel atteint près de 1 480 hectares de terres, prés, vignes, bois et étangs, répartis autour de la maison haute et de plusieurs métairies éloignées. Au cours du bas Moyen Âge et jusqu'à l'époque moderne, les bâtiments sont régulièrement agrandis ou surélevés pour loger un personnel croissant et pour répondre aux besoins agricoles et artisanaux du domaine. Les épisodes de guerre, notamment la guerre de Cent Ans puis les guerres de Religion, provoquent des phases de fortification : porterie munie d'une herse, élévation des murs et création d'aménagements défensifs pour protéger la cour et les dépôts. Après des sièges et des pillages, des travaux de remblaiement et d'élévation des édifices sont entrepris pour prévenir les inondations et renforcer la défense ; l'église est en partie transformée en bastion avec meurtrières et chemin de ronde. Aux XVIe et XVIIe siècles, la Corroierie se dote d'un châtelet d'entrée monumental, de tours, d'échauguettes, de contreforts et de douves alimentées par l'étang aménagé sur le cours de l'Aubigny, et une tourelle isolée dans l'enceinte sert probablement de prison, attestant l'exercice par la chartreuse de droits de justice seigneuriaux. À partir de la seconde moitié du XVIIe siècle, la vocation religieuse de la maison basse décline : l'église est fermée au culte et les frères convers sont logés à la maison haute, tandis que la Corroierie se recentre sur l'exploitation agricole et des activités industrielles comme des moulins. Deux moulins à eau sont installés dans la partie orientale des celliers et leurs roues sont actionnées par un canal alimenté par l'étang ; des aménagements intérieurs et des améliorations du confort sont également réalisés. La Révolution marque une rupture définitive : les chartreux quittent la chartreuse au début de 1791 et les bâtiments sont vendus comme biens nationaux ; la propriété change ensuite de mains à plusieurs reprises. Restée habitée depuis le XIXe siècle, en particulier par la famille de Marsay à partir de 1899, la Corroierie a été préservée en grande partie de la ruine et certains locaux ont été aménagés en chambres d'hôtes au XXIe siècle, tout en conservant un aspect proche de celui de la fin du Moyen Âge. Les éléments remarquables du site, dont la porte fortifiée, la chapelle et l'ancienne prison, ont fait l'objet de protections au titre des monuments historiques et l'ensemble du site a été intégré à un périmètre classé, attestant de son intérêt architectural et historique. Les études historiques et architecturales menées depuis la fin du XIXe siècle ont précisé la chronologie des phases de construction et de transformation, tandis que l'occupation continue a contribué à la conservation des bâtiments.