Origine et histoire du Musée Calvet
L'hôtel de Villeneuve-Martignan abrite la collection des beaux-arts du musée Calvet à Avignon. Sur son emplacement se trouvait la Livrée de Cambrai, nommée d'après son dernier occupant, le cardinal Pierre d'Ailly, évêque de Cambrai. En 1719 la propriété fut vendue à François-René de Villeneuve, marquis d'Arzeliers et seigneur de Martignan. En 1734, son fils Jacques-Ignace de Villeneuve fit édifier de nouveaux bâtiments sous la direction de Thomas Lainée, puis fit raser l'ensemble en 1741 pour le reconstruire selon les plans de Jean-Baptiste Franque ; les travaux s'achevèrent en 1749 au prix de la ruine du propriétaire, qui dut louer une partie du rez-de-chaussée dès 1753. Pendant la Révolution l'hôtel, dont les propriétaires avaient émigré, fut saisi comme bien national mais ne trouva pas d'acheteur. En 1801 il fut restitué à Étienne-Joseph de Raousset-Soumabre, gendre de Jacques-Ignace de Villeneuve. En 1802 le négociant Joseph-Véran Deleutre acheta l'hôtel pour 33 000 francs, y installa une industrie de moulinage de la soie, puis le loua à la ville pour y abriter les collections d'Esprit Calvet ; la municipalité l'acquit définitivement le 3 mars 1833 pour le transformer en musée. L'hôtel de Villeneuve-Martignan est classé au titre des monuments historiques depuis le 1er octobre 1963.
Esprit Calvet, grand collectionneur, légua en 1810 à sa ville natale un ensemble comprenant une bibliothèque, une collection d'histoire naturelle et un cabinet d'antiquités, à charge de créer une institution autonome et d'assurer les fonds nécessaires à leur entretien ; un décret impérial du 9 avril 1811 permit au maire d'Avignon d'accepter ce legs en faveur de la commune. Le musée Calvet, ainsi nommé en son honneur, conserve de nombreux objets issus de ce legs. Depuis les années 1980 le musée est scindé en deux sites : le musée des beaux-arts est resté dans l'hôtel de Villeneuve-Martignan, tandis que le musée lapidaire a été réimplanté dans l'ancienne chapelle du collège des Jésuites, rue de la République.
La richesse et l'importance des collections du musée sont reconnues : elles couvrent l'archéologie, les beaux-arts et les arts décoratifs — orfèvrerie, faïence, porcelaine, tapisserie, ferronnerie — ainsi que des collections d'ethnologie d'Asie, d'Océanie et d'Afrique. Le département des beaux-arts, installé dans l'hôtel, présente peintures, dessins et sculptures du XVe au XXe siècle. Parmi les peintures figurent des œuvres françaises, italiennes, espagnoles et nordiques : on y reconnaît notamment Simon de Châlons, les Mignard, Joseph Vernet, Hubert Robert, Jacques-Louis David, Élisabeth Vigée Le Brun, Horace Vernet, Jean-Baptiste Camille Corot, Théodore Chassériau, Alfred Sisley, Paul Huet, Chaïm Soutine, Pierre Bonnard et Maurice Denis, ainsi que des maîtres italiens comme Luca Giordano, Pietro della Vecchia et Giovanni Paolo Panini, et des panneaux nordiques remarquables tels que la Résurrection du Christ de Johann Koerbecke datée de 1457.
La sculpture rassemble des pièces médiévales et modernes : une Vierge de pitié et un Enfant avec chien, des éléments du tombeau de La Palice représentant trois vertus cardinales, un crucifix en ivoire de Jean-Baptiste Guillermin provenant de la chapelle des pénitents noirs, ainsi que des œuvres de James Pradier, Louis Veray, Camille Claudel et d'autres sculpteurs français. Les collections graphiques comportent principalement des dessins des écoles française et italienne — Le Lorrain, Watteau, Boucher, Natoire, Cézanne, Renoir, Morisot, Toulouse-Lautrec, Rodin et Modigliani figurent parmi les noms représentés — ainsi que des feuilles des écoles du Nord et d'Espagne.
Le mobilier et les arts décoratifs comprennent notamment une tapisserie flamande du début du XVIe siècle représentant l'histoire de David et Bethsabée, un coffre en noyer, chêne et merisier décoré des vertus théologales et cardinales, et un cabinet à peintures décoré de douze médaillons peints par Frans II Francken, daté d'après 1620 et originaire de la collection Puech, présenté comme un exemplaire rare en France.
La section d'archéologie égyptienne, formée par le legs d'Esprit Calvet, celui de Marius Clément et des achats complémentaires, comprend un sarcophage anthropoïde d'Ânkh-pa-in-di-is, un vase canope en albâtre au nom d'Iahmès, un ex-voto familial de Yaï, une table d'offrande d'Harsiési et de Pa-di-Mout, un médaillon gallo-romain représentant la tête d'Ammon et une stèle élevée au vice-roi de Nubie Setaou de l'époque de Ramsès II. Le musée lapidaire, dépendant du musée Calvet et installé dans l'ancienne église des jésuites, offre un panorama des civilisations grecque, romaine et gallo-romaine avec des pièces comme la Tarasque de Noves, un sarcophage étrusque, les guerriers gaulois de Vachères et de Mondragon et une Vénus au dauphin.
La Fondation Calvet, établissement public, est propriétaire d'une partie des œuvres du musée ainsi que de sa bibliothèque et de son médaillier ; elle assure des fonctions similaires pour le musée lapidaire, le Petit Palais, le Muséum Requien, le musée Jouve, le musée juif comtadin et le musée archéologique de l'Hôtel-Dieu de Cavaillon.