Origine et histoire
L'oppidum de Saint‑Blaise, classé au titre des monuments historiques depuis le 16 septembre 1943, est un site archéologique majeur de la Méditerranée occidentale, situé sur la commune de Saint‑Mitre‑les‑Remparts, près de Fos‑sur‑Mer (Bouches‑du‑Rhône). Établi à l'extrémité nord du plateau de Castillon, il domine la mer, l'étang de Berre et la Crau, entre les étangs de Citis et de Lavalduc, dans un environnement naturel et historique remarquable. Le sel extrait de ces étangs est vraisemblablement à l'origine de l'implantation humaine sur ce promontoire. Le site occupe 5,5 hectares répartis sur deux plateaux séparés par une quinzaine de mètres de dénivelé : la Ville‑Basse, autour de 50 mètres d'altitude, et la Ville‑Haute ou Citadelle, culminant aux environs de 65 mètres. Ses falaises verticales, hautes de 30 à 50 mètres selon les secteurs, assurent une défense naturelle complétée par une enceinte hellénistique monumentale. Les traces d'occupation humaine remontent au Ve millénaire av. J.-C., et des abris et sites périphériques témoignent d'une fréquentation plus ancienne autour des étangs. Sur cet oppidum celto‑ligure, des commerçants étrusques ont établi au VIIe siècle av. J.-C. un comptoir tourné vers l'exploitation et le commerce du sel, période qui voit la cité prospérer et rivaliser un temps avec Marseille. Le site est habité de façon intermittente jusqu'au XIVe siècle, les derniers habitants ayant quitté la vieille cité pour s'installer à Saint‑Mitre en 1390. La séquence stratigraphique actuelle, organisée en huit couches, restitue une longue histoire du Néolithique aux occupations médiévales et paléochrétiennes. Les phases archaïques (650‑475 av. J.-C.) révèlent une activité proto‑urbaine intense avec importations étrusques et grecques, des niveaux d'incendie et la mise en place d'un rempart primitif. Au IIe siècle av. J.-C., de vastes travaux urbains et un plan d'inspiration hippodamienne modifient l'habitat, suivis d'un aménagement monumental de l'enceinte à l'époque hellénistique. La fortification hellénistique, qui reprend et monumentalise le tracé archaïque, constitue le monument le plus imposant du site : elle s'étend sur plus de 400 mètres, comprend onze courtines ponctuées de bastions et de tours quadrangulaires et comporte une porte charretière ainsi que plusieurs poternes. Trois systèmes défensifs se superposent sur certains secteurs : un rempart archaïque, un parement hellénistique en grand appareil et un rempart paléochrétien avec tours arrondies ou quadrangulaires. Les fouilles, signalées dès le XVIIIe siècle, ont été menées de façon systématique par Henri Rolland à partir de 1935, qui a dégagé remparts, quartiers et monuments jusqu'en 1970, puis poursuivies par de nombreux spécialistes et équipes universitaires. Les recherches ont mis au jour une grande diversité de vestiges domestiques et artisanaux, dont des quartiers de la Ville‑Basse et de la Ville‑Haute, des celliers, des ateliers métallurgiques supposés, la Maison des Jarres et la Maison du Fondeur. Un mobilier abondant, essentiellement céramique, est répertorié (environ 15 000 pièces) et les collections sont désormais conservées à Martigues. Des indices matériels et architecturaux ont aussi permis d'envisager l'existence d'un sanctuaire indigène comparable à d'autres sites de Provence : on note notamment le réemploi de trois éléments de piliers porte‑crânes et la présence d'un tumulus de cendres dégagé contre le rempart, que Rolland a interprété comme un possible foyer cultuel, interprétation aujourd'hui nuancée. Les édifices cultuels identifiés comprennent une basilique paléochrétienne (appelée parfois Saint‑Vincent ou Saint‑Pierre) remarquable par sa nef unique, son abside surélevée et son pavement de mosaïque, ainsi que la chapelle romane Notre‑Dame de Castelveyre, devenue chapelle Saint‑Blaise, remaniée aux XIIIe et XVIe siècles et restaurée au XIXe siècle. Henri Rolland a également fouillé une vaste nécropole rupestre et d'inhumations autour de l'oppidum, avec près de 300 tombes creusées dans le roc et datées principalement des Ve‑VIe siècles apr. J.-C. par typologie et mobilier. La géologie de l'éperon montre des formations burdigaliennes et un entablement d'Helvétien gréseux, tandis que le sous‑sol offre des sources d'eau douce captées et aménagées, comme la Source de la Tourtoulane, et d'autres captations alimentant des fontaines et, peut‑être, des installations riveraines. Le toponyme du site reste incertain : des rapprochements avec des noms anciens tels que Mastramela, Mastramellè ou Ugium sont discutés dans la littérature, Ugium figurant dans des titres médiévaux correspondant aux occupations tardives. Aujourd'hui protégé au titre des monuments historiques et de la loi sur les sites, Saint‑Blaise est classé dans des zones ZNIEFF et intégré au réseau Natura 2000 ; la Communauté d'agglomération du pays de Martigues a mené l'inventaire des collections et engagé des actions de mise en valeur pour permettre au public de mieux connaître l'importance du site.