Origine et histoire
L'allée couverte de Saint-Eugène, souvent qualifiée de grand dolmen à couloir, se trouve sur la commune de Laure-Minervois dans l'Aude. L'édifice a été classé au titre des monuments historiques en 1931 et restauré en 1964 sous la direction de Jean Guilaine. Orientée sud-nord, la construction mesure 16 mètres de long pour 3 mètres de largeur maximale et comprend trois parties distinctes — un couloir, une antichambre et une chambre — l'antichambre et la chambre étant séparées par une dalle-hublot médiane. Le couloir, surélevé d'environ 0,40 m par rapport à l'antichambre, s'étire sur 4 m pour 1,20 m de largeur moyenne ; l'antichambre mesure 5,60 m de long et 2,50 m de large en moyenne en s'élargissant progressivement vers le fond ; la chambre funéraire atteint 5 m de long pour 3,20 m de large. L'ensemble est bordé d'orthostates ; dans le coin nord-est, un orthostate doublé est renforcé par un support dépassant de 0,25 m du sol, tandis que les tables de couverture originelles ont disparu. Jean Guilaine a souligné qu'il s'agit plutôt d'un grand dolmen à couloir présentant un rétrécissement progressif vers l'entrée que d'une allée couverte au sens strict, c'est‑à‑dire d'une structure à largeur constante. Le monument est inscrit dans un tumulus circulaire de 22 m de diamètre, consolidé sur son pourtour par vingt dalles levées. Fouillé par Germain Sicard entre 1924 et 1928, le site a livré des ossements humains attribués à environ trois cents individus ainsi qu'un mobilier funéraire abondant comprenant des objets en cuivre (un petit poignard, deux alènes, trois anneaux), une perle d'or ovoïde, pointes de javelots en silex blanc et en silex ordinaire, lames en obsidienne, nombreuses pointes de flèches barbelées et pédonculées, objets en talc, autant de petites coquilles perforées de type porcelaine, perles en test de cardium, pendeloques, palettes en schiste vert, dents animales (sanglier, bovidés, chevaux, cervidés, petits carnassiers) et de nombreux tessons de poterie incisée. Les travaux dirigés par Jean Guilaine ont complété ces découvertes par cinquante perles en calcaire et en test de coquillage, cinq perles en stéatite, deux pointes de flèches à pédoncule et barbelure, une flèche foliacée et de nombreux tessons céramiques datés du Chalcolithique. L'ensemble du mobilier et des restes osseux est attribué à une phase charnière entre le Chalcolithique et le début de l'âge du Bronze ; le monument montre par ailleurs des indices de violation dès l'époque romaine, notamment des débris d'amphores.