Origine et histoire du Musée de la Mer
Le Fort Royal, édifié sur l'île Sainte-Marguerite, trouve ses origines dans un logis avec tour et cage d'escalier construit par Jean de Bellon après 1618. Des travaux de fortification ont été réalisés ultérieurement, probablement entre 1624 et 1627, peut‑être sous la direction de Jean de Bonnefons, et la première attestation d'un fort date de 1634. En 1635 l'île est occupée par les Espagnols, qui reconstruisent et renforcent l'enceinte selon un plan signé El Ing. Honofre Antonio Giralso, aménageant bastions, fossés et chemins couverts. Reprise par les Français en 1637 après un siège, la place fait l'objet de travaux successifs pour améliorer son enceinte et ses batteries. Au milieu du XVIIe siècle, d'après des projets de François Blondel et de Pierre de Bonnefons, deux demi‑lunes sont ajoutées et la porte dite « Royale » est aménagée, accessible par des ponts maçonnés, la porte marine étant protégée par un ouvrage triangulaire. Vauban, qui visite la place à plusieurs reprises à la fin du XVIIe siècle, formule des propositions d'amélioration ; plusieurs d'entre elles sont mises en œuvre sous la direction d'Antoine Niquet entre 1693 et 1700, notamment un magasin à poudre, l'amélioration du chemin couvert et l'achèvement de la partie supérieure de la porte Royale. À partir de 1685 le fort est utilisé comme prison d'État et une aile de cellules est construite entre 1689 et 1691 sous le contrôle de Jean‑Louis de Cayron par des entrepreneurs d'Antibes. Bénigne Dauvergne de Saint‑Mars y est nommé gouverneur en 1687 et y conduit, parmi d'autres détenus célèbres, l'homme dit « au masque de fer ». Après la révocation de l'édit de Nantes, le Fort Royal sert aussi de lieu d'enfermement pour des protestants ; un mémorial huguenot, aménagé depuis 1950 dans une ancienne cellule, rappelle la mémoire de six pasteurs condamnés à la détention à vie pour « crime de religion ». Aux XVIIIe et XIXe siècles, le fort alterne fonctions militaires, carcérales et de casernement : une nouvelle aile de casernes est ajoutée en 1720, des réparations ponctuelles sont réalisées, et le château est restauré dans les années 1830 pour recevoir une importante détention. Des travaux sur les abords et les batteries sont effectués entre 1840 et 1861, la batterie de la Convention étant reconstruite en 1860 d'après un projet du chef de bataillon Quiot, et la tour du château est transformée en sémaphore en 1862 ; le fort perd cependant sa vocation carcérale au début du XXe siècle, l'armée le quittant avant son classement au titre des monuments historiques. L'île est occupée depuis l'Antiquité : des fouilles menées dans les années 1970‑1980 ont mis au jour des vestiges datés du Ve siècle av. J.‑C., des citernes romaines et un laconium, et des campagnes archéologiques engagées à partir de 1973 ont permis l'ouverture d'un musée consacré aux découvertes sous‑marines et terrestres en 1978. Le fort, classé en 1927, a été acquis par la ville de Cannes en 1996 ; le Musée de la Mer y est installé et, depuis 2020, présente le musée du Masque de fer et du Fort Royal, l'île abritant par ailleurs un centre international de séjour pour la jeunesse. Parmi les découvertes sous‑marines figure le canon dit « L'Inconnu », retrouvé en 1995 au nord de l'île à 41 m de profondeur : en bronze, de calibre 24 livres et pesant 2 800 kg, il porte la marque du fondeur Antoine de Bercan (Strasbourg, 1715) ainsi que les armoiries royales et des devises ; conçu pour la tactique de siège, il pouvait théoriquement envoyer un boulet d'environ 12 kg jusqu'à quelque 4 km, son efficacité réelle en tir tendu se situant plutôt autour de 500 mètres. Dans le cadre de la Mission Patrimoine 2024, une aide de 300 000 euros est attribuée pour contribuer à la restauration du fort, qui accueille environ 80 000 visiteurs par an.