Origine et histoire de la Pierre de la Joure
Le menhir dit « Pierre de la Joure » se situe sur la commune de Saint-Ouen-d'Attez, dans l'Eure. Il se dresse au bord d'un étang alimenté par la rivière Iton, à la limite des communes de Saint-Nicolas-d'Attez, Saint-Ouen-d'Attez et Condé-sur-Iton. Le mégalithe est un bloc de grès ferrugineux très dur, à pointe arrondie, mesurant 4,5 m de hauteur. Sa largeur moyenne est indiquée comme étant de 2,2 m et 1,6 m, et à 1,5 m du sommet le côté méplat atteint encore 1,4 m de largeur maximale. Une longue fente de 0,4 m de longueur et 0,05 m d'ouverture se situe au sommet. Plusieurs autres fissures profondes entaillent la face ouest, dont l'une commence à 0,8 m du sol, et la face est présente une surface plane tandis que la face ouest forme une protubérance au sommet. En 1896, Alphonse-Georges Poulain a estimé apercevoir, à l'extrémité du grès arrondi qui couronne le menhir, une représentation grossière d'une tête humaine et trois petits trous pouvant évoquer un nez et des yeux sur la face regardant le sud-ouest. Le monument est attribué au Néolithique. Dans la commune et ses environs ont été retrouvés des silex néolithiques ainsi que des haches, retouchoirs, grattoirs, percuteurs, nucleus et quelques pointes de flèches. Des découvertes paléolithiques comprennent deux haches amygdaloïdes et deux pointes moustériennes dans des terrains voisins. L'abondance d'outils de différentes époques atteste d'une occupation prolongée du site. Le menhir a été décrit pour la première fois par Auguste Le Prévost en 1832. Léon Coutil, président de la Société préhistorique française, a joué un rôle décisif pour le préserver de la destruction. Lors de sa visite en 1896, le menhir se trouvait sur un terrain marécageux à 55 m de l'Iton ; en 1901 Coutil constate qu'il est partiellement enseveli sous un important amas de sable et galet, ne laissant dépasser que 1,2 m. Un entrepreneur de Breteuil avait exploité ce terrain alluvial pour en extraire sable et galets, créant un trou d'extraction voisin et, plus tard, un étang artificiel qui a affaibli le sol et contribué à l'inclinaison actuelle du menhir. Les tentatives d'achat du monument auprès de l'exploitant n'ayant pas abouti, le terrain a été revendu à un agent qui projetait de déplacer la pierre dans le parc d'un château. Le menhir a finalement été protégé par son inscription au titre des monuments historiques par arrêté du 6 décembre 1934. Plusieurs légendes entourent la pierre : l'une raconte qu'à l'époque de l'invasion de la Gaule par les légions romaines, un chef gaulois nommé Hoël se serait donné la mort et aurait été enterré devant la pierre, qui serait alors un lieu de culte ancestral. On dit aussi que, pendant les nuits d'orage, des sanglots s'élèvent aux alentours et se mêlent au bruissement de l'Iton, et que la pierre, dite aussi « Pierre de Gargantua », ne se soulèverait qu'à la messe de Noël pour révéler un trésor. Une fente à environ 0,6 m du sommet, du côté opposé à l'étang, fait l'objet d'une autre légende : la veille de Noël, durant la messe de minuit et l'élévation, on pourrait retirer de ce trou autant d'or que l'on veut, mais la cavité se refermerait parfois et emprisonnerait la main de l'avide.