Origine et histoire du Musée
Le musée d'Ennery, annexe du musée Guimet, occupe un hôtel particulier au 59, avenue Foch dans le 16e arrondissement de Paris. Construit en deux phases, le bâtiment principal, conçu par l'architecte Pierre-Joseph Olive à partir de 1875, comprend un rez-de-chaussée ouvert par quatre arcades sur l'avenue, un premier étage et un attique. À la fin du XIXe siècle, afin d'accueillir l'accroissement des collections et de transformer la demeure en musée, les propriétaires firent agrandir les locaux : une galerie fut construite au-dessus des écuries, prolongée par une grande salle décorée de style baroque au-dessus des remises, et un pavillon destiné à une salle vint flanquer la façade sur l'avenue Foch (travaux attribués à l'architecte Lemaire avant 1894). L'intérieur présente des décors néo-classiques et baroques. La collection, léguée à l'État et rattachée à la Réunion des musées nationaux par décret du 27 octobre 1943, a donné naissance à un musée d'arts asiatiques qui dépend aujourd'hui du musée Guimet.
La collection de quelque 7 000 objets a été rassemblée dans la seconde moitié du XIXe siècle par Clémence d'Ennery (1823‑1898), qui commença ses achats dès 1859 à partir d'un fonds familial de boîtes en laque et de porcelaines « bleu‑blanc ». Ces pièces furent transférées de la maison de la rue de l'Échiquier à la « villa Desgranges », l'hôtel particulier qu'elle fit édifier avenue du Bois à partir de 1875. Passionnée par l'Asie, elle constitua une collection qui, dès 1892, comptait plus de 6 000 pièces et dont elle envisagea le don à l'État à la condition que les œuvres demeurent in situ. La validation du legs fut retardée par des contestations et n'intervint qu'en 1901 ; le musée put être inauguré le 27 mai 1908. Paul Pelliot fut conservateur en chef à partir de 1930 jusqu'à sa mort en 1945, puis Georges Coedès occupa la fonction à partir de la mi‑janvier 1947 jusqu'à son décès le 2 octobre 1969. Le rez‑de‑chaussée abrita le musée arménien de France de 1953 à 1996. Après une fermeture de seize ans pour restauration et mise aux normes, le musée rouvrit le 5 avril 2012, fut de nouveau fermé trois ans et rouvrit début 2023 ; seuls certains espaces sont accessibles sur réservation, les travaux de remise en état ayant nécessité 15 millions d'euros. Inscrit aux monuments historiques par arrêté du 11 juillet 1979, le bâtiment et notamment les vitrines conçues par le sculpteur et ébéniste Gabriel Viardot (1830‑1906) ont reçu le label musée de France.
Les collections, majoritairement d'origine chinoise et japonaise, comprennent un rare ensemble de coffres et cabinets laqués de style Namban datés des années 1580‑1590, des porcelaines émaillées de style Kakiemon dont des poupées, environ 1 500 figurines de pierre dure (netsuke), des céramiques de Kyoto du XVIIIe siècle, ainsi que des masques d'animaux et de chimères. Les bronzes et les estampes sont peu nombreux, la fondatrice privilégiant la sculpture, l'iconographie fantastique et la couleur. Certains panneaux décoratifs semblent provenir d'expositions universelles, et des éléments importés du Vietnam furent intégrés à un bâti réalisé par Gabriel Viardot. Présentées dans les vitrines d'origine aux parois incrustées de nacre, les œuvres témoignent de la passion pour l'Orient née sous le Second Empire et de son influence sur l'art et le goût occidental.