Période
3e quart XIXe siècle
Patrimoine classé
Palais, à l'exception des parties classées (cad. A 35) : inscription par arrêté du 1er octobre 1974 - Façades et toitures ; bassins ; escaliers, balustrades et sculptures ; au musée des Beaux-Arts : escalier d'honneur avec son décor ; au muséum : escalier d'honneur avec son décor, salle Provence avec son décor et ses vitrines, décors peints de Raphaël Ponson au premier étage (cad. A Cinq-Avenues, 4e arrondissement, 35) : classement par arrêté du 18 novembre 1997 - Sol des parcelles A 35, 65, 33 et 31 ; sur ces parcelles : l'ensemble des aménagements du XIXe siècle et de la première moitié du XXe siècle ; bassins filtrants situés sous le jardin du Plateau ; canal de Marseille, dans sa partie allant du boulevard Flammarion jusqu'aux bassins filtrants (cad. A Cinq-Avenues, 4e arrondissement, 31, 33, 35, 65) : classement par arrêté du 8 septembre 1999
Origine et histoire du Palais Longchamp
Le Palais Longchamp, situé dans le quartier Cinq-Avenues du 4e arrondissement de Marseille, est un ensemble néo-classique du Second Empire formé autour d'un monumental château d'eau. Il matérialise l'aboutissement du canal de Marseille, long de 85 km, qui amène les eaux de la Durance jusqu'à la ville. Conçu par l'architecte Henri Espérandieu et construit entre 1862 et 1869, le palais réunit le château d'eau central, le musée des Beaux-Arts à gauche et le Muséum d'histoire naturelle à droite, reliés par une colonnade semi-circulaire. Le site est inscrit aux monuments historiques depuis le 1er octobre 1974 et classé depuis le 18 novembre 1997 et le 8 septembre 1999 ; il comprend un observatoire, des jardins et l'ancien parc zoologique. Inauguré en 1869, le palais s'organise en terrasses successives ornées de cascades, bassins et fontaines dont l'élément central est le château d'eau, monument commémoratif célébrant l'eau apportée par la Durance. Le décor sculpté associe motifs traditionnels tels que nymphées, dauphins et tritons à des éléments régionaux comme des taureaux de Camargue, poissons et crustacés, réalisés par des sculpteurs parisiens et locaux, parmi lesquels Antoine‑Louis Barye, Jules Cavelier et Eugène‑Louis Lequesne. Le programme iconographique et ornemental se déploie particulièrement sur l'arc de triomphe du château d'eau, qui présente une frise de tritons, des colonnes composites, des canéphores et un nymphée abritant un bassin et des cariatides symbolisant les eaux souterraines. Sur la face antérieure du dôme figurent une trirème et les armes de la ville encadrées de sirènes; sur les faces externes sont gravés, dans des cartouches, les noms de plusieurs affluents de la Durance. Le groupe central de la fontaine, œuvre de Jules Cavelier, représente un char tiré par quatre taureaux de Camargue portant trois figures féminines allégoriques — la Durance, le blé et la vigne — accompagnées d'enfants; l'eau se déverse ensuite en cascade vers le bassin inférieur. L'entrée se fait par deux portails symétriques encadrés de piédestaux supportant quatre statues d'animaux sculptées par Barye, aujourd'hui très abîmées par l'érosion et la pollution atmosphérique. Les allées suivent la courbe du bassin d'accueil et mènent à deux escaliers d'honneur qui conduisent à la terrasse desservant les musées. Les jardins sont indissociables du monument : outre des parterres autour du bassin principal, deux vastes espaces complètent l'arrière du palais, un jardin botanique au niveau du bâtiment et un ancien jardin zoologique en contrebas. Le jardin zoologique, créé au milieu du XIXe siècle, occupa jusqu'à cinq hectares après agrandissement et abritait des milliers d'animaux, dont des oiseaux, mammifères, grands fauves et primates ; de nombreux spécimens naturalisés ont ensuite enrichi les collections du Muséum et de la Faculté des Sciences. L'accès entre le plateau et le zoo se faisait par un escalier et une cascade aménagés par l'ingénieur du canal, et plusieurs aménagements historiques subsistent encore, comme des cages et abris aux styles évoquant les pays d'origine des animaux. En proie à des difficultés financières récurrentes, le zoo ferma définitivement en 1987 ; pour les fêtes de Marseille‑Provence 2013 le parc fut restauré et des animaux en fibre de verre décorés par des artistes y furent exposés. Le Muséum d'histoire naturelle, placé sous la tutelle du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, a reçu le label musée de France en 2002. Les deux musées, symétriques et conçus en concertation avec leurs conservateurs, présentent des façades ornées de médaillons, frises et inscriptions honorant des figures des sciences naturelles et des arts, mais leurs surfaces se révélèrent rapidement insuffisantes pour accueillir l'accroissement des collections. La colonnade semi-circulaire qui relie les bâtiments comporte une balustrade sommitale et une frise sculptée des douze signes du zodiaque, six de chaque côté, œuvre de Gilbert. Le Palais Longchamp est le résultat d'un long processus de conception engagé dès le début du canal : après des projets successifs, dont des propositions de Pascal Coste, Jean‑Charles Danjoy et Auguste Bartholdi, la municipalité confia la réalisation à Henri Espérandieu en 1861. Bartholdi contesta ultérieurement certaines parties du projet et engagea des actions en justice, mais le tribunal débouta ses revendications et ses recours ultérieurs furent sans succès. Espérandieu adapta son projet à un programme précis exigeant un château d'eau à 73 mètres d'altitude, des cascades visibles depuis le boulevard Longchamp, deux musées et deux jardins ; malgré une demande municipale de réduction des surfaces, il conserva l'essentiel de son plan et dirigea les travaux jusqu'à l'inauguration. Une médaille gravée par Louis Merley commémore l'ouverture du Palais Longchamp. Le site reste aujourd'hui desservi par les stations Cinq Avenues et Longchamp. La richesse sculpturale, la mise en scène de l'eau et l'articulation entre architecture, jardins et musées font du Palais Longchamp un témoignage majeur des ambitions urbaines et culturelles de Marseille au XIXe siècle.
