Origine et histoire du Musée de la Cohue
La porte Est de l’ancienne Cohue est ornée d’une archivolte en tiers-point aux dents de scie et de piédroits supportant des chapiteaux à fleurettes ; à côté du chapiteau droit, un chapiteau réemployé montre, aux angles visibles, une sirène aux longues nattes enserrant le motif et soutenant les branches de sa queue en croissant, séparée d’une seconde sirène par une tête de hibou. L’ensemble bâti remonte à plusieurs époques et est lié aux usages du marché et de la justice ; le premier texte localisant la Cohue date de 1416, mais l’observation du bâtiment révèle des parties antérieures au XIIe siècle. Au rez-de-chaussée, sous la salle haute, deux murs parallèles d’environ vingt mètres, distants d’environ sept mètres et limités à l’est par une reprise au pied de la double arcade, appartiennent à l’époque romane, de même que des murs côté sud donnant sur la rue des Halles et des contreforts romans du grand mur sud. Une campagne de travaux datable de la fin du XIIe ou du début du XIIIe siècle est attestée par les pierres de taille de la façade Est et par l’extension vers l’est, que Dégez suppose symétriquement doublée vers l’ouest. Au XIVe siècle, les murs centraux sont percés de quatre arcades en tiers-point, en vis-à-vis par paires ; l’arcade sud-ouest a été remplacée au XIXe siècle par une baie en plein cintre. L’étage a été élevé en deux phases : la plus ancienne, contemporaine des travaux du XIVe siècle, correspond à une petite salle rectangulaire mentionnée au XVIIe siècle comme salle du conseil, dont la cheminée et la disposition des pierres confirment la datation. La grande salle dite du Présidial, construite transversalement à la nef et aux bas-côtés, est attribuée au milieu du XVe siècle d’après ses murs pignons et ses fenêtres à coussièges ; toutefois, la restauration des années 1970 a mis au jour une première élévation en torchis et colombage, semblable au mur ouest de la salle du conseil construit en charpente et gros poteaux. En 1653, d’après les plaids généraux du Présidial, cette salle haute fut profondément modifiée par la construction de murs transversaux en maçonnerie remplaçant la structure initiale à colombage ; la charpente, initialement du XVe siècle, a été reprise à cette époque avec réemploi d’éléments antérieurs, probablement d’une charpente apparente à chevrons et fermes déjà signalée en 1636. Ces travaux comprenaient également la couverture des bas-côtés de la halle centrale, jusque-là ouverts. Les vestiges d’un escalier d’accès à la salle restent visibles dans le mur droit du vestibule, qui a conservé deux balustres plats encastrés ; la disposition en équerres de cet escalier apparaît sur un plan du XVIIIe siècle où cet accès est nommé « peron ». Pendant la Révolution, la Cohue servit de tribunal civil. Au XIXe siècle, la façade ouest fut entièrement remaniée en 1819 selon le plan d’alignement de 1787, et la création d’un « théâtre civique » après la Révolution entraîna la construction d’un escalier droit vers la rue des Halles pour l’entrée du théâtre. Les restaurations des années 1970 ont ajouté un escalier en béton côté ouest formant un second accès à la salle de l’étage et ont restitué des volumes intérieurs altérés par des aménagements successifs. Depuis le Moyen Âge la Cohue, terme d’origine bretonne désignant les halles, appartenait au duc de Bretagne ; sa partie la plus ancienne remonte au XIIIe siècle et l’édifice a été agrandi aux XIVe et XVIIe siècles. Située face à la cathédrale Saint-Pierre, la Cohue abritait au rez-de-chaussée le marché et des échoppes, tandis que l’étage accueillait le palais de la justice ducale jusqu’en 1796 ; à partir de 1675, le parlement de Bretagne exilé y tint séance, et les États de Bretagne s’y réunirent à dix reprises entre 1431 et 1703. Devenue propriété de la ville en 1813, la Cohue fut transformée en théâtre actif jusque dans les années 1950, puis restaurée à partir de 1970. Depuis 1982, le bâtiment abrite le musée des Beaux-Arts de Vannes, dit musée de la Cohue ; il est inscrit au titre des monuments historiques depuis 1929 et le musée est labellisé « Musée de France ». Les collections municipales exposées comprennent des peintures du XIXe et XXe siècles, avec notamment un espace permanent consacré à Geneviève Asse depuis 2013, ainsi que des œuvres de Delacroix, Joseph-Félix Bouchor, Jean Frélaut, Henry Moret, Jules Noël, Flavien-Louis Peslin et d’autres peintres. Le musée conserve aussi un ensemble de sculptures en bois polychrome des XIVe et XVIe siècles, des pièces d’orfèvrerie et des meubles du XVIIIe siècle, des objets d’art décoratif et un fonds d’estampes des XIXe et XXe siècles, dont dix-huit estampes de Jean Urvoy. Depuis 1982, ses expositions temporaires explorent la création plastique contemporaine en présentant notamment des artistes comme Pierre Buraglio, Olivier Debré, François Morellet, Aurélie Nemours et Jean-Pierre Pincemin.