Origine et histoire de l'Opéra
L'Opéra de Lille, bâtiment de style néo‑classique inspiré des théâtres à l'italienne, a été construit entre 1907 et 1913 par l'architecte Louis‑Marie Cordonnier en béton armé et inauguré officiellement en 1923. Il succède à une salle antérieure conçue par Michel Lequeux, ouverte en 1787 après des travaux commencés en 1785, qui fut ravagée par un incendie en 1903. Après l'incendie, la ville fit édifier en urgence un théâtre provisoire place Sébastopol, œuvre de Léonce Hainez, puis lança un concours remporté par Cordonnier. Le nouvel opéra a été bâti en retrait de l'ancien emplacement, sur un sol instable nécessitant l'enfoncement d'environ 1 050 pieux en béton et l'emploi du procédé Hennebique pour le béton armé, habillé de pierres de Soignies et de Savonnières. Sa façade Beaux‑Arts, lumineuse et richement ornée, comporte trois travées et un décor conçu par Cordonnier, couronné par un grand groupe sculpté de Hippolyte Lefèbvre illustrant la Glorification des Arts autour d'Apollon et de neuf muses. Deux reliefs encadrent les baies : à gauche une allégorie de la musique par Alphonse‑Amédée Cordonnier, à droite la tragédie par Hector Lemaire. Occupé par les troupes allemandes dès 1914, l'édifice fut partiellement réquisitionné et inauguré provisoirement lors de représentations en 1915, mais les décors et machineries furent en grande partie détruits lorsque les troupes quittèrent les lieux en 1918 ; l'inauguration française ne put avoir lieu qu'en 1923. Au cours du XXe siècle, l'activité lyrique de Lille connut des hauts et des bas : après une renaissance difficile au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la ville vécut des périodes florissantes sous la direction de Maurice Cottinet puis d'Alexandre Vanderdonckt, accueillant de nombreuses productions nationales et invités prestigieux. À la fin des années 1970 l'activité s'essouffla, puis l'Opéra de Lille fut associé au ballet du Nord et à l'atelier lyrique de Tourcoing pour former l'Opéra du Nord en 1979 ; ce projet rencontra d'abord le succès public mais échoua en 1985 pour des raisons financières et politiques. Retrouvant son indépendance, l'Opéra connut plusieurs fermetures et renaissances ponctuelles dans les années 1980 et 1990, avec des saisons marquées par des productions lyriques, des récitals de grandes voix et des concerts dirigés par des chefs renommés. En 1998, l'édifice fut fermé pour mise en conformité de la sécurité, puis rénové selon un projet confié aux architectes Patrice Neirinck et Pierre‑Louis Carlier, avec les conseils acoustiques de Peutz et la scénographie de dUCKS. La réouverture, anticipée fin 2003 pour l'événement Lille 2004, s'accompagna d'une programmation renaissante : Don Giovanni ouvrit la saison lyrique de 2004, suivi de Madame Butterfly. Depuis, sous la direction de Caroline Sonrier, l'Opéra de Lille a développé un projet d'ouverture aux répertoires, à la création contemporaine, aux artistes émergents et à des publics divers, en tissant des partenariats durables avec des ensembles et orchestres comme le Concert d'Astrée, l'Ensemble Ictus, l'Orchestre National de Lille, l'Orchestre de Picardie et Le Balcon. Le Chœur de l'Opéra, créé en 2003 et dirigé par Yves Parmentier, réunit selon les productions de 26 à 36 chanteurs professionnels non permanents, majoritairement régionaux, et participe aux productions ainsi qu'aux Concerts du Mercredi. La production de Carmen en 2010, avec Stéphanie d'Oustrac, fit l'objet d'éloges médiatiques, et en 2017 l'établissement reçut l'appellation de Théâtre lyrique d'intérêt national. Le bâtiment, inscrit à l'inventaire des monuments historiques en 1999, fonctionne aujourd'hui comme établissement public de coopération culturelle depuis le 1er janvier 2008 et est membre de la Réunion des opéras de France, de RESEO et d'Opera Europa ; il est desservi par les stations de métro Gare Lille‑Flandres et Rihour.
Le vestibule s'ouvre sur l'escalier d'honneur, encadré par deux escaliers desservant le parterre et les galeries ; il est orné des statues L'Idylle de Jules Déchin et La Poésie de Charles Caby et conduit à un palier distribuant la grande salle. Le grand foyer, qui occupe toute la longueur de la façade et comprend cinq baies vitrées, est décoré d'un plafond peint par Georges Picard, de deux tableaux ovales représentant la Musique et la Danse, de grands groupes sculptés de Georges Armand Vérez, de l'allégorie de la Paix d'Edgar Boutry et des Trois Grâces de Gustave Crauk. La salle, de type italien et couverte d'une coupole, offre 1 138 places réparties entre un parterre, une fosse d'orchestre, six loges d'avant‑scène et quatre galeries ; son décor rouge et or comprend des sculptures d'Edgar Boutry représentant la Danse, la Musique, la Tragédie et la Comédie, des cariatides des saisons et une allégorie à la Glorification des Arts surmontée de la devise Ad alta per artes. La coupole est entourée de huit médaillons peints par Georges Dilly et Victor Lhomme ; en 1973 la fosse d'orchestre fut élargie pour accueillir environ cent musiciens et l'accès au parterre fut réaménagé par la suppression de l'allée centrale au profit d'allées latérales. Le plateau, d'environ 450 m2 et entièrement refait lors de la rénovation de 2001, mesure 18,40 mètres de long sur 28 mètres de large et précède les loges, les foyers des interprètes et les bureaux ; l'Opéra dispose par ailleurs d'un foyer inférieur de 200 places. Sous la salle, la Rotonde, ancien bar‑fumoir de forme circulaire entourée de colonnes, accueille à son entrée la Petite Danseuse sculptée par Hippolyte Lefèbvre.