Origine et histoire du Musée des beaux-arts et d'archéologie
Le musée des Beaux-Arts et d'Archéologie Joseph-Déchelette, couramment appelé musée Joseph-Déchelette, est le musée municipal de Roanne. Selon une notice rédigée par Joseph Déchelette en 1895, le musée naît de l'initiative de l'archéologue roannais Fleury Mulsant, qui souhaitait conserver et exposer les vestiges antiques découverts sur le sol local ; avec l'appui du maire Gubian, il est inauguré le 8 novembre 1844 dans le couvent des Capucins. F. Mulsant dirige le musée jusqu'à son décès en 1850 ; en 1874 il est transféré dans le nouvel hôtel de ville où il dispose d'une galerie et de quatre salles, et se développe grâce aux envois de l'État, aux donations et aux acquisitions, dont la plus importante est la collection de faïences du docteur Noëlas. Le nombre croissant d'objets rend rapidement le musée limité en surface ; Joseph Déchelette est nommé conservateur en 1892, puis meurt au combat en 1914 en léguant ses collections et sa bibliothèque. Sa veuve donne à la ville son hôtel particulier, qui accueille le musée au premier étage lors de l'inauguration du nouvel emplacement le 3 juin 1923 en présence de personnalités telles que Paul Léon et des membres du Collège de France ; après le décès de Madame Déchelette, le musée occupe l'ensemble du bâtiment, qui est inscrit au titre des monuments historiques le 10 avril 1981.
Les collections archéologiques présentent le patrimoine régional protohistorique et antique issu des découvertes autour de Roanne, un site occupé dès la fin de l'époque gauloise (IIe siècle av. J.-C.). Une section consacrée au Roannais gaulois montre, par des maquettes de l'oppidum du Crêt-Châtelard et par le mobilier découvert depuis la fin du XIXe siècle, des éléments de la vie quotidienne comme la parure, la vaisselle et les échanges ; des fragments de poteries décorées de motifs zoomorphes et deux statuettes en bronze trouvées à Jœuvres, un cheval et un sanglier, figurent parmi les chefs-d'œuvre de l'art celte. La nécropole roannaise, occupée sans interruption du IIe siècle avant au IIIe siècle de notre ère, est reconstituée pour illustrer les modes d'inhumation et d'incinération ainsi que le mobilier funéraire. Une salle rend hommage à Joseph Déchelette, conservateur de 1892 à 1914 et premier à entreprendre de véritables fouilles dans le sous-sol roannais, ouvrant ainsi la vocation archéologique du musée.
À l'époque romaine, Feurs (Forum Segusiavorum) est doté de monuments, tandis que Roanne (Rodumna), deuxième ville du pays, ne semble pas posséder de grands édifices ; un ensemble remarquable de bols peints dits « de Roanne » témoigne toutefois de la qualité d'une production locale aux deux premiers siècles de notre ère. Les collections montrent également la présence de sigillées venues des ateliers du Sud (La Graufesenque) et du Centre (Lezoux) ainsi que de copies locales plus tardives, tandis que céramiques fines et terra nigra illustrent la diversité des poteries utilisées par les Galloromains roannais. Les découvertes documentent enfin un artisanat varié — production de céramique commune et peinte, travail du bronze et du fer et peut-être du verre — et permettent d'étudier la construction, les instruments, l'écriture, la parure, la toilette, les jeux, la religion et d'autres pratiques culturelles.
La collection d'archéologie égyptienne est étroitement liée à Joseph Déchelette : profitant d'un voyage d'affaires en Égypte en 1893, il achète un important lot d'environ deux cent cinquante pièces, parmi lesquelles se trouvent la momie de Nesyamon et son sarcophage, et présente cet ensemble au public roannais avant de le léguer à la ville. Ce fonds a ensuite été enrichi par des dons, achats et dépôts, dont celui de Philip Whiteway, et constitue aujourd'hui la deuxième collection d'égyptologie en Auvergne-Rhône-Alpes après celle du musée des Beaux-Arts de Lyon. La collection comprend des objets de périodes et de cultures variées : la momie et son sarcophage, deux masques de momie d'époque gréco-romaine, le sarcophage de Tjesisetperet (XXIIIe-XXVIe dynasties, vers 820 av. J.-C.), plusieurs fragments internes de sarcophages en bois de sycomore, ouchebtis, amulettes, vases canopes et un appui-tête funéraire de l'Ancien Empire (IVe dynastie), ainsi que des stèles votives du Moyen Empire parfois polychromes, des statuettes de divinités en bronze de la Basse époque et des objets de la vie quotidienne comme pots à khôl, miroirs et épingles à cheveux. Pour des raisons de conservation, la collection égyptienne n'est pas actuellement exposée ; un projet de rénovation ou d'extension du musée pourrait permettre sa réexposition.
Les collections de Beaux-Arts comprennent des peintures françaises et européennes du XVe au XXe siècle, allant des primitifs italiens et espagnols aux peintres fauves, en passant par les paysagistes de l'école de Barbizon et lyonnaise, ainsi que des peintres flamands et français ; la présentation, qui va de Nicolas de Largillierre à Jean Puy, s'achève sur la période fauve avec des œuvres de Friesz, Marquet et Dufy. Les sculptures réunissent des pièces médiévales et du XIXe siècle, ainsi que des œuvres de sculpteurs roannais comme Lescornel et Picaud. Les arts décoratifs offrent une collection de céramiques du XVIe au XXIe siècle parmi les plus riches de province, avec un bel ensemble de majoliques et de faïences italiennes du XVIe au XVIIIe siècle, des faïenciers de Delft, les principaux centres français (Lyon, Moustiers, Marseille, Strasbourg, Niderviller, Sceaux, Rouen) et les ateliers du centre de la France (Clermont, Moulins, Nevers), ces derniers étant particulièrement remarquables pour le XVIIe siècle. Un espace important est consacré à la faïence de Roanne du XVIIe au début du XXe siècle, où se distingue la production patronymique qui associe le nom d'un individu à l'effigie de son saint protecteur et servait d'objet de transmission familiale ; la collection unique de faïences révolutionnaires, près de sept cents pièces, constitue le plus riche ensemble français de ce type et a été inaugurée le 23 juin 1989 par le président de la République François Mitterrand lors du bicentenaire de la Révolution. Les collections modernes et contemporaines montrent les recherches des potiers entre XIXe et XXe siècles, du japonisme représenté par Gallé, Bracquemond, Rousseau, Chaplet, Lachenal ou Moreau-Nélaton à l'influence orientale de Deck ou Lachenal, tandis que des porcelaines de Sèvres illustrent le raffinement naturaliste de l'Art nouveau ; la période de l'entre-deux-guerres est évoquée par des pièces de Decoeur, Mayodon, Buthaud et Gensoli, et l'ouverture au monde céramiste contemporain se fait par des acquisitions successives et une biennale consacrée aux artistes vivants.