Origine et histoire de la Pile romaine
La pile romaine de Luzenac est une tour gallo-romaine en pierre située près du village de Luzenac de Moulis, sur la commune de Moulis (Ariège). Probable monument funéraire de l'époque romaine, elle a perdu sa partie supérieure et sa hauteur actuelle est inférieure à 6,50 m. Le monument est classé au titre des monuments historiques depuis le 6 octobre 1905. Érigée en terrain plat dans une vallée, la pile se dresse dans un champ proche du cimetière de Luzenac, entre la RD 618 et le Lez, à 439,5 m d'altitude ; elle n'apparaît sur aucune carte antérieure au XXe siècle. Sa datation reste incertaine mais, par comparaison avec des monuments analogues et selon ses caractéristiques de maçonnerie, elle est généralement placée entre le Ier et le IVe siècle apr. J.-C. Le terrain devant la face orientale, qui regarde la rivière, a été fouillé en 1884 lors d'une session du Congrès archéologique de France, puis de nouveau en 1910 ; un relevé du monument a été réalisé en 1965 par le bureau d'architecture antique de Pau. La pile a un plan presque carré — 2,70 m pour les faces nord et sud, 2,76 m pour les faces est et ouest — et comporte une niche sur sa face est. Elle est composée d'un massif de fondation, d'un soubassement de 0,83 m, d'un podium haut de 3,72 m et d'un étage supérieur conservé sur 2 m dans lequel est creusée la niche ; la niche à fond plat mesure 1,12 m de large pour 1,48 m de profondeur, sa partie supérieure ayant disparu. Exception faite de cette niche, la pile est un massif plein ; la maçonnerie associe un noyau en blocage à un parement en moellons de petit appareil, tandis que des briques et des pierres plates interviennent au niveau de l'entablement. La décoration est mal connue : subsistent une corniche séparant soubassement et podium, un entablement entre le podium et l'étage supérieur et, au début du XXe siècle, quelques éclats de marbre au fond de la niche ; aucune trace de pilastre n'est visible et des restes d'enduit sont perceptibles sur la face orientale, avec des traces ocre et ocre rouge signalées dans la niche au début du XXe siècle. On a proposé l'hypothèse d'une couverture pyramidale d'après le plan du monument, ce qui porterait la hauteur totale à environ 9,70 m, mais cette restitution reste conjecturale. Des vestiges de piles très ruinées, ainsi que des tessons de céramique, des fragments de briques et de tuiles, ont été signalés aux alentours, suggérant la possible présence d'un établissement antique sans qu'un enclos funéraire n'ait été identifié à proximité. Les fouilles de 1884 ont livré ce qui semblait être un vestige de voie antique entre la pile et la rivière, interprétation que les études de 1910 ont plutôt rattachée à un dépôt alluvionnaire, même si une voie sur la rive du Lez demeure envisageable. En 1884 certains érudits ont vu dans la niche la place d'un dieu protecteur des voyageurs et ont considéré la pile comme un monument religieux, opinion qui n'a pas fait l'unanimité ; il est cependant plus vraisemblable, comme pour d'autres piles, qu'il s'agisse d'un monument dédié à un personnage local, propriétaire ou notable, la niche étant orientée de façon à être visible des voyageurs si une voie passait entre la pile et la rivière. En 2015, l'archéologue Frédéric Veyssière a noté la proximité d'une carrière de marbre exploitée dès l'Antiquité, sans établir de lien formel entre la carrière et la pile, distantes de moins de trois kilomètres.