Origine et histoire du Phare du Créac'h
Le phare du Créac'h, situé à l'ouest de l'île d'Ouessant, marque l'entrée dans la Manche et commande la navigation autour des éperons rocheux de la pointe. C'est un phare de grand atterrissage, placé derrière les récifs ; seuls les phares de Nividic et de la Jument sont plus à l'ouest en France métropolitaine. Il surveille et pilote à distance plusieurs balises et phares voisins, notamment ceux du Stiff, de Kéréon et des Pierres Noires au large du Conquet. Le nom vient de la pointe de Créac'h, terme breton signifiant « hauteur, promontoire » (krec'h) ; en breton il porte le nom Tour-tan ar C'hreac'h et, en français, on trouve les formes « phare du Créac'h » et « phare de Créac'h ».
La conception et la construction ont été lancées après une demande du conseil municipal d'Ouessant et un avant-projet établi par l'ingénieur Maîtrot de Varennes. L'ouvrage, projeté par l'ingénieur de Carcaradec et réalisé sous la direction de Maîtrot de Varennes et de Rousseau par l'entrepreneur Tritschler, a été allumé en 1863 au sommet d'une tour cylindrique en maçonnerie haute de 46,50 m. Le soubassement est en pierres de taille de granit de Kersanton et la construction a bénéficié des perfectionnements apportés aux appareils lenticulaires de Fresnel.
Dès 1867, une trompette Holmes a été installée pour la signalisation sonore, puis le feu a été électrifié en 1888 ; l'ancien appareil optique a alors été transféré au phare du Stiff. Au fil du temps, les optiques et les bâtiments attenants ont évolué : optique double en 1901, installation d'un radiophare en 1912, d'un diaphone en 1932, et remplacement des bâtiments d'exploitation par un ensemble conçu par l'architecte Georges Martin en 1940-1941. Une nouvelle lanterne, présentée à l'Exposition universelle de Paris en 1937, a équipé le phare et a contribué à faire du feu du Créac'h l'un des plus puissants au monde ; ce feu était alors à deux éclats réguliers blancs toutes les dix secondes et pouvait atteindre des puissances très élevées en période de brume, bien que ces moyens ne soient plus en service. Le système d'éclairage a été modernisé par la suite : lampes au xénon en 1969, puis lampes aux iodures métalliques à partir de 1995.
Le phare a été classé au titre des monuments historiques par arrêté du 23 mai 2011 ; ce classement concerne le bâtiment, la lentille et le feu étant également reconnus comme patrimoine scientifique. Un programme d'assainissement visant à réduire l'emploi du mercure sur les cuves de rotation des lentilles a été engagé par l'administration, avec des exceptions prévues pour les phares classés ; le retrait du mercure empêcherait la rotation de la quadruple optique de 17 tonnes. Le projet élaboré fin 2024 de remplacer la lentille par un feu industriel installé au-dessus de l'optique, qui réduirait la portée de 30 à 19 milles et modifierait le signal, suscite une forte controverse.
Le phare se présente aujourd'hui comme une tour cylindrique lisse peinte de bandes horizontales blanches et noires, avec une balustrade sommitale, formant un groupe avec des bâtiments en U à sa base. L'ancienne centrale électrique accueille le musée des phares et balises, qui expose une importante collection d'optiques, de fanaux, de balises et d'objets liés à la signalisation maritime, y compris de nombreuses lentilles de Fresnel et des objets provenant d'épaves fouillées au large d'Ouessant. Le musée retrace l'évolution technologique des signaux lumineux et sonores, présente des supports audiovisuels sur la vie des gardiens de phare et a reçu en 1988 les collections de l'ancien dépôt du Service des phares et balises. Non loin du phare se trouve le sémaphore du Créac'h, aujourd'hui désarmé et acquis par le département du Finistère pour une résidence qui est actuellement fermée ; le site du phare est par ailleurs en travaux pour un projet culturel encore indéfini.
Le phare du Créac'h figure parmi les plus puissants d'Europe ; ses deux lanternes superposées émettent un signal lumineux réparti en huit faisceaux d'une portée d'environ 60 kilomètres.