Origine et histoire du Musée Alsacien
Le Musée alsacien de Strasbourg présente les arts et traditions populaires de la région du XVIIIe au XXe siècle, avec éléments d'habitat, mobilier, objets du quotidien, céramiques, costumes, objets religieux, jouets et artisanat, souvent montrés dans des reconstitutions d'intérieurs et d'ateliers. Dépositaire depuis l'origine d'une importante collection confiée par la Société d'histoire des Israélites d'Alsace et de Lorraine (aujourd'hui Société d'Étude du Judaïsme d'Alsace-Lorraine), il associe ces ensembles au fonds propre du musée pour rendre compte du patrimoine culturel juif d'Alsace. Installé sur plus de 1 600 m2 dans trois immeubles mitoyens au 23, 24 et 25 quai Saint-Nicolas, près de la place du Corbeau et au bord de l'Ill, il est partiellement inscrit aux monuments historiques. Le Musée alsacien a fermé ses portes pour travaux le 7 juillet 2025; sa réouverture est prévue en 2027.
L'idée du musée germe dans la Revue alsacienne illustrée fondée en 1898 sous l'impulsion de Charles Spindler; le projet d'un « musée ethnographique alsacien » y est évoqué dès avril 1900. L'assemblée générale fondatrice se tient le 3 novembre 1902; parmi les membres fondateurs figurent Pierre Bucher, Ferdinand et Léon Dollinger, Anselme Laugel, Fritz Kiener, Robert Forrer et Auguste Kassel. Charles Spindler, représenté par des aquarelles tirées de son ouvrage Costumes et coutumes d'Alsace, effectue les premières acquisitions du futur musée. La Société acquiert en 1904 l'immeuble du 23 quai Saint-Nicolas, choisi pour son cachet et sa situation proche du centre-ville, et le musée ouvre au public le 11 mai 1907. Des festivités populaires organisées lors de l'ouverture et l'année suivante, comme la « Kermesse paysanne » et le « Bazar Erckmann-Chatrian », reflètent l'engagement des sociétaires et leur attachement aux traditions et à la francophilie. En raison du contexte de la Première Guerre mondiale, les autorités allemandes procèdent à la liquidation de la Société du Musée alsacien; la municipalité de Strasbourg reprend l'établissement en 1917, rembourse les actionnaires et intègre le musée aux Musées de Strasbourg. Adolphe Riff est nommé conservateur et dirige le musée de 1918 à 1952; Hans Haug puis, à partir de 1958, Roger Henninger assurent la direction des musées de la ville. Sous la conservation de Georges Klein (1969-1985), le musée réorganise ses collections, multiplie les expositions thématiques et réalise l'extension dans les numéros 24 et 25 du quai Saint-Nicolas; son successeur, Malou Schneider, poursuit cet essor. Deux salles avaient été consacrées à l'œuvre du pasteur Jean-Frédéric Oberlin, dont la collection a été déposée au musée Jean-Frédéric-Oberlin à Waldersbach.
Le fonds du musée comprend près de cinquante mille œuvres, dont plus de cinq mille sont exposées, répartées autour de quelques grands thèmes. La vie domestique en Alsace est restituée par des reconstitutions de pièces, mobilier richement décoré, poêles en faïence, pan de mur de ferme et objets comme moules à kougelhopf, illustrant symboles et usages (bouquets de fleurs, grenade, cœurs, oiseaux). L'architecture à colombages, l'ossature en bois et le torchis y sont expliqués, tout comme la place centrale de la gross Stub chauffée par le poêle et reliée à la cuisine. Le chapitre « Individu et société » présente rites et étapes de la vie — naissance, communion, mariage, mort — selon les traditions catholique, protestante et juive, ainsi que documents témoignant des changements de langue et de nationalité; des collections d'objets religieux et de costumes de fête permettent d'identifier origine villageoise, statut marital et appartenance confessionnelle au premier coup d'œil. La section jeux et jouets expose une importante collection urbaine illustrant la dimension pédagogique et genrée du jeu, avec maisons et cuisines de poupées, jouets d'atelier ou militaires, trains électriques et pièces optiques telles que lanternes magiques, ainsi que des exemples de fabrication allemande et française liés aux évolutions politiques de la région. Les dernières salles rendent compte de savoir-faire traditionnels comme la viticulture — avec référence aux principaux cépages d'Alsace et à l'iconographie viticole — et la production fromagère des marcaires, évoquée par des presses et éléments de marcairerie. L'imagerie populaire, produite notamment à Wissembourg, est présentée à travers images religieuses, figurines à découper, tableaux pédagogiques et jeux imprimés, dont la fragilité du papier limite les présentations publiques.
Le musée organise également des expositions temporaires variées depuis les années 1970, couvrant la céramique populaire, les costumes, les jeux et jouets d'autrefois, l'imagerie de Wissembourg, la broderie, les rites et traditions, et des thèmes contemporains liant design et tradition. Des partenariats avec des institutions et associations locales ont rythmé son activité récente.