Origine et histoire de l'Oppidum d'Ambrussum
Ambrussum est un site archéologique sur la commune de Villetelle (Hérault), entre Nîmes et Montpellier, connu pour son oppidum et son agglomération gallo‑romaine ainsi que pour le pont Ambroix franchissant le Vidourle. L'origine du toponyme Ambrussum reste incertaine : la racine ambr‑, fréquente en Gaule, en Espagne et en Italie, pourrait relever d'un substrat pré‑indoeuropéen, et Plutarque signale un ethnonyme voisin, les Ambrones. Le nom est par ailleurs attesté dans l'Antiquité par des monnaies frappées AMBR en caractères grecs et latins, par des gobelets de Vicarello mentionnant Ambrussum/Ambrussio, par l'Itinéraire d'Antonin, la table de Peutinger et d'autres itinéraires. Le site occupe la colline du Devès et la plaine bordant le Vidourle, position qui lui permettait de contrôler les axes de circulation entre les Cévennes et la Méditerranée. Il se développe en deux entités distinctes : l'oppidum sur la colline et, en contrebas, une station routière liée à la voie Domitienne. Rattachée à la cité des Volques Arécomiques dont Nîmes est le chef‑lieu, l'agglomération a cependant frappé sa propre monnaie et présente des indices de droit latin ou romain dans des inscriptions funéraires. L'occupation du sommet du Devès remonte au Néolithique final et se poursuit au Bronze et au premier Âge du fer, comme l'attestent outils en silex, céramiques, une fibule d'origine italique et des tessons d'amphore étrusque et de vaisselle grecque. L'oppidum se structure à la période de La Tène avec un premier rempart à tours quadrangulaires, puis un second rempart à tours rondes incorporant des éléments antérieurs ; ces fortifications, restaurées au IIe siècle av. J.-C., servent à la fois de défense et de marqueur social. Une nécropole à incinération installée en zone basse livre plusieurs tombes d'enfants et d'adultes, et des découvertes d'armes gauloises en aval suggèrent une extension funéraire vers le pont. À l'époque gallo‑romaine, la ville haute est traversée par une artère pavée identifiée comme le tracé de la voie Domitienne au moins au Ier siècle apr. J.-C.; cette rue, étroite et pentue, débouche sur un forum portique daté du Ier siècle. Sous Tibère, le rempart sommitale sert de dépôt d'objets votifs ; des maisons de type domus, occupées de la seconde moitié du Ier siècle apr. J.-C. jusqu'à l'abandon, ont été mises au jour. La voie Domitienne assure les échanges est‑ouest et permet l'importation de produits éloignés, tels que huiles et saumures de Bétique ou vins d'Italie du Sud et d'Afrique. Le quartier bas, station routière développée sous Auguste, s'organise autour d'une rue parallèle au fleuve et comprend plusieurs îlots d'étape construits autour de cours, des boutiques, des auberges, un établissement thermal alimenté par quatre puits et des bâtiments rehaussés pour se protéger des crues. Un îlot augustéen a livré une remise riche en objets métalliques et monnaies, des installations agricoles et métallurgiques (moulin à bras, grand foyer, four), indiquant une double fonction d'étape et d'exploitation, tandis qu'un autre îlot de plan orthonormé paraît résidentiel et montre des réoccupations jusqu'à la seconde moitié du IVe siècle apr. J.-C. Une grande hôtellerie de près de 1000 m2, interprétée comme liée au cursus publicus, offrait des prestations pour une clientèle officielle. Le site a livré un autel votif dédié à Fortuna et la « maison de charron », forge spécialisée dans la réparation des véhicules ; la présence d'armes suggère aussi une possible garnison de contrôle. L'abandon du quartier commence entre la fin du IIe et le IIIe siècle apr. J.-C., avec une réorganisation de l'hôtellerie au IVe siècle et un départ définitif des occupations au Ve siècle. Le pont Ambroix a durablement marqué la réputation du lieu ; après l'Antiquité il reste utilisé, l'église Sancte Marie de Ponte Ambrosio y étant attestée au XIIe siècle et des bâtiments médiévaux repérés lors des fouilles. La voie Domitienne est progressivement délaissée au profit de tracés voisins et le pont subit des destructions liées aux récupérations de matériaux et aux crues, comme l'attestent des actes notariaux. Les premières connaissances modernes proviennent de dessins et plans aux XVIIe‑XVIIIe siècles, de fouilles au XIXe siècle puis d'opérations plus systématiques après 1967, dirigées notamment par Jean‑Luc Fiches (1969–1985) et Maxime Scrinzi à partir de 2016, avec des campagnes poursuivies en 2019‑2020. L'ensemble de l'oppidum est classé au titre des monuments historiques depuis le 26 février 1974 ; un parcours archéologique, des visites guidées et un musée archéologique gratuit, ouvert en 2011, assurent la valorisation et l'accueil du public.