Origine et histoire
Le monument au comte de Chambord est une sculpture monumentale érigée à Sainte-Anne-d'Auray (Morbihan) et dédiée à Henri d'Artois ; il a été réalisé à partir de 1891. Il se situe en vis-à-vis de la basilique Sainte-Anne, à environ 700 mètres à l'ouest, dans une perspective remarquée mais peu soulignée. Le site avait été, au XIXe siècle, un lieu de pèlerinage royaliste, notamment lors de la tentative de restauration du prétendant Henri V, soutenu par une grande part du clergé et des élus du département, parmi lesquels figuraient des notables légitimistes. Les rassemblements se sont d'abord organisés autour de messes célébrées le jour de la fête de saint Michel, anniversaire du candidat, puis d'un pèlerinage populaire fixé au 29 septembre à partir de 1875, accompagné de réunions dans la remise de l'hôtel du Lion d'Or et de l'édification d'une grande baraque de planches. Après la mort du comte de Chambord en 1883, le pèlerinage déclina et la baraque fut démolie. Pour relancer la manifestation, une souscription permit d'acheter un terrain et d'ériger un monument ; la "société de Saint-Henri", créée le 20 février 1889 à l'initiative d'Athanase de Charette et d'amis châtelains, prit en charge le projet. Un premier projet confié à l'architecte Lequeux en 1888 fut écarté ; Édouard Deperthes, l'architecte de la basilique voisine, dessina la composition finalement retenue. Le monument fut exécuté par M. Kergoustin à partir de 1891 ; les cinq statues, sculptées par Alfred Caravanniez, furent fondues en fonte par Ferdinand Barbedienne pour la somme de 70 000 francs. Un mur et une grille furent installés en 1897, mais le jardin prévu ne put être réalisé alors par manque de financements. Le pèlerinage connut ensuite des variations liées au climat politique : les autorités réprimaient les manifestations antirépublicaines, poussant les monarchistes à contrecarrer les interdictions par des signes discrets et des chants présentés comme religieux, tandis que les offices étaient parfois autorisés à condition d'être apolitiques. Après la Première Guerre mondiale, le rassemblement déclina ; il fut relancé par l'Action française puis interdit en 1928. Pendant l'Occupation (juin 1940–septembre 1944), ni les autorités allemandes ni le régime de Vichy ne démontèrent le monument, qui ne subit pas non plus de dommages lors des bombardements ou des combats autour de la poche de Lorient. Des tentatives de relance ont eu lieu en 1950 puis en 1983, cette dernière à l'initiative de l'Union des cercles légitimistes de France ; parfois se forment de petits cortèges suivant les chapelles des différents prétendants. La basilique voisine conserve par ailleurs des vitraux où la famille royale figure près d'une chapelle consacrée à Napoléon III. Le monument a été restauré en 2012 : le mur de clôture a été en partie remonté et le jardin initialement prévu a enfin été réalisé. Le 31 mai 2015, le prince Louis de Bourbon, duc d'Anjou, et son épouse Marie-Marguerite se sont recueillis devant le monument lors d'une cérémonie. L'ensemble de la statuaire, les murs, la grille et le sol d'assiette du jardin a été inscrit au titre des monuments historiques par arrêté du 20 décembre 2019. Selon Le Télégramme, des membres de l'Alliance des cœurs unis se seraient prosternés devant le monument, allégation contestée par l'association dans un droit de réponse qui affirme qu'il s'agissait d'un autre groupe. Le monument présente une composition pyramidale de style pompier propre à la fin du XIXe siècle : un haut piédestal de granit clair, posé sur trois degrés, supporte la statue sommitale et les soubassements des statues flanquantes. La face est du piédestal porte les armoiries du royaume de France. Au sommet, la statue représente le comte de Chambord, désigné comme le roi Henri V, agenouillé, tête nue, vêtu des habits de sacre avec manteau fleurdelisé, portant les colliers de Saint-Michel et du Saint-Esprit, l'épée Joyeuse au côté et les mains jointes en prière ; la couronne est posée sur un coussin à sa droite. Aux angles du piédestal se dressent quatre statues en pied symbolisant la fidélité à la monarchie et ses vertus : Jeanne d'Arc à l'avant, sainte Geneviève à l'arrière, le chevalier Bayard à gauche et le connétable Du Guesclin à droite. Alfred Caravanniez, fidèle au courant historiciste de ses commanditaires, a soigné les détails de l'équipement et des attitudes de ces figures médiévales ; sur la figure du connétable Du Guesclin, il a placé une tête ronde évoquant celle du sénateur légitimiste Léonard Fañch Soubigou, dont il avait réalisé le buste en 1883.