Origine et histoire de la Bibliothèque de l'Arsenal
Fondé au XVIe siècle pour centraliser les dépôts de poudre et de munitions, l'Arsenal perdit progressivement sa vocation militaire au fil du temps. En 1599, Sully, nommé grand maître de l'artillerie, fit agrandir les bâtiments ; son successeur fit décorer des appartements par Quillerier, élève de Vouet. À la fin du XVIIe siècle, l'Arsenal servit de résidence à des artistes et à des savants logés par le roi. Au XVIIIe siècle, le duc du Maine fit agrandir et embellir l'ensemble sous la direction de l'architecte Germain Boffrand ; le grand logis de Sully fut conservé mais masqué par un nouveau corps de bâtiment resté partiellement inachevé. En 1757, René d'Argenson, marquis de Paulmy, administra l'Arsenal et y réunit une importante collection de livres, manuscrits et estampes. Il acquit notamment la collection du duc de La Vallière et, après une cession au comte d'Artois, les biens de l'Arsenal furent placés sous séquestre à la Révolution. Les décrets de 1792 firent du dépôt de livres un bien national ; la bibliothèque reçut alors les archives de la Bastille et d'autres fonds et fut ouverte au public le 28 avril 1797, Hubert‑Pascal Ameilhon en devenant le premier bibliothécaire. Redécouverte à partir de 1824 grâce à Charles Nodier, elle gagna en notoriété et devint un foyer intellectuel, le dépôt légal de 1841 renforçant encore ses collections. Entre 1856 et 1870, Théodore Labrouste restructura les bâtiments, notamment le pavillon d'entrée et les façades sur la rue de Sully ; une partie des constructions fut détruite par un incendie en 1871. Aux XIXe et XXe siècles, les collections se spécialisèrent en littérature et en théâtre, enrichies par des fonds et donations majeurs. En 1934 la bibliothèque fut rattachée à la Réunion des bibliothèques nationales, puis devint en 1977 un département de la Bibliothèque nationale ; le département des arts du spectacle, créé en 1976, y demeura jusqu'en 2004 avant d'être transféré au site Richelieu. La bibliothèque de l'Arsenal possède aujourd'hui plus d'un million de documents, dont environ 150 000 volumes antérieurs à 1880 (1 623 incunables), plus de 15 000 manuscrits, 100 000 estampes et 3 000 cartes et plans ; sa politique d'acquisitions privilégie la littérature française des XVIe au XIXe siècles, l'histoire du livre, la bibliophilie et l'histoire de l'Arsenal. Ses grands fonds comprennent notamment les Archives de la Bastille, des collections liées à Prosper Enfantin, Joris‑Karl Huysmans, Louis‑Sébastien Mercier, Paul Lacroix, Joséphin Péladan, José‑Maria de Heredia et Georges Douay, ainsi que des affiches, cartes et plans et une importante collection musicale principalement du XVIIIe siècle. Classée au titre des monuments historiques en 2003, la bibliothèque demeure un lieu patrimonial consacré à la conservation et à la consultation des collections.