Origine et histoire
Un polissoir est un bloc de roche dure qui, au Néolithique, servait à polir des haches en silex ou en autres roches dures ; ils sont fabriqués en grès, quartzite, granit ou même silex et, par convention, classés parmi les mégalithes sans en posséder les caractéristiques. On distingue deux types principaux : des polissoirs à gorges longitudinales et des blocs à dépression circulaire. Les polissoirs à gorges présentent une ou plusieurs rainures de section en V ou en U, parfois accompagnées de cuvettes ; les rainures, souvent parallèles, correspondent au polissage des bords, tandis que les cuvettes, généralement ovales, résultent de l’affûtage ou du meulage des tranchants. Les dimensions varient beaucoup : les plus imposants, pesant parfois plusieurs tonnes, sont fixes, tandis que les plus petits pouvaient être transportés. Le polissage visait à rendre les tranchants plus résistants et plus efficaces ; après la taille et le bouchardage de l’ébauche, l’action d’abrasion s’effectuait sur un bloc humidifié, parfois avec du sable, pour lisser et affûter le tranchant. Ce travail était pénible : il exigeait souvent une pression de plusieurs dizaines de kilos pendant plusieurs heures. Les polissoirs sont fréquemment retrouvés groupés et parfois à proximité d’indices d’occupation comme des outils en silex ou une meule dormante, ce qui témoigne de leur rôle dans des zones de fabrication ou d’entretien d’outils. La prévalence de plages polies de formes variées indique souvent qu’il ne s’agissait pas d’aménagements volontaires, mais de traces résultant de l’activité répétée de polissage ; certaines cuvettes abandonnées ont ensuite servi de mortiers ou de laverasses — bassins ou blocs à cuvette utilisés par les paysans pour se laver les mains. Les formes des gorges ont alimenté l’imaginaire local et donné naissance à des microtoponymes tels que « griffes du diable » ou « fesses de sorcières ». La fréquence des polissoirs dépend de la disponibilité des roches adaptées aux haches et aux blocs de polissage ; ils sont donc nombreux dans le Bassin parisien et sur l’aire d’extension de la culture Seine-Oise-Marne, notamment dans les départements de l’Aube, de l’Yonne, de Seine-et-Marne, de l’Essonne, du Loiret, du Loir-et-Cher et d’Eure-et-Loir, avec des exemplaires connus comme ceux de Malakoff, du Clos des Raves à Faÿ, d’Aufferville, de Neuilly-Saint-Front ou de la Pinte de Saint-Martin à Corancez. Plusieurs centaines de polissoirs en grès stampien ou sparnacien ont été répertoriés à la limite sud du massif de Fontainebleau, dans la région de Nemours et les vallées de l’Orvanne et du Lunain. La prospection dans la région de Nemours montre qu’une grande partie des traces de polissage se présente sous forme de plages polies plutôt que de sillons ou cuvettes, même si des allongements et micro-rayures indiquent souvent un mouvement longitudinal dominant ; les cuvettes et les blocs à rainures classiques y sont néanmoins nombreux, et la taille des plages polies varie de un centimètre à plus d’un mètre.